Comme le fait remarquer Anand Lai Shimpi de Macworld, la feuille de route processeur d'Apple était jusqu'ici cousue de fil blanc : Intel annonçait un processeur, Apple en avait parfois l'exclusivité, et il se retrouvait dans un Mac. Depuis quelques mois pourtant, les mises à jour matérielles chez Apple sont un peu difficiles à lire et ont parfois provoqué l'incompréhension : alors que tout le monde passait au Core i3, i5 ou i7, certains portables frappés d’une pomme sont restés au Core 2 Duo.
Intel : du grand amour à l'indifférence finale
Il est loin le temps où le patron d'Intel Paul Otellini montait sur scène en compagnie de Steve Jobs pour célébrer le passage des Mac aux processeurs x86 d'Intel. Un an plus tard, la transition était bouclée, Boot Camp permettait d'installer Windows sur son Mac, et les applications PowerPC pouvaient tourner sur Mac Intel grâce à Rosetta.
Ultime affront pour IBM, la barre des 3 GHz était bien vite atteinte avec les premiers Mac Pro — la page Power Mac s'est rapidement tournée, sauf pour quelques nostalgiques aussi indécrottables qu'aigris.
Les relations entre Intel et Apple ont souvent été cordiales, parfois extraordinairement proche : le MacBook Air descend presque directement du projet Metro, dont le tout petit et très économe processeur a permis à Apple de construire une machine radicale (lire : Metro, l'avenir des portables selon Intel).
Un certain leadership technologique, accompagné de pratiques commerciales parfois agressives, ont permis à Intel de prendre une avance confortable sur AMD, qui s'est longtemps replié sur le bas de gamme. Le secteur manquant de concurrence, Intel s'est permis de délayer sa feuille de route, et d'interdire à NVIDIA de développer des chipsets pour les processeurs Core iX. Alors qu'Apple avait certainement conçu sa gamme la plus cohérente autour du chipset NVIDIA GeForce 9400M, qui lui permettait de se passer des affligeantes puces graphiques Intel GMA, on se doute que la décision a dû provoquer quelques broncas à Cupertino…
Un nouveau compromis
De fait, le compromis que semblait avoir trouvé Apple était simple : un processeur assez puissant, parfois obtenu avant les autres, et un chipset faisant office de coprocesseur graphique de bonne facture. Pendant un peu plus d'un an, les configurations offertes par Apple étaient donc assez équilibrées, et pouvaient tenir sans rougir la comparaison avec le monde d'en face.
L'exclusion de NVIDIA du marché des chipsets a mis Apple dans l'embarras : il fallait soit passer aux chipsets Intel dont les processeurs graphiques sont peu performants à l'heure de l'utilisation des puces graphiques comme coprocesseur, soit passer à une carte graphique dédiée sur tous les modèles, ce qui pose plusieurs problèmes, tant en termes de consommation et donc d'autonomie que de place — et accessoirement de marge, sur laquelle Apple n'aime pas forcément rogner.
Lors du renouvellement de la gamme MacBook Pro, les modèles 15 et 17" sont passés au Core i5 et i7 Arrandale avec une carte graphique dédiée (aujourd'hui GeForce GT 330M à 256 ou 512 Mo de VRAM), mais les modèles 13" sont restés au Core 2 Duo avec un chipset GeForce 320M. Apple a fait là un choix : garder la carte-mère du MacBook Pro 13" de la plus petite taille possible afin d'avoir la batterie, et donc l'autonomie, la plus grande possible. Comme le disait Steve Jobs à l'époque, c'est mieux que rien : « de bien meilleures performances graphiques et une autonomie de 10 heures valent mieux qu'un processeur plus rapide de 10 ou 20 % ».
Le récent renouvellement des MacBook Air confirme cette nouvelle stratégie d'Apple : puisqu'elle est coincée sur le segment des processeurs, elle trouve un nouvel équilibre sur d'autres segments (lire : MacBook Air : le futur des MacBook ?). Apple aurait pu utiliser un processeur Core i3 et donc l'HyperThreading sur le MacBook Air (lire : Matériel : des compromis pesés et soupesés). Mais elle a fait le choix d'une puce un peu moins puissante, au profit de l'utilisation d'un chipset graphique NVIDIA GeForce 320M bien plus performant que le chipset Intel HD des Core i3.
Comme du temps où la G5 n'évoluait pour ainsi dire plus, Apple a déporté ses efforts pour améliorer ses ordinateurs : on ne parle plus de puissance brute processeur, on parle de réactivité grâce au SSD, d'excellente autonomie, de confort d'utilisation lorsque c'est le processeur graphique qui décode les vidéos HD et permet d'oublier les ventilateurs. Parce que le coprocesseur graphique a de l'avenir, Apple peut se permettre de le privilégier, ce qu'elle fait en proposant des technologies comme OpenCL, certes encore peu utilisées, mais qui finiront par payer.
Intel - NVIDIA = AMD ?
Reste que la rumeur AMD est suffisamment tenace pour que l'on se dise qu'il n'y a pas de fumée sans feu. Si l'on part du principe qu'Apple compte privilégier, au moins sur le segment grand public (donc hors Mac Pro) le confort global aux performances brutes, l'hypothèse de l'utilisation de la plateforme AMD Fusion est tout sauf stupide.
