Chose rare, Steve Jobs vient de publier une lettre ouverte sur le site d’Apple, intitulée "Thoughts on Flash" (réflexions sur Flash), dans laquelle il s’exprime au sujet de la technologie d'Adobe, sujet qui a fait beaucoup couler d’encre depuis quelques semaines, notamment avec la sortie de l’iPad. Au vu de certaines prises de position - Flash présenté comme une technologie du passé - il serait étonnant qu'Adobe reste silencieux. Au passage, on observe que cette sortie du patron d'Apple avait fuité hier.
En introduction, Jobs rappelle qu'Adobe a été le premier gros client d’Apple. Elle avait développé le langage PostScript que la firme de Cupertino avait intégré à ses LaserWriter, les fameuses imprimantes lasers qui fêtent leur vingt-cinquième anniversaire ces temps-ci. À l’époque, Apple et Adobe avaient travaillé main dans la main comme rarement, explique Jobs. Ajoutant que la Pomme avait aussi investi à hauteur de 20% dans le capital d'Adobe pendant quelques années.
Depuis cet "âge d’or", les deux sociétés ont évolué, constate Steve Jobs. "Apple a failli mourir et a fini par se redresser alors qu’Adobe a développé son activité vers le monde de l’entreprise avec ses produits Acrobat". Les deux sociétés travaillent en commun afin de répondre aux besoins des créatifs. Jobs rappelle qu’une copie sur deux de la Creative Suite est vendue à un utilisateur Mac.
Jobs donne ensuite très simplement son avis - on peut même parler de réquisitoire - sur Flash afin que les clients et les spécialistes puissent mieux comprendre pourquoi Flash n’est pas présent sur l’iPhone, l'iPod touch et l’iPad. D’après lui, Adobe a toujours fait croire qu’Apple n’ouvrait pas la porte à Flash pour des raisons commerciales afin de protéger l’App Store. Pour Steve Jobs, c’est tout le contraire : c’est avant tout une décision à caractère(s) techniques(s).
Il démonte ensuite l’argumentation d’Adobe indiquant que Flash est un système ouvert. "Les produits Flash sont 100% propriétaires". Adobe ayant seule autorité sur leur évolution ou leur prix. Le fait que Flash soit largement répandu n'en fait pas un produit ouvert écrit Jobs, au final c'est Adobe qui en garde le complet contrôle.
Apple aussi a son lot de produits propriétaires poursuit Jobs, mais Apple, comme Google, a fait le choix de standards ouverts, lorsqu'ils étaient pertinents pour le web : HTML5, CSS et JavaScript. Et d'ajouter qu'Apple apporte sa contribution en ayant par exemple "créé WebKit à partir d'un petit projet open source". Un WebKit utilisé aujourd'hui par Android, Palm, Nokia et RIM. En faisant un standard pour les navigateurs mobiles.
Second point, la place de Flash sur le Web. Au discours d'Adobe selon lequel Apple prive ses appareils de 75% des vidéos sur le web, Jobs rappelle que la plupart de cette masse est disponible dans "un format plus moderne, le H.264". Les vidéos de YouTube qui représentent 40 % des vidéos sur le web sont lisibles sur les plateformes mobiles d'Apple. Et d'énumérer des services comme Vimeo, Netflix, Facebook, des chaînes de télé américaines… "les utilisateurs d'iPhone, iPod et iPad ne sont pas en manque de vidéos".
Jobs concède que ces appareils ne peuvent utiliser les jeux en Flash, mais il renvoie aux 50 000 jeux et titres de loisir sur l'App Store, dont une partie non négligeable est gratuite. Un volume qu'il estime dépasser de loin celui de n'importe quelle autre plateforme.
Viennent ensuite les questions de sécurité, fiabilité et performances. Il dresse un portrait de Flash responsable de la plupart des plantages sur Mac, avec en outre, selon Symantec, le bilan le plus noir en matière de sécurité en 2009. Apple et "Adobe ont travaillé à résoudre ces problèmes, mais ils perdurent depuis maintenant plusieurs années" déplore Jobs.
