C'est la grande nouveauté des derniers MacBook Pro. Avec Thunderbolt, Apple se lance une fois de plus dans la promotion d'une nouvelle connectique. Par le passé, la société californienne a joué un rôle déterminant dans la conception du FireWire et a grandement participé à l'éclosion de l'USB. Qu'est-ce que Thunderbolt ? Pouquoi Apple s'est lancée dans une telle aventure ? Explications…
Thunderbolt est la fusion entre DisplayPort et PCI-Express. Il permet de connecter jusqu'à sept appareils en série (dont deux écrans haute résolution), à 10 Gbps et avec une latence record de 8 nanosecondes jusqu'au bout de la chaîne. À noter que le moniteur intégré des MacBook Pro est connecté sur le bus Thunderbolt, ce qui fait qu'un seul moniteur externe pourra être supporté en HD. Il devrait être possible d'utiliser des concentrateurs (hubs) Thunderbolt, comme c'est également possible avec le PCI-express et le DisplayPort. Les deux protocoles transitent en multiplex sur un seul et même câble.
La connectique reprend celle du mini DisplayPort, permettant ainsi de brancher directement les écrans supportant ce standard sans autre forme de procès. Cette pleine compatibilité fait de Thunderbolt le successeur de facto de mini DisplayPort dans tous les Mac à venir, comme c'est déjà le cas dans les MacBook Pro.
Rappelons que c'est Apple qui a mis au point cette version miniature du DisplayPort et que celle-ci a été ajoutée par la suite au standard. Mini DisplayPort a été depuis exploité par d'autres fabricants tels que Toshiba, AMD, HP ou encore Dell. Le mini DisplayPort permet de faire transiter le son depuis avril 2010, et Thunderbolt hérite également de cette fonction : ainsi le standard permet-il de faire transiter les données, la vidéo numérique, le son, et 10 watts d'alimentation à travers un seul câble. À noter, qu'il sera simple et économique de fabriquer des adaptateurs Thunderbolt pour le FireWire, l'eSATA, l'USB ou encore le Gigabit Ethernet, grâce à la compatibilité avec le PCI-Express.
Des capacités qui rappellent celles de l'Apple Display Connector, une modification du standard DVI qui permettait avec un seul câble de faire transiter la vidéo numérique, le son, les données (via le protocole USB) et une alimentation de 100 watts. L'alimentation de l'ADC est devenue insuffisante pour les moniteurs les plus gourmands, et l'absence de matériel compatible à cette norme a mis fin à l'expérience. Apple a tiré les leçons de cet échec avec mini DisplayPort (en offrant tout d'abord la licence gracieusement avant qu'elle ne soit intégrée au standard DisplayPort), puis avec Thunderbolt. Les 10 watts transmis par Thunderbolt ne suffiront pas pour alimenter plus qu'un moniteur, toutefois ils permettront d'alimenter les disques qui y seront raccordés. À titre de comparaison, le FireWire délivre 7 watts, l'USB 2 2,5 watts (5,5 watts dans l'implémentation d'Apple), et l'USB 3 4,5 watts.
Thunderbolt a commencé sa carrière chez Intel sous le nom de Light Peak, et en utilisant plutôt la fibre optique. Intel a présenté des prototypes qui fonctionnaient sur des connecteurs USB, et a annoncé son désir de collaborer avec l'USB Implementers Forum (USB-IF) pour utiliser cette connectique, proposition déclinée par le consortium. Et pour cause, Thunderbolt pourrait bien faire de l'ombre à l'USB 3. L'implémentation actuelle de Thunderbolt se base toujours sur les bons vieux câbles en cuivre, ce qui ne l'empêche pas d'atteindre les 10 Gbps en simultanée (full duplex) sur l'entrée comme la sortie. Le tout se fera sans embouteillages, la vidéo HD aura un débit garanti, le débit de données quant à lui sera réparti entre les différents périphériques faisant appel au bus PCI.