La plateforme Fusion tourne autour d'un APU (Accelerated Processing Unit), une puce regroupant processeur (CPU), coprocesseur graphique (GPU) et mémoire vive. Cela n'est pas sans rappeler les systèmes sur puce ARM comme l'A4 utilisés dans l'iPad ou l'iPhone, et est donc une architecture relativement connue par Apple.
Le grand avantage de cette plateforme est qu'elle correspond aux choix faits par Apple ces derniers mois : un processeur un peu moins puissant que la moyenne (on ne pensait pas revoir du 1,4 GHz chez Apple, mais c'est ce que l'on trouve dans le MacBook Air), mais un composant graphique plutôt performant. Mais les systèmes qui pourraient intéresser le plus Apple (Krishna et Trinity) ne devraient pas être disponibles avant 2012 (lire : Apple / AMD, c’est du sérieux ?).
Intel pourrait donc bien garder Apple comme client à la faveur d'un traité de paix avec NVIDIA, et il semble que celui-ci soit en bonne voie, si l'on en croit Bloomberg. Intel essaierait en effet de résoudre son procès face à NVIDIA à l'amiable, c'est-à-dire en autorisant à nouveau son voisin de Santa Clara à fabriquer des chipsets pour les processeurs Core iX.
Apple pourrait dès lors proposer des processeurs puissants et un composant graphique performant, le meilleur des deux mondes en quelque sorte. Cela tombera presque à pic : la prochaine évolution processeur chez Intel, Sandy Bridge, possédera un chipset graphique compatible avec OpenCL, la technologie d'accélération graphique chère à Apple. Si l'on croit dès lors que l'on peut toujours lire dans la feuille de route d'Intel l'agenda d'Apple, il va falloir s'attendre à des mises à jour de la gamme à partir du deuxième trimestre 2011, et peut-être (enfin !) l'abandon du Core 2 Duo.
Autre avantage en faveur d'Intel : Light Peak, qui intéresserait particulièrement Apple. Basée sur la fibre optique, elle permet d'atteindre des débits de l'ordre de 10 Gb/s. La Pomme pourrait utiliser cette technologie à toutes les sauces et résoudre certains goulots d'étranglements qui frappent actuellement nos ordinateurs.
Intel ou AMD ? Apple tranchera-t-elle ? Rien n'est moins sûr, la firme de Cupertino pourrait tout simplement décider de ne pas mettre tous ses oeufs dans le même panier afin de réduire sa dépendance à une société en particulier. Mais le plus intéressant au final pour l'utilisateur, c'est que ces deux entreprises ont dans leurs cartons de quoi faire évoluer de manière substantielle nos bons vieux « poids lourds ».
Intel : du grand amour à l'indifférence finale
Il est loin le temps où le patron d'Intel Paul Otellini montait sur scène en compagnie de Steve Jobs pour célébrer le passage des Mac aux processeurs x86 d'Intel. Un an plus tard, la transition était bouclée, Boot Camp permettait d'installer Windows sur son Mac, et les applications PowerPC pouvaient tourner sur Mac Intel grâce à Rosetta.
Ultime affront pour IBM, la barre des 3 GHz était bien vite atteinte avec les premiers Mac Pro — la page Power Mac s'est rapidement tournée, sauf pour quelques nostalgiques aussi indécrottables qu'aigris.
Les relations entre Intel et Apple ont souvent été cordiales, parfois extraordinairement proche : le MacBook Air descend presque directement du projet Metro, dont le tout petit et très économe processeur a permis à Apple de construire une machine radicale (lire : Metro, l'avenir des portables selon Intel).
Un certain leadership technologique, accompagné de pratiques commerciales parfois agressives, ont permis à Intel de prendre une avance confortable sur AMD, qui s'est longtemps replié sur le bas de gamme. Le secteur manquant de concurrence, Intel s'est permis de délayer sa feuille de route, et d'interdire à NVIDIA de développer des chipsets pour les processeurs Core iX. Alors qu'Apple avait certainement conçu sa gamme la plus cohérente autour du chipset NVIDIA GeForce 9400M, qui lui permettait de se passer des affligeantes puces graphiques Intel GMA, on se doute que la décision a dû provoquer quelques broncas à Cupertino…
Un nouveau compromis
De fait, le compromis que semblait avoir trouvé Apple était simple : un processeur assez puissant, parfois obtenu avant les autres, et un chipset faisant office de coprocesseur graphique de bonne facture. Pendant un peu plus d'un an, les configurations offertes par Apple étaient donc assez équilibrées, et pouvaient tenir sans rougir la comparaison avec le monde d'en face.
L'exclusion de NVIDIA du marché des chipsets a mis Apple dans l'embarras : il fallait soit passer aux chipsets Intel dont les processeurs graphiques sont peu performants à l'heure de l'utilisation des puces graphiques comme coprocesseur, soit passer à une carte graphique dédiée sur tous les modèles, ce qui pose plusieurs problèmes, tant en termes de consommation et donc d'autonomie que de place — et accessoirement de marge, sur laquelle Apple n'aime pas forcément rogner.
