Le New York Times revient à son tour sur l’échec du projet Titan au sein d’Apple et donne quelques détails supplémentaires qui expliquent sa trajectoire, composée d’un faux départ et de plusieurs erreurs sur l’itinéraire si l’on en croit son titre. Il commence d’ailleurs par cette anecdote qui en dit long : si l’on en croit Brian X. Chen et Tripp Mickle qui signent l’article, plusieurs employés au sein du projet l’auraient renommé projet Titanic, tant sa trajectoire semblait inévitable.
Dès le départ, il y aurait eu un désaccord en interne sur la direction du projet selon les deux journalistes. Lancé en 2014, le projet Titan était en partie une réponse à la demande d’employés qui cherchaient un nouveau gros projet après l’Apple Watch et en partie un moyen de retenir plusieurs employés qui voulaient travailler dans le monde automobile et envisageaient de partir chez Tesla. Apple aurait d’ailleurs discuté à quelques reprises avec le constructeur en vue d’une acquisition afin d’accélérer les choses, avant de décider de mener son propre projet.
Que construire néanmoins : une voiture électrique similaire à la Model S commercialisée par Tesla depuis deux ans ou bien une voiture entièrement autonome, une voie que la Google Car présentée en 2014 concrétisait pour la première fois ? Ce débat entre deux camps aurait gêné le projet Titan dès sa naissance. Steve Zadesky, le premier à la tête de l’initiative, souhaitait concurrencer frontalement la nouvelle Model S avec une voiture entièrement électrique de luxe. Jony Ive, alors responsable de tout le design chez Apple, souhaitait de son côté une voiture entièrement autonome, qui ne nécessiterait aucun volant ni de pédalier.
Apple aurait dépensé sans compter pour lancer ce nouveau projet. Des centaines d’employés ont été embauchés, dont des spécialistes de l’apprentissage automatisé (machine learning), un domaine essentiel pour la conduite autonome, ainsi que des experts du monde automobile. Le New York Times évoque des ingénieurs qui travaillaient avant cela chez Porsche et même d’autres qui venaient de la NASA. Plusieurs technologies auraient été mises au point au sein du projet, dont un pare-brise capable d’afficher des informations sur l’itinéraire à suivre ou encore un toit vitré mieux équipé pour bloquer la chaleur du soleil.
Le projet commençait bien, avec un dessin imaginé par l’équipe de Jony Ive qui s’inspirait d’après l’article de la Fiat 600 Multipla. Pas la bizarrerie de la fin des années 1990, il s’agit d’une voiture sortie dans les années 1950 et l’un des premiers monospaces avec suffisamment de place à l’intérieur pour six personnes. La version d’Apple aurait été constitué de grandes fenêtres tout autour, d’un toit vitré bombé et il s’agissait d’un véhicule entièrement autonome, sans volant et contrôlé exclusivement avec Siri.
Tripp Mickle rappelle l’anecdote déjà détaillée dans son livre After Steve : à l’automne 2015, une présentation de ce concept aurait été donnée à Tim Cook. Siri n’étant pas capable de répondre aux demandes spécifiques d’une voiture autonome, un acteur aurait été engagé pour jouer son rôle, tandis que le CEO et Jony Ive étaient dans la voiture pour simuler un trajet.
Le premier concept d’Apple Car aurait fait appel à un acteur pour interpréter Siri
Dès 2016, le projet Titan aurait toutefois commencé à donner des signes de faiblesse avec le départ de Steve Zadesky, remplacé par Bob Mansfield, un vétéran chez Apple qui aurait choisi de changer l’orientation du projet en abandonnant l’idée de sortir une voiture au profit d’un travail sur le logiciel destiné aux voitures autonomes. Par la suite, Kevin Lynch aurait repris le projet courant 2021 et il serait revenu à l’idée originale, avec une voiture entièrement électrique concurrente des modèles de Tesla et tous les autres constructeurs désormais sur le marché.
Ces multiples hésitations et surtout la crainte de ne pas parvenir à sortir une voiture rentable alors que son ticket d’entrée était estimé autour des 100 000 $ auraient finalement mis un terme au projet Titan. Les dirigeants d’Apple auraient décidé en début d’année de fermer l’initiative et de consacrer son énergie à d’autres domaines, l’intelligence artificielle en tête.
En dix ans, Apple aurait dépensé plus de 10 milliards de dollars pour essayer de sortir une voiture. Une somme colossale en soi, même si elle est finalement assez insignifiante pour la Pomme et ses immenses réserves. Et puis ce n’est pas une somme qui a été dépensée pour rien, une bonne partie du projet pouvant être réutilisée dans d’autres domaines. En particulier tout ce qui concerne la conduite autonome est basé sur les mêmes techniques qui pourront servir aux intelligences artificielles génératives que l’on devrait découvrir cette année.