L'ouverture de la boutique de réparation en libre service d'Apple dans une partie de l'Europe hier provoque les mêmes critiques que lors du lancement du grand frère américain au printemps dernier.
La campagne Right to Repair, qui regroupe une centaine d'organisations européennes pour le droit à la réparation, reconnait que cette boutique est une bonne nouvelle dans l'absolu puisqu'elle fournit des pièces détachées, des outils et des modes d'emploi accessibles gratuitement. Mais elle pointe aussi plusieurs problèmes qui vont à l'encontre du droit à la réparation tel que le prépare l'Union européenne.
Droit à la réparation : le Parlement européen veut des mises à jour réversibles et des composants faciles à retirer
« Cette décision d'Apple vise fondamentalement à promouvoir une vision du droit à la réparation où le fabricant conserve un contrôle presque entier sur le produit », déplore Ugo Vallauri, co-directeur du projet Restart cité dans le communiqué. D'abord, le programme d'Apple est limité à une poignée de pays : Belgique, France, Allemagne, Italie, Pologne, Espagne, Suède, et en dehors de l'UE, le Royaume-Uni. Il est probable qu'Apple déploie plus largement sa boutique, mais le constructeur n'a rien annoncé.
Ensuite, les appareils concernés par cette boutique sont très récents : iPhone 12 et 13, MacBook Air et Pro M1. La future législation européenne prévoit la disponibilité des pièces de rechange pendant au moins 7 ans après le retrait du produit de la commercialisation. Et puis les prix sont aussi montrés du doigt : il revient quasiment au même prix de réparer soi-même que de faire réparer en Apple Store.
Si tous ces arguments peuvent s'entendre, Right to Repair relève aussi le fait qu'Apple propose de louer des outils au travers de la location pendant une semaine de deux caisses de 35 kg pour 59,95 €. Il est vrai qu'on peut s'interroger sur l'impact environnemental d'un tel envoi (et il faut renvoyer le gros paquet derrière).
Mais un bon réparateur doit avoir de bons outils, même quand il s'agit d'un particulier ! La solution de la location n'est pas complètement farfelue, sachant qu'un bricoleur du dimanche n'aura sans doute pas besoin de ces appareils tout le temps. Les amateurs éclairés ont aussi la possibilité d'acheter ces outils spécialisés une bonne fois pour toutes.
La position de Right to Repair peut néanmoins se comprendre : la campagne veut « des produits conçus pour être faciles à réparer, en utilisant des outils couramment disponibles ». Un des plus gros soucis soulevés par cette organisation, et qui emboîte d'ailleurs le pas à iFixit, c'est que pour commander une pièce de rechange, il faut saisir le numéro EMEI de l'iPhone ou le numéro de série du Mac.
Droit à la réparation : Apple peut mieux faire, selon iFixit
La pièce sera donc liée à l'appareil réparé, et il y a une procédure d'autorisation donnée par Apple (serialisation). Tout cela limite nécessairement l'utilisation des pièces de rechange et rend le travail des reconditionneurs et des réparateurs indépendants très difficile. Bref, même s'il s'agit d'un premier pas encourageant, Apple peut mieux faire.
Après son ouverture en France, êtes-vous intéressé par la boutique de réparation en libre-service d'Apple ?
Mise à jour — Halte à l'Obsolescence programmée (HOP) a porté plainte auprès du Procureur de la République contre Apple contre la sérialisation des composants et des pièces détachées dans l'iPhone. Cette pratique « porte atteinte non seulement au droit à la réparation, mais également au développement du reconditionnement de smartphones », accuse l'association. Apple est poursuivie pour plusieurs chefs d'inculpation : pratiques commerciales trompeuses et délits assimilés à de l'obsolescence programmée.