Lors du renouvellement de la gamme MacBook Pro, les modèles 15 et 17" sont passés au Core i5 et i7 Arrandale avec une carte graphique dédiée (aujourd'hui GeForce GT 330M à 256 ou 512 Mo de VRAM), mais les modèles 13" sont restés au Core 2 Duo avec un chipset GeForce 320M. Apple a fait là un choix : garder la carte-mère du MacBook Pro 13" de la plus petite taille possible afin d'avoir la batterie, et donc l'autonomie, la plus grande possible. Comme le disait Steve Jobs à l'époque, c'est mieux que rien : « de bien meilleures performances graphiques et une autonomie de 10 heures valent mieux qu'un processeur plus rapide de 10 ou 20 % ».
Le récent renouvellement des MacBook Air confirme cette nouvelle stratégie d'Apple : puisqu'elle est coincée sur le segment des processeurs, elle trouve un nouvel équilibre sur d'autres segments (lire : MacBook Air : le futur des MacBook ?). Apple aurait pu utiliser un processeur Core i3 et donc l'HyperThreading sur le MacBook Air (lire : Matériel : des compromis pesés et soupesés). Mais elle a fait le choix d'une puce un peu moins puissante, au profit de l'utilisation d'un chipset graphique NVIDIA GeForce 320M bien plus performant que le chipset Intel HD des Core i3.
Comme du temps où la G5 n'évoluait pour ainsi dire plus, Apple a déporté ses efforts pour améliorer ses ordinateurs : on ne parle plus de puissance brute processeur, on parle de réactivité grâce au SSD, d'excellente autonomie, de confort d'utilisation lorsque c'est le processeur graphique qui décode les vidéos HD et permet d'oublier les ventilateurs. Parce que le coprocesseur graphique a de l'avenir, Apple peut se permettre de le privilégier, ce qu'elle fait en proposant des technologies comme OpenCL, certes encore peu utilisées, mais qui finiront par payer.
Intel - NVIDIA = AMD ?
Reste que la rumeur AMD est suffisamment tenace pour que l'on se dise qu'il n'y a pas de fumée sans feu. Si l'on part du principe qu'Apple compte privilégier, au moins sur le segment grand public (donc hors Mac Pro) le confort global aux performances brutes, l'hypothèse de l'utilisation de la plateforme AMD Fusion est tout sauf stupide.
La plateforme Fusion tourne autour d'un APU (Accelerated Processing Unit), une puce regroupant processeur (CPU), coprocesseur graphique (GPU) et mémoire vive. Cela n'est pas sans rappeler les systèmes sur puce ARM comme l'A4 utilisés dans l'iPad ou l'iPhone, et est donc une architecture relativement connue par Apple.
Le grand avantage de cette plateforme est qu'elle correspond aux choix faits par Apple ces derniers mois : un processeur un peu moins puissant que la moyenne (on ne pensait pas revoir du 1,4 GHz chez Apple, mais c'est ce que l'on trouve dans le MacBook Air), mais un composant graphique plutôt performant. Mais les systèmes qui pourraient intéresser le plus Apple (Krishna et Trinity) ne devraient pas être disponibles avant 2012 (lire : Apple / AMD, c’est du sérieux ?).
Intel pourrait donc bien garder Apple comme client à la faveur d'un traité de paix avec NVIDIA, et il semble que celui-ci soit en bonne voie, si l'on en croit Bloomberg. Intel essaierait en effet de résoudre son procès face à NVIDIA à l'amiable, c'est-à-dire en autorisant à nouveau son voisin de Santa Clara à fabriquer des chipsets pour les processeurs Core iX.
Apple pourrait dès lors proposer des processeurs puissants et un composant graphique performant, le meilleur des deux mondes en quelque sorte. Cela tombera presque à pic : la prochaine évolution processeur chez Intel, Sandy Bridge, possédera un chipset graphique compatible avec OpenCL, la technologie d'accélération graphique chère à Apple. Si l'on croit dès lors que l'on peut toujours lire dans la feuille de route d'Intel l'agenda d'Apple, il va falloir s'attendre à des mises à jour de la gamme à partir du deuxième trimestre 2011, et peut-être (enfin !) l'abandon du Core 2 Duo.
Autre avantage en faveur d'Intel : Light Peak, qui intéresserait particulièrement Apple. Basée sur la fibre optique, elle permet d'atteindre des débits de l'ordre de 10 Gb/s. La Pomme pourrait utiliser cette technologie à toutes les sauces et résoudre certains goulots d'étranglements qui frappent actuellement nos ordinateurs.
Intel ou AMD ? Apple tranchera-t-elle ? Rien n'est moins sûr, la firme de Cupertino pourrait tout simplement décider de ne pas mettre tous ses oeufs dans le même panier afin de réduire sa dépendance à une société en particulier. Mais le plus intéressant au final pour l'utilisateur, c'est que ces deux entreprises ont dans leurs cartons de quoi faire évoluer de manière substantielle nos bons vieux « poids lourds ».