Un échange d'email de 2007 entre Steve Jobs et Ed Colligan, le patron alors de Palm, témoigne de la pression mise par le premier sur le second pour obtenir un accord de non-débauchage entre les deux sociétés et de l'ambiance qui prévalait alors.
Cette correspondance a été révélée dans le cadre d'une demande de recours collectif déposée par cinq ingénieurs qui estiment avoir eu leur carrière et leur mobilité professionnelle freinées par un pacte de non-agression signé entre Apple, Google, Intel, Adobe, Intuit, Lucasfilm et Pixar. Il s'agit d'une plainte civile, indépendante de l'accord à l'amiable signé par ces entreprises en avril dernier avec le Département de la justice.
On savait depuis 2009 que Steve Jobs avait tenté à l'été 2007 d'inclure Palm et son homologue Edward Colligan (PDG de 2005 à 2009) dans cet accord. À l'époque, Apple venait de lancer son iPhone et la guerre faisait rage entre les deux sociétés.
L'ancien lieutenant de Jobs, Jon Rubinstein (parti d'Apple en 2006) avait rejoint Palm pour relancer son activité smartphone, à la grande fureur de son ancien patron. En 2009 Rubinstein succèdera à Colligan qui s'impliquera dans Elevation Partners, le principal investisseur dans l'entreprise.
Steve Jobs avait fait une proposition qu'avait rejetée son interlocuteur, la jugeant illégale. Apple avait alors joué de la menace d'un procès pour violation de propriété intellectuelle.
L'échange de missives entre les deux PDG a finalement été rendu public sur ordre de la juge Lucy Koh. On y découvre la teneur exacte des propos tenus. Cela débute par un email d'Ed Colligan qui faisait suite à une conversation téléphonique avec Jobs.
Prudent, Colligan avait jugé utile de répondre par écrit. On a appris depuis qu'à l'inverse, Eric Schmidt dont la société a fait partie de cet accord, avait donné instruction à son directeur des ressources humaines de traiter cette affaire verbalement, afin de ne pas laisser de trace derrière soi avec les risques que cela pourrait impliquer devant la justice.
Ed Colligan a donc répondu par la négative à Steve Jobs après y « avoir mûrement réfléchi » pendant les deux jours qui ont suivi leur discussion. La première objection qu'il formule est que cet accord n'est pas seulement injuste pour leurs employés respectifs, mais surtout illégal. Devant cette perspective Colligan a même renoncé à proposer un accord à minima.
Colligan concède que les meilleurs talents viennent souvent de l'extérieur, mais il affirme que Palm ne vise pas d'autres sociétés, qu'elle cherche seulement les meilleurs hommes. Et d'espérer qu'Apple procède de même. Toutefois, le milieu est de petite taille et il est inévitable que les uns et les autres se retrouvent parfois à débaucher leurs talents respectifs. Le PDG de Palm fait aussi valoir que durant l'année écoulée pendant laquelle les travaux sur l'iPhone sont montés en régime, Apple a débauché environ 2% des employés de Palm.
Pour Colligan le marché de la téléphonie est suffisamment grand pour que les deux protagonistes s'y développent sans utiliser ces tactiques. Il conclut par une mise en garde, car Jobs, durant leur discussion, a visiblement fait planer la menace d'un procès en propriété intellectuelle si son homologue n'accédait pas à sa demande.
Colligan répond qu'il « n'est pas intimidé », sa société disposant d'un portefeuille en brevets solide du fait de son ancienneté dans le secteur du téléphone. Il ajoute que Palm a acquis auprès de BenQ, 1500 brevets qui appartenaient à Siemens, dont la plupart sont enregistrés en Europe.
Il affirme alors être capable de rendre coup pour coup en cas d'action en justice d'Apple. Ce qui se traduira par d'énormes dépenses en frais d'avocats pour les deux entreprises. Puis le PDG, d'affirmer aussi qu'il prend soin de ne pas obtenir de ses recrues venues de Cupertino d'informations confidentielles sur Apple. Et d'espérer qu'Apple, là aussi, agisse de la même manière.
