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Tesla annonce une excellente année 2021 et de multiples retards

Nicolas Furno

jeudi 27 janvier 2022 à 09:12 • 57

Mobilités

Tesla présentait hier soir ses résultats financiers pour le dernier trimestre 2021, de quoi faire le point sur l’année passée et surtout préparer l’année 2022. Elon Musk avait promis de passer une tête dans la traditionnelle session de questions et réponses après la publication des résultats, de quoi donner quelques nouvelles sur le futur du constructeur spécialisé dans l’électrique.

Contrôle qualité à la sortie de la nouvelle usine Tesla en Allemagne (image Tesla).

Résultats financiers aussi bons qu’attendus

Tesla avait en grande partie divulgâché ses propres résultats financiers en annonçant en avance les chiffres des véhicules produits et vendus sur l’année qui vient de s’écouler :

Tesla a frôlé le million de véhicules livrés en 2021

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Sans surprise donc, les résultats sont excellents, avec plus de 300 000 véhicules produits et vendus sur le dernier trimestre et 2,3 milliards de dollars de bénéfices. Après 2020, c’est la deuxième année de l’histoire de Tesla qui se termine dans le vert et cette fois largement, avec 5,5 milliards de bénéfices cumulés à la fin de l’année, contre 270 millions de dollars l’an dernier. Plus important encore, ces bénéfices proviennent de moins en moins de la revente de crédits carbones aux autres constructeurs et de plus en plus de ses propres voitures.

En 2020, Tesla avait récolté 1,58 milliards de dollars en vendant des crédits carbone et encore 1,46 en 2021. La baisse semble bien légère, mais dans le détail, elle s’accentue au fil des trimestres et surtout, le constructeur n’en a plus besoin pour réaliser des bénéfices, comme ce fut le cas ne serait-ce qu’au premier trimestre de l’année passée. Le constructeur vend toujours plus de voitures et surtout il parvient à le faire avec des marges élevées pour l’industrie automobile.

Sur toute l’année 2021, Tesla frôle les 30 % de marges sur la vente de ses véhicules, un niveau bien plus élevé que celui de ses concurrents directs. On est plus proche des marges réalisées par un constructeur de voitures de luxe ou de sport que d’un généraliste. La clé de cette marge élevée est bien connue : le constructeur a simplifié sa gamme à l’extrême pour maximiser la production, en optimisant ses usines pour cela.

La chaîne de production de la Model Y dans la Gigafactory de Berlin, qui ne produit que des versions Performance en couleur noir pour le moment (image Tesla).

Ce n’est pas pour rien que l’usine historique du constructeur, à Fremont en Californie, est désormais la plus productive aux États-Unis. Et si l’usine chinoise de Shanghai est capable de produire 14 000 véhicules par semaine avec encore une marge de croissance.

L’usine californienne de Tesla serait désormais la plus productive aux États-Unis

L’usine californienne de Tesla serait désormais la plus productive aux États-Unis

Mais l’essentiel de la croissance attendue pour 2022 viendra désormais des deux nouvelles usines, celle en Allemagne et celle au Texas. Les nouvelles sont toutefois plus contrastées dans ce domaine, car les retards s’accumulent.

Des retards sur la production et le logiciel

En effet, l’usine située près de Berlin devait ouvrir ses portes à la fin de l’année 2021, mais elle attend toujours ses dernières autorisations. Tesla continue d’y produire des petites séries de Model Y et l’entreprise espère pouvoir livrer les premiers clients au mois de mars. L’autre mauvaise nouvelle, c’est que ces voitures n’utiliseront pas les nouvelles batteries 4680 et le nouveau pack de batterie structurelle comme promis, elles resteront aux batteries 2170 et à un pack traditionnel, comme les Model Y produites en Californie et en Chine.

Installation simplifiée des sièges sur la batterie, l’un des avantages pour Tesla de la batterie structurelle, mais cette photo vient du Texas et non de l’usine allemande (image Tesla).