Il met ensuite en doute la capacité d'Adobe à faire correctement fonctionner Flash sur des mobiles. "Nous leur avons régulièrement demandé de nous montrer Flash qui marcherait bien sur un mobile. On ne l'a jamais vu" Et d'égrener les retards rencontrés dans la finalisation de cette version de Flash "On pense qu'il finira par sortir, mais nous sommes contents de ne pas avoir eu à attendre. Qui sait comment cela fonctionnera ?"
Quatrième point, l'impact sur la batterie des mobiles. Pour Jobs, l'utilisation du H.264 associée à un décodeur de type matériel permet de bons résultats en autonomie pour la lecture de vidéos. Alors que Flash utilise encore une ancienne solution, non supportée par les puces pour mobiles, qui oblige à un décodage logiciel des vidéos et par là, divise l'autonomie par deux. L'avantage du H.264 étant aussi qu'il ne nécessite aucun plug-in pour être lu directement par un navigateur, et qu'il est parfaitement géré par les appareils mobiles.
Cinquième point, l'interaction tactile. Les interfaces en Flash utilisent des éléments qui se prêtent mal à une utilisation sans souris et de type multitouch. Donc, quitte à devoir réécrire son site, pourquoi ne pas le faire directement en HTML 5, CSS et JavaScript, suggère Jobs.
Enfin, sixième point, "le plus important", le fait qu'Adobe vise à ce que les développeurs utilisent Flash pour créer des applications pour iPhone. Jobs reprend un argument déjà évoqué récemment, le fait que Flash est un outil de développement multiplateforme, qui ne tirera profit que du plus petit dénominateur commun de chacune de ces plateformes (lire Adobe prend un bol d'AIR sur l'iPad). De manière à ce qu'un logiciel puisse être écrit une seule fois et fonctionner à l'identique partout "Il n'est pas dans les objectifs d'Adobe d'aider les développeurs à écrire les meilleures applications iPhone, iPod et iPad."
Jobs critique également le fait qu'Adobe a été terriblement lent à adopter les améliorations survenues sur les plateformes d'Apple. "Alors que Mac OS X est sorti depuis presque dix ans, Adobe l'a pleinement adopté (Cocoa) il y a deux semaines avec la sortie de la CS5. Adobe a été le dernier des grands éditeurs à complètement adopter Mac OS X" (ndlr, Jobs glisse sur le fait qu'Apple aussi a quelques grosses applications toujours en attente de passage sur Cocoa : iTunes, Final Cut Studio, etc…).
L'objectif d'Apple, explique Jobs, est que les développeurs puissent s'appuyer directement sur iPhone OS pour leurs applications, plutôt qu'au travers de solutions tierces qui ne seront pas à même de leur proposer toutes les possibilités de l'original, ou qui le feront avec retard. Créant par là une dépendance délicate vis à vis de ces intermédiaires.
Ce qui amène le patron d'Apple à conclure - en versant les dernières goutes d'essence sur les flammes - que Flash a été conçu "à l'époque du PC et des souris", mais qu'il n'est plus nécessaire pour les plateformes mobiles, malgré l'envie d'Adobe, pour des raisons compréhensibles, de l'y voir jouer un rôle.
"L'avalanche de médias qui offrent leurs contenus pour les appareils mobiles d'Apple montre que Flash n'est plus nécessaire pour regarder des vidéos ou consommer toute sorte de contenus Web. Et les 200 000 applications sur l'App Store prouvent que Flash n'est plus indispensable pour les dizaines de milliers de développeurs qui veulent créer des applications riches graphiquement, jeux compris".
"Les nouveaux standards ouverts créés à l'ère du mobile, comme le HTML5, l'emporteront sur les appareils mobiles (et sur les PC aussi). Peut-être qu'Adobe devrait se concentrer davantage, pour l'avenir, sur la création de très bons outils HTML5, et moins critiquer Apple sur le fait qu'elle entend laisser le passé derrière elle".
