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Tesla déçoit avec un Cybertruck nettement plus cher et moins bon que promis

Nicolas Furno

vendredi 01 décembre 2023 à 10:00 • 264

Mobilités

Quatre ans après sa présentation initiale, Tesla a enfin lancé officiellement le Cybertruck, son pick-up au design rétro-futuriste. En quatre ans, le marché du pick-up électrique a eu le temps d’émerger et les clients américains ont plusieurs options désormais, en plus de celle de l’entreprise texane. C’est pourquoi on attendait l’officialisation pour savoir ce que l’engin peut offrir pour se démarquer et si le style reste unique en son genre, le camion déçoit avec des prix nettement plus élevés et même des prestations inférieures par rapport à ce qui avait été promis.

Le Cybertruck est capable de rouler sur n’importe quelle planète, vante Tesla
La forme générale n’a pas changé depuis la présentation initiale, on reste sur quelque chose de très original.

En 2019, Elon Musk annonçait une gamme à partir de 39 990 $ pour le modèle de base propulsé par un seul moteur et une autonomie autour de 400 km. Les clients devront finalement débourser 60 990 $ (environ 56 000 €) et si l’autonomie affichée est similaire à celle promise, la déception de ce côté vient du fait que ce Cybertruck n’est pas encore commercialisé. Il faudra attendre au mieux 2025 pour que Tesla produise ce modèle entrée de gamme et se contenter pour l’heure de deux variantes plus chères.

Le prix de base actuel pour le Cybertruck grimpe ainsi juste sous la barre des 80 000 $ (environ 73 000 €) pour une version deux moteurs et quatre roues motrices qui doit offrir 550 km d’autonomie théorique. C’est 30 000 $ de plus que promis en 2019 et Tesla annonçait alors une option haut de gamme à 70 000 $ avec notamment une autonomie record de 800 km. Rien de tel avec le modèle « Cyberbeast » affiché à 99 900 $ (91 500 € environ) qui repose sur trois moteurs pour offrir des performances dignes d’une supercar, mais dont l’autonomie théorique dépasse à peine les 500 km.

Le Cybertruck peut refermer son espace arrière, le transformant de fait en immense coffre (Tesla annonce plus de 3 m³ en tout).
De quoi stocker beaucoup de sacs et tentes pour camper, par exemple. Outre l’espace à l’arrière, il y a un gros coffre avant, ou frunk, dans lequel on peut stocker des affaires ou s’assoir à l’arrêt.

À défaut, Tesla a imaginé un étonnant mécanisme, avec une batterie additionnelle que l’on peut charger dans la partie arrière du camion. Le constructeur n’a pas donné tous les détails, si ce n’est qu’on devrait atteindre en théorie les 750 km d’autonomie sur la version quatre roues motrices avec ce module. Puisque l’on n’a aucun chiffre, on estime qu’il devrait s’agir d’un pack batterie additionnel d’au moins 30 à 40 kWh, ce qui ajoutera plusieurs centaines de kilo à la balance et probablement un tarif élevé (on parle de 16 000 $ en plus). Il faudra faire preuve de patience pour les détails supplémentaires, il n’y en a pas eu.

Le Cybertruck apporte malgré tout quelques nouveautés intéressantes chez Tesla, à défaut d’être des innovations dans l’industrie. C’est son premier véhicule à être équipé de roues directrices à l’arrière, ce qui lui offre un rayon de braquage meilleur qu’une Model S. Ce n’est pas dur, tant les voitures du constructeur étaient médiocres dans ce domaine. Cela reste une prouesse, tant le Cybertruck est un monstre de 5,7 mètres de long (1,8 m de haut dont 44 cm de garde au sol et 2,4 m de large) et qui pèse autour de 3 tonnes avec une capacité de tractage (ultra rapide) juste sous la barre des 5 000 kg. C’est aussi le premier modèle du constructeur qui est équipé d’une direction électrique « steer by wire », sans colonne reliée mécaniquement aux roues.

Le module batterie additionnel que l’on pourra ajouter au Cybertruck pour augmenter son autonomie. C’est la seule image diffusée par Tesla, on ne sait pas comment se fait son installation et si un passage au garage est nécessaire.
La direction électronique du Cybertruck contrôle les roues à l’avant et à l’arrière, réduisant le rayon de braquage de l’engin.

Ce camion signe enfin l’arrivée de la charge inversée chez Tesla, nommée pour l’occasion « Powershare ». Le Cybertruck est équipé de pas moins de cinq prises de courant, quatre au standard américain de 120 V (deux dans la cabine, deux à l’arrière) et une de 240 V à l’arrière qui pourra fournir jusqu’à 40A. De quoi alimenter des éclairages pendant des jours en camping, ou alors des outils pendant quelques heures sur un chantier, ou même charger une autre voiture électrique. Autant de fonctions que les autres pick-ups électriques proposaient tous et qui étaient attendus.

