La Commission européenne a détaillé ses griefs à l'encontre de Samsung (elle avait ouvert une enquête en janvier dernier). Son compte rendu explique pourquoi Samsung a soudainement abandonné en début de semaine ses demandes d'injonctions à l'encontre d'Apple en Europe.
Comme on s'y attendait, les doléances de Bruxelles portent sur les actions en justice entamées par Samsung pour de prétendues violations de brevets de la part d'Apple. Le problème étant que ces brevets sont régis par les conditions FRAND.
M. Joaquín Almunia, vice-président de la Commission chargé de la concurrence, a déclaré:
«Les droits de propriété intellectuelle sont une pierre angulaire du marché unique. Toutefois, il convient de ne pas en abuser s'ils sont essentiels pour des normes industrielles, qui apportent des avantages énormes à la fois aux entreprises et aux consommateurs. Lorsque des entreprises contribuent, grâce à leurs brevets, à l’élaboration d’une norme industrielle et s’engagent à concéder des licences pour leurs brevets en échange d’une juste rémunération, le recours à des injonctions à l’encontre de licenciés de bonne volonté peut être assimilé à une pratique anticoncurrentielle.»
La commission estime que Samsung nuit à la concurrence en ayant recours à des injonctions à l'encontre de l’entreprise potentiellement désireuse d'obtenir une licence de ces brevets. Les injonctions, on le sait, peuvent conduire à une interdiction de vente, ce qui est un puissant levier dans le cadre d'une concurrence commerciale.
Les BEN de Samsung [brevets essentiels liés à une norme] concernés ont trait à la norme 3G/UMTS de l’Institut européen des normes de télécommunications (ETSI), une norme industrielle essentielle pour les communications mobiles et sans fil.
Lorsque cette norme a été adoptée en Europe, Samsung s’était engagé à concéder des licences pour les brevets jugés essentiels à la norme à des conditions FRAND. En 2011, Samsung a commencé à saisir les juridictions de plusieurs États membres afin de demander des injonctions à l’encontre d’Apple sur la base de prétendues violations de certains de ses BEN liés à la norme 3G/UMTS.
La commission souligne que le recours à une injonction reste envisageable si le licencié potentiel ne fait pas preuve de bonne volonté. Ce qui n'est pas démontré dans le cas d'Apple.
Samsung étant en possession de ces informations, il pourra maintenant y répondre. Ce n'est qu'à l'issue de ce droit à la défense qu'une décision finale sera prise par Bruxelles, dans un sens qui pourra être aussi bien favorable que défavorable à Samsung.
Dans le pire des scénarios, une amende pourra être décidée « Si elle [la Commission] conclut que l’infraction est suffisamment attestée, elle peut publier une décision interdisant le comportement en cause et infliger une amende pouvant atteindre jusqu'à 10 % du chiffre d’affaires annuel mondial de l’entreprise concernée » rappelle le communiqué.
Dans un communiqué séparé, la Commission a indiqué que la décision de Samsung de retirer ses demandes d'injonction ne changeait rien à ses conclusions préliminaires sur le caractère anti-concurrentiel de l'attitude du groupe sud-coréen.
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