Une sortie du patron d'Apple sur ce maintenant vieux débat (on retrouve des traces de cette querelle dès l'automne 2008) qui intervient alors que les répercussions de l'affaire Gizmodo et de l'iPhone 4G font toujours l'actualité, et qu'Adobe venait de commencer à optimiser Flash sur Mac OS X, après avoir obtenu une API longtemps réclamée à Apple…
Sur le même sujet :
- La réponse d’Adobe
En introduction, Jobs rappelle qu'Adobe a été le premier gros client d’Apple. Elle avait développé le langage PostScript que la firme de Cupertino avait intégré à ses LaserWriter, les fameuses imprimantes lasers qui fêtent leur vingt-cinquième anniversaire ces temps-ci. À l’époque, Apple et Adobe avaient travaillé main dans la main comme rarement, explique Jobs. Ajoutant que la Pomme avait aussi investi à hauteur de 20% dans le capital d'Adobe pendant quelques années.
Depuis cet "âge d’or", les deux sociétés ont évolué, constate Steve Jobs. "Apple a failli mourir et a fini par se redresser alors qu’Adobe a développé son activité vers le monde de l’entreprise avec ses produits Acrobat". Les deux sociétés travaillent en commun afin de répondre aux besoins des créatifs. Jobs rappelle qu’une copie sur deux de la Creative Suite est vendue à un utilisateur Mac.
Jobs donne ensuite très simplement son avis - on peut même parler de réquisitoire - sur Flash afin que les clients et les spécialistes puissent mieux comprendre pourquoi Flash n’est pas présent sur l’iPhone, l'iPod touch et l’iPad. D’après lui, Adobe a toujours fait croire qu’Apple n’ouvrait pas la porte à Flash pour des raisons commerciales afin de protéger l’App Store. Pour Steve Jobs, c’est tout le contraire : c’est avant tout une décision à caractère(s) techniques(s).
Il démonte ensuite l’argumentation d’Adobe indiquant que Flash est un système ouvert. "Les produits Flash sont 100% propriétaires". Adobe ayant seule autorité sur leur évolution ou leur prix. Le fait que Flash soit largement répandu n'en fait pas un produit ouvert écrit Jobs, au final c'est Adobe qui en garde le complet contrôle.
Apple aussi a son lot de produits propriétaires poursuit Jobs, mais Apple, comme Google, a fait le choix de standards ouverts, lorsqu'ils étaient pertinents pour le web : HTML5, CSS et JavaScript. Et d'ajouter qu'Apple apporte sa contribution en ayant par exemple "créé WebKit à partir d'un petit projet open source". Un WebKit utilisé aujourd'hui par Android, Palm, Nokia et RIM. En faisant un standard pour les navigateurs mobiles.
Second point, la place de Flash sur le Web. Au discours d'Adobe selon lequel Apple prive ses appareils de 75% des vidéos sur le web, Jobs rappelle que la plupart de cette masse est disponible dans "un format plus moderne, le H.264". Les vidéos de YouTube qui représentent 40 % des vidéos sur le web sont lisibles sur les plateformes mobiles d'Apple. Et d'énumérer des services comme Vimeo, Netflix, Facebook, des chaînes de télé américaines… "les utilisateurs d'iPhone, iPod et iPad ne sont pas en manque de vidéos".
Jobs concède que ces appareils ne peuvent utiliser les jeux en Flash, mais il renvoie aux 50 000 jeux et titres de loisir sur l'App Store, dont une partie non négligeable est gratuite. Un volume qu'il estime dépasser de loin celui de n'importe quelle autre plateforme.
Viennent ensuite les questions de sécurité, fiabilité et performances. Il dresse un portrait de Flash responsable de la plupart des plantages sur Mac, avec en outre, selon Symantec, le bilan le plus noir en matière de sécurité en 2009. Apple et "Adobe ont travaillé à résoudre ces problèmes, mais ils perdurent depuis maintenant plusieurs années" déplore Jobs.
Il met ensuite en doute la capacité d'Adobe à faire correctement fonctionner Flash sur des mobiles. "Nous leur avons régulièrement demandé de nous montrer Flash qui marcherait bien sur un mobile. On ne l'a jamais vu" Et d'égrener les retards rencontrés dans la finalisation de cette version de Flash "On pense qu'il finira par sortir, mais nous sommes contents de ne pas avoir eu à attendre. Qui sait comment cela fonctionnera ?"