Tesla est allé plus loin en proposant même le V2H, c’est-à-dire la possibilité d’alimenter un logement à partir de la batterie intégrée au Cybertruck. Cela se fait par le biais du connecteur maison qui sert également à la charge et il faudra du matériel chez soi, à savoir le Wall Connector et le contrôleur maison qui est intégré à toutes les batteries Powerwall que l’on peut installer aux États-Unis. C’est d’ailleurs l’argument de l’entreprise : tous ceux qui sont équipés avec une batterie domestique Tesla pourront utiliser le Cybertruck comme batterie de secours en cas de coupure prolongée du courant.

Le Cybertruck est équipé de plusieurs prises électriques, de quoi alimenter des outils…
… ou même charger une autre voiture électrique, comme ici une Model Y.

L’entreprise communique sur trois jours d’autonomie, à raison de 30 kWh consommés par jour, ce qui au passage donne une bonne idée de capacité de la batterie intégrée au Cybertruck1. Pour l’heure, le camion est le seul véhicule Tesla compatible avec Powershare. On peut imaginer que d’autres modèles le rejoindront à terme et le fait que la fonctionnalité ait un nom officiel va dans ce sens. L’app mobile a été elle adaptée, avec la prise en compte de l’énergie puisée dans le pick-up. Bref, cela ressemble fort à une fonction qui deviendra un standard chez Tesla, du moins on peut l’espérer. À propos de charge, c’est aussi le premier modèle du constructeur à passer sur une batterie 800V, même si la puissance maximale annoncée reste à 250 kW, comme les autres Tesla. Il faudra attendre les premiers tests pour savoir si les charges sont toutefois plus rapides.

À l’intérieur, le design angulaire est resté la norme et le minimalisme habituel de l’entreprise domine. Plus aucun levier derrière le volant, c’est la norme désormais, et tout se fait par le biais d’un grand écran central de 18,5 pouces. Un ruban de LED a été ajouté et il y a un deuxième écran à l’arrière de 9,4 pouces pour les passagers, qui devraient être à l’aise vu l’espace disponible. Comme toujours, le toit est une immense vitre et on retrouve tout le confort habituel des voitures de la marque, dont un filtre HEPA pour le système de climatisation. Il y a aussi un chargeur à induction pour deux smartphones dans la console centrale et une collection de haut-parleurs dans tout l’habitacle.

Le tableau de bord du Cybertruck ressemble fort à celui de la nouvelle Model 3, avec plus d’angles. Par rapport au prototype de 2019, la réalité est passée par là et on a un (immense) essuie-glace ainsi que des rétroviseurs traditionnels sur le pare-brise et sur les portières. Le rétroviseur central ne sert à rien si le coffre est fermé et Tesla y a pensé en affichant une vidéo de la caméra arrière… mais sur l’écran central.
Une immense vitre fait office de toit dans l’habitacle. Les sièges sont spécifiques au Cybertruck, avec un design anguleux là aussi.

Pendant sa présentation, Elon Musk a de nouveau insisté sur la solidité de son engin, qui est censé résister à une attaque par balles (il vise le marché américain, après tout). La démonstration répétée de la résistance des vitres s’est faite sans balle de pétanque cette fois, c’est une bien plus douce balle de baseball qui a été utilisée. La vitre n’a pas de nouveau explosé comme lors de la présentation initiale, encore heureux. Comme prévu, le Cybertruck sera vendu sans peinture, même si Tesla proposera des options pour le recouvrir avec un film protecteur éventuellement coloré.

La présentation officielle qui s’est déroulée péniblement dans la nuit s’est terminée avec la livraison des premiers exemplaires. Tesla n’en avait qu’une dizaine à proposer, uniquement à des employés pour le moment puisque les commandes publiques commencent seulement maintenant. Le constructeur se contente de promettre sur son site des livraisons en 2024, sans plus de précision. Le configurateur n’est même pas encore ouvert, même s’il est possible de laisser 250 $ pour réserver un exemplaire. Pourra-t-il produire suffisamment d’exemplaires pour livrer ses clients rapidement ?

On le saura dans les prochains mois. On saura aussi si l’engouement important pour le Cybertruck se maintiendra, maintenant que les spécifications et les tarifs sont officiels. Le F-150 Lightning de Ford commence juste sous la barre des 50 000 $ et propose une autonomie similaire au futur Cybertruck entrée de gamme, mais avec quatre roues motrices. Moins cher, plus performant et disponible dès aujourd’hui, il sera une rude compétition pour le camion de Tesla, qui reprend l’avantage sur les fonctions plus complètes et surtout de série.


  1. Tesla a apparemment communiqué officiellement sur le sujet, ce qui n’est pas dans ses habitudes. Les deux modèles haut de gamme auraient ainsi une batterie de base de 123 kWh de capacité.  ↩︎

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