Mauvais temps chez Facebook. Après une série d'enquêtes dévastatrice du Wall Street Journal publiée courant septembre, une erreur technique a rendu inaccessible Facebook, WhatsApp et Instagram pendant près de six heures ce début de semaine, puis le fonctionnement interne du réseau social a été jeté sous une lumière crue au Sénat américain.
La panne aidant, il n'en a pas fallu moins pour que Telegram récupère 70 millions de nouveaux abonnés, un record selon le CEO du groupe. De son côté, la messagerie Signal a expliqué sur Twitter que des « millions » de personnes avaient rejoint la plateforme. Comme quoi, le malheur des uns…
Alors même que Facebook et ses satellites se retrouvaient temporairement dans le noir, une ancienne employée était auditionnée par le Sénat américain. Frances Haugen a travaillé pendant deux ans au sein de l'entreprise dans une équipe chargée de lutter contre les fake news, avant de démissionner au mois de mai, lassée par les coupes budgétaires et le démantèlement de son groupe à l'issue des dernières élections américaines.
Dans ses cartons elle a emporté des milliers de documents confidentiels prouvant que le groupe fait de son profit une priorité et qu'il est conscient de son impact négatif sur la société. Ce sont ces documents qui ont alimenté les récents articles du Wall Street Journal.
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Il y est entre autres révélé que l'entreprise est parfaitement au courant de l’influence négative d'Instagram sur la santé mentale des plus jeunes, que certains comptes de célébrités disposent d'une modération allégée et que ses plateformes sont utilisées pour des actions atroces dans certains pays (cartel, trafic d'humains) sans que Facebook n'y fasse grand chose.
Lors de son audition, la lanceuse d'alerte a également affirmé que Facebook avait volontairement supprimé des filtres contre les fausses informations. Les faits se seraient passés après la campagne électorale américaine de 2020, et auraient eu pour but de maximiser ses revenus :
Dès que l'élection a été terminée, ils ont désactivé [les algorithmes] ou ont modifié les paramètres pour revenir à ce qu'ils étaient auparavant, afin de privilégier la croissance par rapport à la sécurité [...] Facebook a compris que s'il modifie l'algorithme pour être plus sûr, les gens passeront moins de temps sur le site, ils cliqueront sur moins de publicités, ils gagneront moins d'argent.
Mark Zuckerberg a répondu par écrit à ces accusations, en défendant l'idée que son entreprise n'avait aucun intérêt à privilégier le profit au détriment de la sécurité. Selon Bloomberg, ces récentes déconvenues auraient couté 6 milliards de dollars au créateur du groupe après la chute de l'action en bourse.
Le patron de Facebook devra sans doute bientôt répondre devant le Congrès : les dérives de Facebook sont un des rares sujets mettant d'accord démocrates et républicains. Plusieurs sénateurs ont d'ores et déjà assuré qu'ils comptaient agir prochainement. Dans une interview, Frances Haugen a confirmé avoir porté plainte contre Facebook et transmis les documents compromettants au régulateur américain.