En revanche, cette version électrique de Thunderbolt limite la longueur des câbles à 3 mètres, une limitation qui n'aura plus cours avec de la fibre optique (elle fonctionnera jusqu'à 100 mètres). La version optique de Thunderbolt est sans doute celle appelée à prendre le relais à l'avenir, Intel prédisant que le procédé permettra d'obtenir 100 Gbps dans la décennie à venir. L'inconvénient de la fibre optique en revanche c'est qu'elle ne permet pas de transmettre une alimentation (bien que l'implémentation d'Intel intègre une gaine métallique, et qu'Apple ait également déposé des brevets dans ce sens). À noter que la conversion électrique/optique sera intégrée au sein même du câble, les connecteurs actuels des nouveaux MacBook Pro seront donc compatibles. Intel escompte cependant qu'à terme la connectique elle-même soit optique.
La large bande passante de Thunderbolt pourrait lui ouvrir nombre d'applications encore inédites. On pourrait ainsi envisager un moniteur qui inclut une carte vidéo plus puissante, ou même un disque dur, le tout relié à un MacBook Pro par un seul câble. Le MacBook Pro pourrait se transformer en station de travail en raccordant simplement des disques RAID et un écran HD, répondant aux exigences de la vidéo professionnelle. La possibilité de chaîner les périphériques devrait amoindrir les enchevêtrements de câbles, qui plus est sachant qu'un câble permet de transmettre donnés, images, son et alimentation, et il suffira de brancher son portable à une connexion en série déjà faite pour que tous les périphériques s'y raccordent en un seul branchement. Voilà qui rappellera des souvenirs aux utilisateurs de disques SCSI.
Le SCSI, son bouchon, et ses branchements en série (image : ghbrett)
Apple pourrait peser de tout son poids pour imposer Thunderbolt en intégrant un connecteur à son iPad, ce qui permettrait de brancher simplement l'appareil sur tout moniteur compatible. Cependant pour l'heure aucun appareil iOS n'intègre de bus PCI, et le standard du connecteur Dock n'est pas près de disparaître eu égard au nombre de périphériques compatibles. Les choses se présentent assez bien pour Thunderbolt pour l'heure, puisque Promise et LaCie a déjà fait des annonces de produits compatibles.
Malgré son côté avant-gardiste, Thunderbolt soulève toutefois des questions sur le plan de la sécurité. À l'inverse de l'USB qui suit un schéma maître-esclave (le maître a un accès complet à l'esclave, mais l'esclave n'a pas d'accès au maître), Thunderbolt accorde une confiance totale aux périphériques qui s'y connectent, à l'image du FireWire. Il serait ainsi hypothétiquement possible, avec un accès physique à une machine, d'en aspirer tout le contenu. Mais le revers de cette médaille en fait également un avantage puisqu'il est ainsi possible d'utiliser le mode disque cible (Target Disk Mode) à travers Thunderbolt comme c'était déjà le cas avec FireWire. Cette capacité devrait théoriquement permettre de démarrer à partir d'un disque branché sur le port Thunderbolt, bien que selon Andy Ihnatko cette fonction ne soit pas encore disponible. D'autre part, le protocole PCI-Express ouvre un accès de bas niveau aux ressources de la machine (le bus PCI exige un accès illimité à la mémoire), ce qui pourrait également être susceptible de poser problème.
Si cette technologie semble prometteuse sur le papier, encore faudra-t-il convaincre le reste de l'industrie de suivre. Alors que l'USB 3.0 est en pleine phase de décollage, les annonces de soutien de Thunderbolt se comptent sur les doigts d'une main. Pour l'heure, seuls les fabricants de solutions de stockage regardent avec intérêt cette technologie. Les fabricants de cartes mères sont pour leur part restés silencieux sur la question. De son côté, AMD enterre à moitié Thunderbolt estimant qu'elle ne se distingue pas suffisamment des technologies existantes (lire : AMD ne croit pas en Thunderbolt).