Quatrième point, l'impact sur la batterie des mobiles. Pour Jobs, l'utilisation du H.264 associée à un décodeur de type matériel permet de bons résultats en autonomie pour la lecture de vidéos. Alors que Flash utilise encore une ancienne solution, non supportée par les puces pour mobiles, qui oblige à un décodage logiciel des vidéos et par là, divise l'autonomie par deux. L'avantage du H.264 étant aussi qu'il ne nécessite aucun plug-in pour être lu directement par un navigateur, et qu'il est parfaitement géré par les appareils mobiles.
Cinquième point, l'interaction tactile. Les interfaces en Flash utilisent des éléments qui se prêtent mal à une utilisation sans souris et de type multitouch. Donc, quitte à devoir réécrire son site, pourquoi ne pas le faire directement en HTML 5, CSS et JavaScript, suggère Jobs.
Enfin, sixième point, "le plus important", le fait qu'Adobe vise à ce que les développeurs utilisent Flash pour créer des applications pour iPhone. Jobs reprend un argument déjà évoqué récemment, le fait que Flash est un outil de développement multiplateforme, qui ne tirera profit que du plus petit dénominateur commun de chacune de ces plateformes (lire Adobe prend un bol d'AIR sur l'iPad). De manière à ce qu'un logiciel puisse être écrit une seule fois et fonctionner à l'identique partout "Il n'est pas dans les objectifs d'Adobe d'aider les développeurs à écrire les meilleures applications iPhone, iPod et iPad."
Jobs critique également le fait qu'Adobe a été terriblement lent à adopter les améliorations survenues sur les plateformes d'Apple. "Alors que Mac OS X est sorti depuis presque dix ans, Adobe l'a pleinement adopté (Cocoa) il y a deux semaines avec la sortie de la CS5. Adobe a été le dernier des grands éditeurs à complètement adopter Mac OS X" (ndlr, Jobs glisse sur le fait qu'Apple aussi a quelques grosses applications toujours en attente de passage sur Cocoa : iTunes, Final Cut Studio, etc…).
L'objectif d'Apple, explique Jobs, est que les développeurs puissent s'appuyer directement sur iPhone OS pour leurs applications, plutôt qu'au travers de solutions tierces qui ne seront pas à même de leur proposer toutes les possibilités de l'original, ou qui le feront avec retard. Créant par là une dépendance délicate vis à vis de ces intermédiaires.
Ce qui amène le patron d'Apple à conclure - en versant les dernières goutes d'essence sur les flammes - que Flash a été conçu "à l'époque du PC et des souris", mais qu'il n'est plus nécessaire pour les plateformes mobiles, malgré l'envie d'Adobe, pour des raisons compréhensibles, de l'y voir jouer un rôle.
"L'avalanche de médias qui offrent leurs contenus pour les appareils mobiles d'Apple montre que Flash n'est plus nécessaire pour regarder des vidéos ou consommer toute sorte de contenus Web. Et les 200 000 applications sur l'App Store prouvent que Flash n'est plus indispensable pour les dizaines de milliers de développeurs qui veulent créer des applications riches graphiquement, jeux compris".
"Les nouveaux standards ouverts créés à l'ère du mobile, comme le HTML5, l'emporteront sur les appareils mobiles (et sur les PC aussi). Peut-être qu'Adobe devrait se concentrer davantage, pour l'avenir, sur la création de très bons outils HTML5, et moins critiquer Apple sur le fait qu'elle entend laisser le passé derrière elle".
Une sortie du patron d'Apple sur ce maintenant vieux débat (on retrouve des traces de cette querelle dès l'automne 2008) qui intervient alors que les répercussions de l'affaire Gizmodo et de l'iPhone 4G font toujours l'actualité, et qu'Adobe venait de commencer à optimiser Flash sur Mac OS X, après avoir obtenu une API longtemps réclamée à Apple…
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