Steve Jobs a répondu par mail deux jours plus tard, mécontent et menaçant :
Palm ne cédera pas et Apple trouvera d'autres entreprises vers qui diriger le feu de ses cabinets d'avocats. Le marché se chargeant lui de Palm et de ses téléphones. Mais Jon Rubinstein trouvera d'autres occasions d'agacer son ancien patron, par exemple lorsqu'il fit en sorte que les Palm Pre fonctionnent avec iTunes en les faisant se passer pour des iPod… (lire iTunes rejette à nouveau le Palm Pre).
Le mois prochain les patrons d'Intel, de Google et d'Apple vont être amenés à témoigner dans cette affaire, la juge Koh n'ayant pas encore décidé si elle accordait aux plaignants le droit d'ouvrir cette class action (lire Pacte de non-agression : Cook, Schmidt et Otellini invités à la barre).
Cette correspondance a été révélée dans le cadre d'une demande de recours collectif déposée par cinq ingénieurs qui estiment avoir eu leur carrière et leur mobilité professionnelle freinées par un pacte de non-agression signé entre Apple, Google, Intel, Adobe, Intuit, Lucasfilm et Pixar. Il s'agit d'une plainte civile, indépendante de l'accord à l'amiable signé par ces entreprises en avril dernier avec le Département de la justice.
On savait depuis 2009 que Steve Jobs avait tenté à l'été 2007 d'inclure Palm et son homologue Edward Colligan (PDG de 2005 à 2009) dans cet accord. À l'époque, Apple venait de lancer son iPhone et la guerre faisait rage entre les deux sociétés.
L'ancien lieutenant de Jobs, Jon Rubinstein (parti d'Apple en 2006) avait rejoint Palm pour relancer son activité smartphone, à la grande fureur de son ancien patron. En 2009 Rubinstein succèdera à Colligan qui s'impliquera dans Elevation Partners, le principal investisseur dans l'entreprise.
Steve Jobs avait fait une proposition qu'avait rejetée son interlocuteur, la jugeant illégale. Apple avait alors joué de la menace d'un procès pour violation de propriété intellectuelle.
L'échange de missives entre les deux PDG a finalement été rendu public sur ordre de la juge Lucy Koh. On y découvre la teneur exacte des propos tenus. Cela débute par un email d'Ed Colligan qui faisait suite à une conversation téléphonique avec Jobs.
Prudent, Colligan avait jugé utile de répondre par écrit. On a appris depuis qu'à l'inverse, Eric Schmidt dont la société a fait partie de cet accord, avait donné instruction à son directeur des ressources humaines de traiter cette affaire verbalement, afin de ne pas laisser de trace derrière soi avec les risques que cela pourrait impliquer devant la justice.
Ed Colligan a donc répondu par la négative à Steve Jobs après y « avoir mûrement réfléchi » pendant les deux jours qui ont suivi leur discussion. La première objection qu'il formule est que cet accord n'est pas seulement injuste pour leurs employés respectifs, mais surtout illégal. Devant cette perspective Colligan a même renoncé à proposer un accord à minima.
Comme vous, l'une de mes plus importantes tâches est de constituer une équipe de haut niveau. Je sais que c'est difficile lorsqu'un employé respecté décide de s'en aller pour se mesurer à de nouveaux challenges, mais comme vous l'avez dit au téléphone 'C'est l'Amérique', nous ne pouvons pas obliger quelqu'un à travailler là où il ne le veut pas, et nous ne devons pas non plus essayer de le faire. Je ne peux pas retirer à une personne qui a choisi de venir chez Palm le droit de le faire au seul prétexte qu'il travaille chez Apple, et je ne le ferai pas pour les employés de Palm. On peut tous les deux essayer de les en dissuader, mais au bout du compte, c'est leur choix et nous devons le respecter.