Ces batteries 4680 ont été présentées en 2020 par Tesla et elles devraient trouver place dans des véhicules conçus par l’entreprise cette année, mais uniquement dans les Model Y produites au Texas. Elles sont plus denses que les anciennes batteries et surtout moins chères à produire, ce qui devrait permettre au constructeur de baisser ses prix ou d’améliorer ses marges. L’autre avantage lié à ce changement est le passage à une batterie structurelle, avec le pack qui fait office de structure pour toute la voiture.

Ces innovations améliorent les voitures et simplifient la production et on les attendait dans les deux dernières usines du groupe. La Gigafactory de Berlin devra toutefois se contenter de l’ancienne méthode de fabrication, la faute probablement à une capacité de production trop limitée des batteries 4680. Pour l’heure, seule Tesla produit ces éléments dans une petite usine de Californie. La chaîne de production allemande n’est pas prête, ni celle prévue au Texas. La situation devrait toutefois s’améliorer en 2023, puisque Panasonic a prévu de produire des 4680 pour le compte de Tesla à partir de cette date.

En parlant de retard, Elon Musk a donné des nouvelles de la conduite autonome. Et dans la plus grande tradition, il annonce qu’elle devrait être finalisée à la fin de l’année 2022… ou en tout cas que le FSD devrait être « meilleur qu’un humain » d’ici là1. Comme le patron de Tesla répète depuis 2016 que c’est un problème en gros réglé et qui arrivera à la fin de chaque année suivante, on restera très prudent. Toutefois, l’entreprise souligne dans ses résultats financiers qu’elle compte de plus en plus sur les revenus des services liés aux voitures, un sujet qu’Apple maîtrise bien, elle aussi.

Toutes les Tesla savent gérer leur vitesse et rester dans une voie automatiquement, mais il faut payer pour activer la conduite entièrement autonome, où la voiture suit un itinéraire et peut même conduire en ville aux États-Unis (image MacGeneration).

À propos, Tesla indique dans ses résultats que 60 000 conducteurs américains ont accès à la bêta du FSD, le logiciel qui doit amener à la conduite autonome. Une belle performance qui permet à l’entreprise d’avoir un immense parc de testeurs, bien plus grand que ses concurrents, même si la bêta est encore loin d’être finalisée. Depuis l’été, le FSD est aussi disponible en abonnement mensuel et son prix d’achat à encore été augmenté récemment, passant à 12 000 $. De quoi inciter les utilisateurs à s’abonner et ainsi fournir des revenus réguliers à Tesla.

Tesla a suggéré que son offre d’assurance, lancée dans cinq États américains seulement, pourrait arriver en Europe en 2022. Pour rappel, cette offre se distingue par un tarif variable en fonction de votre conduite, tout étant mesuré automatiquement par la voiture.

Tesla a lancé son assurance facturée en fonction des habitudes de conduite

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Pour en revenir à la capacité de production, Tesla envisage d’ouvrir de nouvelles usines sans attendre. On peut espérer des annonces de lieux d’ici à la fin de l’année, si tout va bien. Les deux nouvelles usines en finalisation devraient progressivement augmenter leur capacité de production dans les prochains mois, mais il y a aussi de la réserve pour augmenter la croissance des deux usines actuelles et notamment en Chine.

Aucune nouveauté matérielle avant 2023, au mieux

Face à ces retards et face à la pénurie des composants qui ne semble pas près de disparaître, Elon Musk a prévenu : il ne faut s’attendre à aucune nouveauté matérielle cette année. Tous les véhicules en retard et attendus sont repoussés à 2023 au plus tôt : le Cybertruck annoncé en novembre 2019 comme le Roadster et le Semi présentés en novembre… 2017 (!) devront patienter au minimum un an de plus. Le Semi est un camion qui devait sortir en 2019 et qui ne cesse d’être repoussé, même si cette photo publiée avec les résultats financiers rappelle qu’il existe bel et bien.

Une rangée de Tesla Semi, photo prise à la Gigafactory du Nevada où le semi-remorque sera produit. Tesla continue ses tests et l’utilise en interne, mais on ne sait toujours pas quand il sera produit et vendu (image Tesla).

