Si Intel est le plus grand fournisseur de composants graphiques pour PC au monde, la société n'est pas pour autant un géant dans le domaine : dans la majorité des cas, il s'agit d'IGP (carte graphique intégrée) que le client n'a pas choisi. Dans le monde des cartes graphiques dédiées, AMD et Nvidia sont très largement devant Intel, un marché qu'Intel pourrait (encore) abandonner. Selon The Verge, Pat Gelsinger a indiqué que les capacités des GPU intégrés étaient de plus en plus importantes, ce qui réduit progressivement le besoin de cartes dédiées… et sous-entend qu'Intel n'en a plus besoin.
Car Intel et les cartes graphiques, c'est compliqué. Dans les années 90, quand les concepteurs de puces étaient nombreux (3dfx, Matrox, ATi, etc.), Intel avait tenté l'aventure avec les cartes i740. Elles n'avaient pas trouvé le succès, mais la puce avait finalement été intégrée dans les chipsets, ce qui a permis à Intel, au fil du temps, de devenir le leader dans ce domaine. Pas grâce aux performances — ceux qui ont eu un MacBook avec l'inénarrable GMA950 comprendront — ni même grâce à l'aura d'Intel, mais simplement parce que les fabricants ont compris qu'une carte graphique « gratuite » pouvait suffire pour une partie des consommateurs, quelles que soient les performances.
À la fin des années 2000, Intel a ensuite tenté de proposer une carte graphique basée sur des cœurs x86, Larrabee. Le projet était assez avancé, mais il a été abandonné suite à des retards et (encore) à un problème de performances. Nvidia, qui était déjà devenu le principal fournisseur de cartes graphiques, proposait des puces largement plus rapides. Le projet a été recyclé dans le monde professionnel pour créer les Xeon Phi… qui n'ont pas eu un gros succès.
Le troisième essai d'Intel est plus récent et plus pragmatique : l'architecture Xe a permis la création des cartes Iris Xe et Arc, sorties fin 2021 et en 2022. Le côté pragmatique est simple : Intel a proposé une version dédiée de ce qui était (et est) intégré dans les processeurs depuis quelques années. Mais le résultat n'a pas été à la hauteur des attentes : les cartes Arc de la série 700 offraient certes un bon rapport performances/prix, mais pas de bonnes performances dans l'absolu. Intel a à peine réussi à concurrencer le milieu de gamme de Nvidia (les RTX 3060) avec ses versions les plus puissantes.
Un abandon probable
Le sous-entendu du patron d'Intel est évident, et les cartes basées sur l'architecture Xe2 (Battlemage) se font attendre, alors que les rumeurs sur un abandon des cartes dédiées courent depuis l'arrivée de la première génération. Ce serait par ailleurs logique : Intel va mal et compte se recentrer sur son cœur de métier, qui n'est pas de vendre des cartes graphiques. Par ailleurs, l'abandon d'une version dédiée des cartes basées sur Xe2 n'implique pas l'abandon de l'architecture elle-même : elle est déjà employée dans quelques processeurs Intel, comme les Lunar Lake sortis cet automne. Mais pour la majorité des processeurs (dont les récents Core Ultra 200S), c'est l'architecture Xe qui est de mise. Et ce choix montre par ailleurs le défaut du raisonnement de Pat Gelsinger : les cartes graphiques intégrées Intel sont « remplacées1 » par des cartes graphiques dédiées pour ceux qui ont besoin de performances… mais elles ne sont pas remplacées par des cartes graphiques dédiées Intel.
Intel, de tempêtes en naufrage
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Les cartes graphiques intégrées Intel restent généralement actives, surtout dans les PC portables, pour améliorer l'autonomie. Intel est le plus grand fournisseur de composants graphiques pour PC au monde en partie à cause de ce point. ↩︎