Colligan concède que les meilleurs talents viennent souvent de l'extérieur, mais il affirme que Palm ne vise pas d'autres sociétés, qu'elle cherche seulement les meilleurs hommes. Et d'espérer qu'Apple procède de même. Toutefois, le milieu est de petite taille et il est inévitable que les uns et les autres se retrouvent parfois à débaucher leurs talents respectifs. Le PDG de Palm fait aussi valoir que durant l'année écoulée pendant laquelle les travaux sur l'iPhone sont montés en régime, Apple a débauché environ 2% des employés de Palm.
Pour mettre les choses en perspective, si Palm avait fait la même chose, nous aurions embauché 300 ingénieurs d'Apple. Au lieu de cela, à ma connaissance nous n'en avons recruté que 3.
Pour Colligan le marché de la téléphonie est suffisamment grand pour que les deux protagonistes s'y développent sans utiliser ces tactiques. Il conclut par une mise en garde, car Jobs, durant leur discussion, a visiblement fait planer la menace d'un procès en propriété intellectuelle si son homologue n'accédait pas à sa demande.
Colligan répond qu'il « n'est pas intimidé », sa société disposant d'un portefeuille en brevets solide du fait de son ancienneté dans le secteur du téléphone. Il ajoute que Palm a acquis auprès de BenQ, 1500 brevets qui appartenaient à Siemens, dont la plupart sont enregistrés en Europe.
Il affirme alors être capable de rendre coup pour coup en cas d'action en justice d'Apple. Ce qui se traduira par d'énormes dépenses en frais d'avocats pour les deux entreprises. Puis le PDG, d'affirmer aussi qu'il prend soin de ne pas obtenir de ses recrues venues de Cupertino d'informations confidentielles sur Apple. Et d'espérer qu'Apple, là aussi, agisse de la même manière.
Steve Jobs a répondu par mail deux jours plus tard, mécontent et menaçant :
Ce n'est pas satisfaisant pour Apple. Ce n'est pas simplement à propos de certains de nos employés qui décident d'aller chez Palm. Ils sont activement débauchés grâce à des informations fournies par Jon Rubinstein et Fred Anderson (ex-directeur financier d'Apple et membre d'Elevation Partners) avec Jon qui participe personnellement à ces recrutements.
Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour faire cesser cela. Je suis certain que vous réalisez l'asymétrie entre les ressources financières de nos deux entreprises lorsque vous dites 'Nous finirons simplement par payer beaucoup d'argent à nos avocats'.
Juste pour information, lorsque Siemens a vendu son activité de terminaux mobiles à BenQ, ils ne leur ont pas vendu leurs brevets les plus importants, mais simplement accordé une licence. Les brevets qu'ils ont vendus à BenQ ne sont pas si formidables que ça. Nous les avons consultés aussi lorsqu'ils étaient en vente. Je suppose que vous avez vu les choses autrement et vous les avez achetés. Ils ne nous inquiètent absolument pas. Mon conseil est que vous jetiez un oeil à notre portefeuille de brevets avant de prendre sur le sujet qui nous occupe une décision définitive.
Palm ne cédera pas et Apple trouvera d'autres entreprises vers qui diriger le feu de ses cabinets d'avocats. Le marché se chargeant lui de Palm et de ses téléphones. Mais Jon Rubinstein trouvera d'autres occasions d'agacer son ancien patron, par exemple lorsqu'il fit en sorte que les Palm Pre fonctionnent avec iTunes en les faisant se passer pour des iPod… (lire iTunes rejette à nouveau le Palm Pre).
Le mois prochain les patrons d'Intel, de Google et d'Apple vont être amenés à témoigner dans cette affaire, la juge Koh n'ayant pas encore décidé si elle accordait aux plaignants le droit d'ouvrir cette class action (lire Pacte de non-agression : Cook, Schmidt et Otellini invités à la barre).