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Pourquoi le MacBook ne gère pas correctement la 4K ?

Anthony Nelzin-Santos

Thursday 02 June 2016 à 12:00 • 60

Matériel

Alors que l’on voit apparaître ordinateurs et adaptateurs capables d’exploiter deux écrans 4K sur un port, le MacBook n’est même pas capable d’en gérer un à ses pleines capacités. À cause de son USB 3.1 Gen 1 ? De sa petite puce graphique intégrée ? Éléments de réponse.

Le port USB-C du MacBook. Image MacGeneration.
Le port USB-C du MacBook. Image MacGeneration.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, nous vous recommandons la lecture de deux articles :

Comment fait-on passer de la vidéo dans l’USB-C ?

Le « connecteur USB de type C » a été conçu comme un connecteur universel, capable non seulement de fournir une alimentation électrique et de faire transiter des données, mais aussi de s’ouvrir à de nouvelles normes. Cette dernière fonction est offerte par le biais de « modes alternatifs », qui changent à la volée les fonctions des broches du connecteur.

Une représentation schématique et simplifiée des broches du connecteur USB-C. Quatre « lignes » peuvent être utilisées soit pour transférer des données avec la norme USB 3.1, soit pour prendre en charge des « modes alternatifs ». Chacune de ces lignes correspond à une paire de broches sur le connecteur, par exemple la broche A2 (transmission) et la broche B11 (réception). La ligne SBU (broches A8 et B8) est aussi utilisée pour faire transiter les fonctions « auxiliaires » du DisplayPort. Image MacGeneration.Cliquer pour agrandir

Le mode alternatif le plus employé, et celui qui nous intéresse aujourd’hui, est sans doute le mode DisplayPort. Selon les besoins, il peut exploiter une, deux, ou les quatre lignes ouvertes aux modes alternatifs. Il peut aussi utiliser la ligne SBU pour faire transiter un flux audio, des informations de verrouillage HDCP, ou encore la topographie MST. Enfin, il prend en charge DP 1.2 et DP 1.3, mais pas (encore) le DP 1.4 qui vient à peine d’être finalisé.

En DP 1.2, la bande passante de chaque ligne plafonne à 5,4 Gbps ; en DP 1.3, elle atteint jusqu’à 8,1 Gpbs. En utilisant les quatre lignes et en soustrayant l’overhead, et à condition que la longueur des câbles ne dépasse pas les deux mètres, on obtient donc une bande passante utile de 17,28 Gbps en DP 1.2, et de 25,92 Gbps en DP 1.3. Or pour afficher 60 images par seconde sur un écran 4K UHD, il ne faut « que » 12,74 Gbps.

Comment ça, 25,92 Gbps ? Le port USB-C est limité à 10 Gbps !

Non : vous confondez le connecteur USB-C et la norme USB 3.1. La norme USB 3.1 spécifie bien un débit maximal de 10 Gbps, réduit à 5 Gbps dans la « Gen 1 » utilisée par le MacBook et le Chromebook Pixel. Mais bien qu’ils aient été présentés ensemble, connecteur et norme ne sont pas liés : un connecteur USB-A peut gérer la norme USB 3.1, et la norme Thunderbolt 3 a adopté le connecteur USB-C.

Dans ce dernier cas, un connecteur USB-C peut débiter à 40 Gbps, ce qui montre bien que le problème n’est pas physique. Et même sans parler du Thunderbolt, vous mobilisez près de 6 Gbps lorsque vous branchez un écran 4K UHD au MacBook par l’intermédiaire de l’adaptateur HDMI d’Apple, alors même que l’affichage est limité à 30 Hz. Il faut « oublier » les débits de l’USB 3.1 lorsque l’on parle des modes alternatifs ou du connecteur USB-C.

Mais tout de même, il ne faut pas du DP 1.3 pour la 4K ?

Non plus : on utilise des écrans 4K UHD — et à 60 Hz — avec des ports DP 1.2 depuis plus de deux ans. Mais il est vrai que le DP 1.3 facilite grandement la prise en charge des très hautes résolutions. C’est que le mode DisplayPort ne peut exploiter les quatre lignes dédiées aux modes alternatifs qu’à certaines conditions.

Dans la plupart des cas, il doit se contenter de deux lignes. La bande passante est alors réduite à 8,64 Gbps en DP 1.2 : c’est largement assez pour deux écrans 1080p, encore suffisant pour un écran 4K UHD à 30 Hz, mais pas pour un écran 4K UHD à 60 Hz. Le DP 1.3 permettrait quant à lui de débiter près de 13 Gbps, donc de gérer un écran 4K UHD à 60 Hz.

Les possibilités offertes par les différentes normes DisplayPort. Image VESA. Cliquer pour agrandir

Dans le cas idéal où le mode DisplayPort peut utiliser les quatre lignes, le DP 1.3 permettrait même de relier deux écrans 4K à 60 Hz, ou un gros écran 4K DCI à 60 Hz. On peut aussi imaginer gérer la HDR qui a fait son apparition sur les Blu-ray, ou augmenter la profondeur des couleurs comme Apple semble vouloir le faire.

En poussant un peu, il est même possible de brancher un écran 8K, quoiqu’il faudra attendre que le DP 1.4 se répande pour se passer de compression. En attendant, on pourra toujours se rabattre sur ce monstre d’écran qu’est le Dell UP2715K, qui affiche 5 120 x 2 880 px. Mais aucun Mac n’est compatible DP 1.3 : pas même le Mac Pro ne peut gérer cet écran 5K avec un seul câble.

