Depuis quelques années maintenant, Qualcomm vend du rêve aux utilisateurs de Windows : le Snapdragon X Elite va enfin permettre le décollage des PC à base d'ARM, après un lancement raté en 2012 (qui se souvient de Windows RT ?) et un Windows 10 (et maintenant 11) plombé par des systèmes sur puce anémiques depuis 2017.
Le Snapdragon X Elite est issu des travaux de Nuvia, une start-up fondée par des anciens d'Apple, et la nouvelle puce doit offrir des performances du même ordre que l'Apple M3. Mais nous devrions maintenant dire « les » nouvelles puces : il y a quatre déclinaisons. Ne vous attendez pas à des choses comme Pro, Max ou Ultra, Qualcomm a choisi la même approche qu'Intel et AMD : des noms peu compréhensibles pour ses puces.
Ce n'est même pas de la moquerie par rapport à une gamme Apple très simplifiée sur les noms : qui va arriver à deviner si un Snapdragon X1E-80-100 est mieux (ou pas) qu'un Snapdragon X1P-64-100 ? Pour faire « simple », voici les explications : Snapdragon X est le nom de la gamme, le 1 indique qu'il s'agit de la première génération, la lettre qui suit indique qu'il s'agit d'un Elite (E) ou un Plus (P), moins rapide. La valeur numérique qui suit donne le positionnement dans la gamme : un modèle 80 est donc mieux qu'un 64. Enfin, le -100 est réservé selon Qualcomm, donc ne sert à rien actuellement.
Quatre variantes
Reprenons la gamme. Les trois premiers sont des Snapdragon X Elite, dotés de douze cœurs. Le modèle 84 a une fréquence de 3,8 GHz (4,2 GHz au mieux, sur deux cœurs), le 80 une fréquence de 3,4 GHz (4 GHz au mieux) et le modèle 78 a une fréquence de 3,4 GHz, sans Turbo. Les trois variantes ont le même NPU (qui atteint 45 TOPS), utilisent la même mémoire (de la LPDDR5X-8448) mais diffèrent sur le GPU. Le premier atteint 4,6 téraflops (du même ordre qu'une puce M3), les deux autres se limitent à 3,8 téraflops (une valeur plus proche d'une puce M2). Le seul Snapdragon X Plus de la vague de lancement se contente de dix cœurs à 3,4 GHz, avec le même GPU (3,8 téraflops), le même NPU et la même mémoire.
Qualcomm met évidemment en avant ce qu'Apple ne propose pas : l'encodage en AV1, la possibilité de prendre en charge trois écrans 4K (ou deux écrans 5K) ou la présence de la 5G et du Wi-Fi 7.
Le problème de Windows et de la consommation
Qualcomm va tout de même encore faire face à deux problèmes : Windows et la consommation. Pour cette dernière, Qualcomm ne donne pas de valeurs pour le TDP, mais la présence de dix ou douze cœurs performants sans variantes basse consommation sous-entend que la marque est plus proche d'une puce M3 Pro que d'une puce M3. Et les précédents retours montraient des PC pensés pour un TDP de l'ordre de 20 à 30 W, quand les Mac à base de puce M3 sont sous les 15 W pour permettre un refroidissement passif. Qualcomm tend d'ailleurs à comparer ses puces à celles d'Intel ou AMD, ce qui est logique dans un sens : ils sont en compétition avec eux, et pas directement avec les puces Apple M3 ou M3 Pro.
Le cas de Windows est plus compliqué : si l'arrivée de Chrome en natif est une bonne nouvelle, les applications compatibles ARM restent rares dans l'absolu. Pour ceux qui se contentent d'un navigateur et des logiciels de bureautique les plus classiques (en gros, Microsoft Office), un PC sous Windows 11 ARM devrait suffire : les Snapdragon X ont assez de punch pour (enfin) proposer des PC fluides et performants. Mais pour tous les autres, le problème de l'émulation x86 va rester un problème : même avec des puces rapides, les pertes restent élevées. Qualcomm a beau mettre en avant la possibilité de jouer à Baldur's Gate 3, c'est tout de même un peu vain : il semble fluide en 1080p à 30 images/s, pas de quoi pavoiser, sauf si la PlayStation 4 de 2013 est votre référence. Sur ce point, Apple garde une certaine avance : en plus d'avoir un émulateur efficace (Rosetta 2), les développeurs ont suivi parce qu'Apple a avancé à marche forcée. Mais dans le monde PC, le x86 est la norme et devrait le rester pour longtemps.
Enfin, une question se pose toujours : comment les PC à base de Snapdragon X se placeront-ils d'un point de vue financier ? Il est difficile d'y répondre, mais Qualcomm semble viser un segment proche de celui des MacBook Air, donc entre 1 000 et 1 500 € à la grosse louche. Un prix qui a un avantage : les PC devraient être bien équipés et bien construits, en plus d'être réactifs. Reste à voir si cette vague de PC attendue cet été sera suffisante pour que les puces ARM grappillent quelques parts de marché dans le domaine des PC.