Si Apple était une société uniquement pragmatique, l’événement du 27 mars aurait sans doute été fort différent. La marque à la pomme aurait présenté un ordinateur classique du point de vue de la forme à un prix très concurrentiel.
On vous épargnera les détails techniques, à savoir si cette machine aurait pu être un MacBook Air low cost sous macOS ou le digne successeur de l’eMate sur iOS. C’est en tout cas, semble-t-il, une demande récurrente du marché, qui se vérifie quand on observe le succès croissant des Chromebooks ces dernières années.
Ce graphique réalisé par Bloomberg l’illustre parfaitement. Il montre les ventes d’ordinateurs portables (au sens large) dans les écoles du primaire et secondaire. Depuis 2014, la tablette d’Apple ne cesse de perdre du terrain que ce soit au profit des Chromebook ou des portables Windows. Mais dans ce domaine, comme dans d’autres, Apple a une vision assez nette des choses. Après, on peut être d’accord ou pas.
Tim Cook ne plaisantait pas quand il déclarait que l’éducation a toujours occupé une place spéciale au sein d’Apple. À la fin des années 1990, quand les jours de la firme de Cupertino semblaient comptés, c’était l’un des rares secteurs qui n’avaient pas totalement abandonné le Macintosh. Steve Jobs avait d’ailleurs créé NeXT pour « révolutionner » l’enseignement supérieur avec ses stations de travail.
Forcément, la situation actuelle d’Apple est problématique. D’où la tentative de rebond effectuée cette semaine à Chicago. Pour Apple, ce keynote consistait autant à présenter son « nouvel » iPad que de réaffirmer sa vision de l’éducation et des outils pédagogiques.
Pour résumer, chez Apple, la tablette est perçue comme un meilleur outil que l’ordinateur portable (et ses dérivés comme les hybrides) pour assister dans leurs tâches au quotidien élèves et professeurs. Pour Apple, sa tablette est en quelque sorte un cahier et/ou un livre magique. Et elle vient d’en donner une nouvelle fois la preuve. Quel est l’outil sur lequel elle insiste particulièrement avec sa nouvelle tablette ? L'Apple Pencil. Le clavier est relayé au rayon des accessoires pouvant être utiles, mais qui au bout du compte ne sont pas si indispensables que cela.
Le quiproquo avec le monde de l’éducation vient sans doute de ce point précis. Dans les cahiers des charges, notamment en France, le clavier est un prérequis indispensable. D’une certaine manière, c’est assez étonnant et finalement un choix relativement conservateur. Le stylet est finalement un objet plus proche du quotidien des élèves que le clavier.
La question de l’utilisation de l’outil informatique suscite beaucoup de passion, mais également de crispation, dans les écoles, que ce soit du côté des enseignants ou des parents. On entend tous types de discours, qui souvent d’ailleurs font l’économie de l’usage de la raison. Il y a ceux qui sont contre par principe, ceux qui militent exclusivement pour l’utilisation de logiciels libres ou encore ceux qui désirent que leurs chers bambins apprennent les mêmes logiciels que papa et maman au travail. Mais finalement, l’usage et la finalité de ces outils, il n'en est que rarement question.
La proposition d’Apple est simple : un iPad, accompagné de préférence de son stylet, permet d’être plus créatif, de facilement travailler à plusieurs, d’être plus mobile et de pouvoir travailler dans toutes circonstances. On appréciera ou non le discours d’Apple, on est toutefois cependant forcé de constater que certains outils sont très bien fichus comme Swift Playgrounds, les logiciels de la suite iWork, qui font maintenant un bel usage du Pencil, ou encore les apps de réalité augmentée présentées hier.
L’iPad est incontestablement un bel objet pour stimuler ses utilisateurs, pour créer, pour réaliser des exposés, pour apprendre, pour découvrir, pour dessiner, pour réviser ou encore valider de nouveaux acquis. Si la proposition d’Apple objectivement est très cohérente, il lui reste à convaincre. Et c’est sans doute le plus difficile. Mais Tim Cook l’a prouvé plus d’une fois avec l’iPad, il sait être patient.