Donc le MacBook devrait gérer la 4K à 60 Hz ?

Ce n’est pas son port USB-C qui l’en empêche. Ni sa petite puce graphique : Intel dit très clairement qu’elle peut gérer un écran 4K UHD à 60 Hz en plus d’un écran interne. Quoi, alors ? Des considérations thermiques : le MacBook ne possède pas de ventilateur, et sans refroidissement actif, la plateforme Core M bride la 4K à 30 Hz. La 4K à 60 Hz n’était pas un objectif du cahier des charges d’Apple lors de la conception du MacBook.

C’est une note au pied d’un tableau perdu au milieu du premier de deux volumes d’une spécification technique qui révèle le pot aux roses. Image MacGeneration.

Au passage, elle s’épargne des explications alambiquées sur le fonctionnement des modes alternatifs. Si le mode DisplayPort utilise quatre lignes, et il faut qu’il le fasse pour gérer un écran 4K UHD à 60 Hz en DP 1.2, il n’en reste plus aucune pour l’USB SuperSpeed. On imagine mal Apple expliquer que le MacBook possède un port USB 3.1… qui passe en USB 2.0 lorsqu’un écran est branché.

Le Thunderbolt 3 y changera quelque chose ?

Oui et non. Tels que le MacBook et les processeurs Core M ont été conçus, le problème thermique demeure le premier obstacle. Si les concurrents sont passés au Thunderbolt 3 et gèrent parfaitement la 4K, c’est qu’ils n’ont pas abandonné le refroidissement actif : le HP Spectre 13 bénéficie d’un système de refroidissement à différentiel de pression conçu par Intel, l’Asus ZenBook 3 intègre « le plus petit ventilateur du monde ».

La radicalité de l’approche fanless d’Apple est paradoxalement conservatrice : le MacBook utilise des composants conçus pour dégager le moins de chaleur possible. Sur ce plan, la firme de Cupertino voulait sans doute éviter de répéter l’erreur qu’elle avait commise avec le premier MacBook Air, qui s’éteignait d’urgence à la moindre utilisation de Flash et pouvait alors servir à cuire un œuf.

Mais on peut tout à fait imaginer que des avancées techniques, comme l’utilisation d’alliages métalliques amorphes pour décupler l’efficacité d’un système de refroidissement passif, permettent à Intel de lever ses restrictions sur la plateforme Core M. En passant au Thunderbolt 3 dans le même temps, le MacBook pourrait alors gérer deux écrans 4K UHD à 60 Hz avec un seul port, le TB 3 possédant huit lignes DP 1.2.

La norme Thunderbolt 3 abandonne le port mini-DisplayPort au profit du port USB-C. Le Thunderbolt 3 encapsule l'USB 3.1 et le DisplayPort 1.2.Cliquer pour agrandir

Reste que le MacBook aurait déjà pu passer au TB 3 : cela n’aurait rien changé sur le plan des écrans externes, mais on y aurait au moins gagné la possibilité de chaîner plusieurs appareils sur le seul port, ou de lui adjoindre une véritable station d’accueil. On en revient au cahier des charges de la machine : la minuscule carte-mère du MacBook n’a pas été prévue pour accueillir le contrôleur Alpine Ridge.

Cela ne veut pas dire qu’Apple devra complètement revoir le MacBook pour lui ajouter le Thunderbolt 3. Intel se dit ouverte à l’idée d’intégrer la prise en charge du Thunderbolt 3 directement au processeur si un fabricant lui en fait la demande. Or on voit bien Apple frapper à la porte du fondeur pour ce genre de choses, elle qui a planché sur la première version du Thunderbolt.

Mieux : l’intégration directe au processeur résout certains problèmes de latence et de stabilité. De la même manière qu’elle avait tardé à adopter l’USB 3, Apple pourrait attendre que les choses se décantent avant de passer au TB 3, sauf peut-être sur les machines « professionnelles ». Elle ne prendrait que quelques mois de retard, mais s’éviterait — et éviterait à ses clients — quelques petits problèmes de performances et de gestion logicielle.

Et en attendant, il n’y a vraiment aucune solution ?

Bon, d’accord, si vous insistez… À vrai dire, il est possible d’utiliser un écran 4K UHD à 60 Hz avec un MacBook en bidouillant. Non, vous n’aurez pas besoin de le plonger dans un bain d’eau glacée pour améliorer son refroidissement. Mais vous devrez désactiver SIP pour permettre l’installation d’un « patch » débridant DP 1.2.

Mais ce patch ne garantit rien. À notre connaissance, aucun adaptateur USB-C/DP ne permet d’utiliser pleinement un écran 4K UHD avec un MacBook, même si Tripp Lite et Kanex assurent que les leurs en sont capables. Il faut donc se rabattre sur l’un des rares écrans 4K UHD à connexion USB-C, comme le Lenovo ThinkVision X1… qui n’est pas tout à fait disponible en Europe.

Le Lenovo ThinkVision X1 préfigure sans doute le futur des écrans, transformés en station d'accueil à l'aide d'un simple câble « universel » comme un câble TB 3.Cliquer pour agrandir

Il vous faudra alors trouver un câble de bonne qualité qui respecte parfaitement les spécifications DP et USB-C, c’est-à-dire commander tous ceux que vous trouverez sur Amazon et les essayer les uns après les autres. Bref, vous l’aurez compris, nous ne vous recommandons pas d’essayer. Le MacBook ne prend pas en charge les écrans 4K UHD à 60 Hz, point à la ligne.

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