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Pourquoi Apple se lance dans la pub mobile

Arnaud de la Grandière

vendredi 15 janvier 2010 à 15:07 • 27

AAPL

Avec les rachats successifs d'AdMob et de Quattro Wireless par Google et Apple, le monde des nouvelles technologies prend conscience des enjeux derrière la publicité en ligne.

Il se dit qu'Apple était également sur les rangs pour faire l'acquisition d'AdMob, c'est pourtant Google qui a raflé la mise, pour un montant de 750 millions de dollars. Quattro Wireless fait figure de second choix, obtenu pour un montant estimé à 275 millions de dollars. Alors qu'il était logique que Google mette un pied dans ce marché (la publicité en ligne est après tout sa première source de revenus), Apple n'est pas connue pour faire des acquisitions à la légère, elle est assez peu coutumière du fait, quoi qu'elle ait racheté 3 sociétés durant ces cinq derniers mois.

On pourrait croire qu'il ne s'agit là que d'un prêté pour un rendu, Google ayant multiplié ces derniers temps les fronts de concurrence avec Apple, pourtant il n'en est rien puisque cette acquisition fait plutôt les affaires de Google, dont l'acquisition d'AdMob pourrait être remise en question par la Federal Trade Commission. Google s'est d'ailleurs félicité publiquement du rachat de Quattro Wireless par Apple (voir notre article Le rachat de Quattro Wireless par Apple fait les affaires de Google).

La firme de Cupertino a réussi un tour de force beaucoup plus significatif encore qu'il n'y paraît avec l'App Store et les achats in-app : en différenciant ces contenus du reste d'Internet, Apple a résolu l'épineux problème de la sacro-sainte gratuité des contenus sur le net, qui cause tant de soucis, notamment à la presse. Alors que nombre de sites internet réfléchissent à résoudre cette quadrature du cercle, l'App Store a démontré qu'il pouvait y avoir une économie viable, et que les utilisateurs sont prêts à débourser pour obtenir certains contenus et services. Les achats in-app ont même ouvert la porte aux abonnements. Reste à voir si ces derniers sont économiquement viables pour les acteurs, mais le fait est qu'Apple a réussi à passer outre la barrière psychologique et que les moyens techniques sont là, ce qui explique également la multiplication des initiatives conjointes de la presse et des constructeurs de tablette ces derniers temps.

Quel enjeu se cache donc derrière la publicité pour mobiles? Pour Apple, c'est une question stratégique. Avec l'iPhone et l'App Store, Apple suit une logique de plateforme, qu'elle développe et tient à garder sous son contrôle. La publicité intégrée aux applications pour iPhone est d'autant plus cruciale qu'elle fait partie intégrante de l'économie des applications gratuites : en somme, si Apple touche 30 % du fruit des ventes des applications payantes, elle ne touche en revanche aucun pourcentage des revenus générés par les publicités dans les applications gratuites, tout au plus bénéficie-t-elle de ses effets, puisque nombre de publicités aboutissent vers un achat sur l'App Store. Et la position d'intermédiaire en matière de publicité est très confortable, puisque ceux-ci s'arrogent de 30 à 50 % des revenus. L'année dernière, la publicité mobile a perçu 2 milliards de dollars, contre 60 pour le web.

D'autre part, toujours dans cette logique de plateforme, la publicité a permis à des acteurs de tierce partie de faire des bénéfices grâce au dur labeur d'Apple sans lui reverser un centime, à l'inverse des éditeurs de logiciels. La société de Steve Jobs se devait de reprendre la main, et bien que Quattro Wireless soit de moindre importance qu'AdMob, Apple a toutes les cartes en main pour en faire la régie publicitaire de premier plan sur sa plateforme, quitte à jouer des coudes pour y parvenir : comme Apple maîtrise tous les rouages de l'iPhone, de sa fabrication à son OS en passant par l'App Store, elle peut tout à fait favoriser Quattro Wireless et la rendre plus séduisante pour les annonceurs comme pour les développeurs, en mettant à profit toute la technologie dont elle bénéficie. Et il semble bien qu'elle soit déterminée à le faire.

Des sources proches de Steve Jobs auraient confié à Business Week que le patron d'Apple avait admis que les publicités mobiles étaient nulles. Minuscules, statiques, on est loin de ce qu'Apple a pu faire pour promouvoir en ligne ses propres produits, en détournant la mise en page de certains sites. Pourtant, en tirant parti des capacités de l'iPhone, il y aurait de quoi faire (voir par exemple Une pub mobile créative). Et la réflexion d'Apple sur ces questions a été initiée il y a semble-t-il quelques temps, puisqu'elle a déposé un brevet dans ce sens en 2008 (voir notre article Apple : un système financé par la pub ?).

La publicité sur mobiles ne représente pour le moment qu'un petit marché, mais il est indubitable que celui-ci est appelé à grandir, avec la plateforme elle-même. Il s'agit d'un cercle vertueux : à mesure que les smartphones seront de plus en plus répandus, ils représenteront un vivier potentiel plus important pour la publicité; inversement, la plateforme qui offre le plus de moyens de gagner de l'argent pour les acteurs tiers sera la plus attractive. Sans compter que ce qu'Apple sait de ses utilisateurs va bien au-delà de leurs seules requêtes dans un moteur de recherche : numéro de téléphone, de carte bleue, goûts musicaux, applications installées, etc. voilà de quoi offrir aux annonceurs un public de rêve pour de la publicité ciblée. Il reste cependant à Apple à se faire une culture publicitaire, ce domaine lui étant jusqu'ici totalement étranger. Espérons qu'elle saura faire preuve de tempérance, car c'est bien connu : trop de pub tue la pub.
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