Après de longues années d'attente, les PC équipés d'un processeur ARM deviennent enfin compétitifs, et c'est une bonne nouvelle. Et les PC Copilot+ (le nom choisi par Microsoft) équipés d'une puce Snapdragon X tiennent globalement leurs promesses selon les premiers tests.
Commençons par un petit rappel utile : après un essai raté en 2012 avec Windows RT, Microsoft a porté une version complète de Windows 10 pour les puces ARM dès 2017. Mais à l'époque, la sauce n'avait pas pris pour plusieurs raisons. Les deux principales étaient liées aux performances : les systèmes sur puce Qualcomm de l'époque étaient de simples composants de smartphones (comme le Snapdragon 835) inadaptés à un usage dans un PC et les applications natives étaient très rares. Dans la pratique, si l'autonomie des PC en question était bonne, les performances pratiques étaient médiocres dans le meilleur des cas, avec une émulation x86 poussive et quasi généralisée.
Deux problèmes réglés
En 2024, les deux problèmes sont à peu près réglés, sauf dans un cas précis, nous allons le voir. Pour le processeur, Qualcomm — qui a un contrat d'exclusivité officieux avec Microsoft, qui devrait se terminer dans les prochains mois — propose enfin une puce convaincante. Les Snapdragon X reposent sur un CPU issu des travaux de Nuvia, une société rachetée il y a quelques années et fondée par des personnes qui avaient travaillé sur la puce Apple M1. Au lieu de partir d'une puce de smartphone plus ou moins bricolée, Qualcomm a conçu un système sur puce bien adapté aux PC et ça se voit : les performances sont enfin équivalentes à ce que proposent Intel ou AMD.
Pour les applications, le constat est bien meilleur pour deux raisons. La première, c'est que les applications natives sont moins rares, même si la compilation pour le jeu d'instructions d'ARM n'est pas généralisée. Les principaux navigateurs (Chrome compris) sont disponibles, tout comme tous les outils de Microsoft et quelques applications majeures (par exemple certaines applications Adobe). En parallèle, l'émulation x86 est plus performante qu'en 2017 — le code x86-64 est pris en compte — et la puissance des Snapdragon X rend cette dernière acceptable.
Qualcomm dévoile un peu plus ses Snapdragon X, avec plusieurs variantes Elite et Plus
Quelques défauts tout de même, notamment dans les jeux
Les premiers essais montrent d'abord une chose : les performances sont globalement bonnes. Si Apple garde la tête sur les performances sur un seul cœur (les puces M3 et M4 sont plus rapides dans ce cas), Qualcomm prend la tête sur plusieurs cœurs. Ce point est purement pragmatique : la société américaine a intégré douze cœurs dans ses Snapdragon X Elite, alors qu'Apple n'en a que huit (M3), dix (M4) ou douze (M3 Pro), avec dans chaque cas un mélange entre cœurs performants et cœurs basse consommation. D'un point de vue purement financier, les PC à base de Snapdragon X sont dans la même gamme de prix qu'un MacBook Air, mais offrent des performances du même ordre qu'un MacBook Pro avec une puce M3 Pro.
Sur la consommation, les premiers retours (comme chez Notebookcheck) montrent une efficacité énergétique qui place les puces de Qualcomm entre celles d'Intel et AMD et celles d'Apple. Certains modèles sont configurés avec un TDP de 45 W — une valeur logique compte tenu du nombre de cœurs — qui rend un refroidissement passif impossible. L'efficacité de la puce reste tout de même excellente dans des domaines comme la vidéo : nos confrères ont mesuré une consommation d'un peu moins de 6 W pour lire une vidéo en 4K sur YouTube, quand leurs PC de tests dépassent 16 W pour la même tâche, ce qui amène un gain en autonomie évident. Sur un MacBook Air M3, ils ont mesuré 3,5 W.
Pour la partie graphique, Qualcomm reste en retrait d'Apple mais offre des performances dignes de celles des GPU intégrés dans les CPU d'AMD ou Intel, encore une fois. C'est malgré tout un des points faibles de Qualcomm, pour deux raisons. La première, c'est que la comparaison est biaisée : les GPU intégrés ne sont pas considérés comme performants et la moindre carte graphique dédiée reste bien plus rapide. L'Adreno X1 est un bon GPU intégré, mais pas un bon GPU dans l'absolu (et cette assertion est valable pour les GPU d'Apple). La seconde, c'est que les jeux modernes ne sont pas compilés pour les puces ARM, et qu'en dehors de quelques cas optimisés par Qualcomm et mis en avant, les performances restent faibles.
Si Qualcomm a tenté de faire croire que ses puces pouvaient être un bon choix pour les joueurs, ce n'est pas le cas : même sur des jeux un peu anciens, il est difficile de réellement dépasser 30 images/s en 1080p en baissant les détails, et ce n'est pas acceptable en 2024 pour un joueur. Qui plus est, l'émulation amène des effets secondaires indésirables comme l'impossibilité de lancer certains titres car les logiciels anti-triches n'apprécient pas cette solution.
Des PC bien notés dans l'ensemble
Les quelques tests disponibles sur l'Asus VivoBook S15, comme chez Les Numériques ou Windows Central, sont donc élogieux, pour de bonnes raisons. Qualcomm et Microsoft arrivent enfin à proposer des ordinateurs portables compétitifs dans le segment des ultraportables. L'Asus en question offre des performances comparables aux PC du même type avec des CPU x86, tout en amenant une autonomie plus élevée, sans atteindre ce qu'Apple arrive à faire. Compte tenu du passif des PC ARM, il s'agit donc d'une réussite, une fois la parenthèse sur les jeux fermée.
Enfin, il faut revenir sur un point : l'apocalypse annoncée par Semi Accurate il y a quelques semaines. Sur la partie CPU, les promesses de Qualcomm semblent en effet s'être concrétisées et les performances réelles sont du même ordre que ce qui est vanté depuis quelques mois. Ce n'est pas du tout le cas dans les jeux, encore une fois, mais il ne s'agit pas réellement d'une surprise : personne ne croyait sérieusement qu'un GPU intégré couplé à de l'émulation systématique allait faire des merveilles. Malgré tout, nos confrères n'en démordent pas, avec quelques arguments qui semblent tout de même valables, comme une émulation x86 peu performante ou des problèmes de sécurité. Mais après les premiers tests, il faut bien avouer une chose : les allégations de Semi Accurate ne se retrouvent pas dans les produits finis. Il est possible que Qualcomm et Microsoft aient réussi à optimiser les puces depuis, mais les faits sont là : les résultats sont bons.
Un renouveau pour les PC ARM
Pour autant, est-ce réellement la fin du x86 dans le monde des PC ? Probablement pas. Si la solution de Qualcomm est solide et règle les principaux soucis qui grevaient l'intérêt des PC Windows équipés d'une puce ARM, tout n'est pas parfait, nous l'avons vu. Les performances dans les jeux restent faibles et les différents outils IA mis en avant par Microsoft ressemblent à des gadgets… quand ils n'ont pas été repoussés. Mais l'arrivée d'un nouvel entrant dans ce marché n'est pas à négliger pour autant.
Microsoft repousse la sortie de Recall sur les PC Copilot+ 🆕