Interrogé sur ces retards, Elon Musk a suggéré que le problème du Cybertruck était d’ordre financier. Produire ce véhicule coûte encore trop cher pour le vendre au prix annoncé — moins de 40 000 $ en entrée de gamme —, parce qu’il contient trop de nouvelles technologies. Il faut dire qu’il a un design rétro-futuriste hors norme, avec de l’acier brut à l’extérieur qui nécessite d’utiliser un outillage également hors norme. En attendant sa sortie, on a aussi croisé récemment un nouveau prototype, plus proche de celui destiné à la production.

Ses lignes restent toujours aussi à part de tout ce que l’on connaît aujourd’hui, mais il y a quelques ajustements obligatoires, à l’image de ces (hideux) rétroviseurs et de cet immense essuie-glace à l’avant. Autre différence notable par rapport aux premiers concepts, il n’y a plus de poignée du tout sur les portes : elles doivent s’ouvrir toutes seules dès que l’on s’approche du véhicule2. Voilà qui ne devrait pas alléger les coûts de production…

Photo du dernier prototype connu du Cybertruck (image Cybertruck Owners Club).

Même si Elon Musk — qui a conduit le prototype et le trouve génial — a noté que la batterie n’était pas un facteur limitant pour le Cybertruck, il faut souligner que le retard des batteries 4680 doit aussi jouer. On sait que Tesla compte sur ce nouveau format pour baisser ses coûts de production et intégrer les immenses packs que ce pick-up nécessitera pour offrir une autonomie correcte. La production de masse de cette batterie est sans doute le pré-requis pour le lancement de la production du pick-up et Tesla préfère concentrer ses efforts sur le Model 3 et le Model Y.

La demande pour ces deux modèles est de toute manière bien suffisante pour occuper Tesla sur toute l’année à venir. La preuve, la Model Y de base ne sera pas livrée avant le mois de décembre aux États-Unis ! Un délai anormalement élevé pour le constructeur, alors même qu’une nouvelle usine va ouvrir ses portes pour produire cette voiture à destination du marché américain : c’est bien le rappel que le principal frein en ce moment n’est pas sur la capacité de production, mais sur les composants disponibles pour produire.

Cette concentration passe aussi par l’arrêt pour le moment des travaux sur la voiture à 25 000 $ promise par Tesla à l’été 2020. Ce véhicule conçu et produit en Chine devait être plus petit et mieux répondre aux besoins des marchés chinois et européens. Le constructeur envisageait de le sortir à partir de 2023, mais la réponse d’Elon Musk à son sujet suggère que la sortie sera décalée de plusieurs années. Ce n’est pas un abandon officiel, mais le signe qu’il ne faut rien attendre tant que tous les retards sur les annonces déjà effectuées ne sont pas résolus.

Concept de la Tesla à 25 000 $ qui n’est plus développée pour le moment (source).

Cela n’empêche le patron de Tesla de rêver un peu. Ainsi, son projet de robot est toujours en cours et Elon Musk a même soutenu qu’il pourrait devenir plus important encore que les voitures. Ces robots devraient servir en priorité pour remplacer des humains dans les usines du groupe, mais les ambitions de Tesla sont immenses dans ce domaine.

Elon Musk présente Tesla Bot, un robot aussi intelligent que les voitures de Tesla

Elon Musk présente Tesla Bot, un robot aussi intelligent que les voitures de Tesla


  1. Une formulation intéressante, puisqu’elle reste suffisamment floue et ne désigne pas nécessairement une conduite entièrement autonome de niveau 5.  ↩︎

  2. Tesla aime bien trouver des solutions compliquées pour ses portes de voiture, c’est le cas sur tous ses modèles comme je l’avais noté dans la série sur la Model 3. Pour le moment, c’est la Model X qui a la palme des portes les plus complexes, notamment parce qu’elles peuvent s’ouvrir automatiquement à l’approche du conducteur et des passagers.  ↩︎

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