Il est évident que le Mac Pro n’est pas un ordinateur de gamer : ses deux cartes AMD FirePro ont d’abord et avant tout été conçues pour le calcul massivement parallèle. Ce qui ne veut pas dire que l’on ne peut pas jouer confortablement avec le Mac Pro, ni que ces cartes transfigurent l’utilisation des applications professionnelles. Explications avec notre modèle de test, doté de deux cartes AMD FirePro D700.
D300, D500, D700 : des cartes semblables, mais différentes
AMD n’a pas créé les cartes graphiques du Mac Pro ex nihilo : les D300, D500 et D700 tiennent des W7000, W8000 et W9000 sorties à l’été 2012. Format spécifique, sous-cadencage, dotation mémoire parfois différente, les différences entre les FirePro du Mac Pro et les FirePro du commerce sont toutefois nombreuses. La plus sensible est sans doute l’absence de la correction d’erreur ECC, qui les rapproche des cartes « grand public » d’AMD — certains utilitaires les identifient d’ailleurs comme des cartes Radeon HD 7xxx plutôt que des FirePro Wxxx.
La nomenclature de ces cartes laisse à penser qu’elles font partie d’une même famille et qu’elles ne diffèrent que par leur puissance… mais les choses sont un peu plus subtiles. Ainsi, alors que les D500 et D700 sont basées sur l’architecture Tahiti, la D300 est basée sur l’architecture Pitcairn. La différence sera négligeable voire inexistante dans certains domaines, notamment dans la « tessellation » si utile dans les jeux vidéos et le rendu 3D. Reste que de manière générale, les D500 et D700 sont plus adaptées aux applications GPGPU.
Des cartes qui (ne) font (pas tout le temps) la paire
Tous les Mac Pro sont dotés de deux cartes du même type, chacune d’entre elles disposant de sa propre interface PCIe 3.0 16x. On pourrait s’attendre à ce qu’elles fonctionnent de concert dès lors que leur puissance de calcul est requise… mais là encore, les choses sont un peu plus complexes.
AMD et Nvidia travaillent depuis des années à des cartes qui seraient aussi à l’aise dans l’affichage que dans le calcul, mais aucune ne l’est encore. En attendant une solution élégante à ce problème, Apple en a trouvé une radicale : une carte est entièrement dévolue aux opérations de calcul parallèle, l’autre s’occupe exclusivement d’affichage vidéo.
Par défaut donc, applications et jeux n’utilisent qu’une seule carte graphique. Une application peut bien entendu profiter de la puissance combinée des deux cartes, à condition d’avoir été spécifiquement adaptée pour cela. Final Cut Pro X est le parfait exemple d’une telle adaptation, exemple suivi par BlackMagic avec DaVinci Resolve, The Foundry avec Mari, et bientôt Adobe avec Photoshop et Premiere. Des applications résolument professionnelles, ces deux cartes étant pour le moment absolument inutiles au commun des mortels.
Les choses sont différentes sous Windows, où les tâches sont réparties entre les cartes graphiques par la technologie Crossfire. Qui dit cartes FirePro dit normalement Crossfire Pro, mais celles du Mac Pro sont plutôt dotées du CrossfireX, comme de vulgaires cartes « grand public ». N’allez cependant pas croire que les performances sont doublées en passant sous Windows : le comportement des cartes y est bien différent, mais pas forcément meilleur.
Des cartes qui ne renâclent pas à la tâche
AMD est en effet très claire :
La technologie CrossfireX ne fonctionne qu’avec les applications Direct3D ou OpenGL en plein écran […] Les applications […] en mode fenêtré ne seront accélérées que par une seule carte.
Pour résumer grossièrement, CrossfireX est d’abord et avant tout utile aux jeux en plein écran. Dans ce cas précis, la différence de performances entre OS X et Windows est très sensible, même dans un jeu comme Starcraft II — qui n’est ni particulièrement optimisé pour Crossfire, ni particulièrement intensif.
Mais même sans CrossfireX, c’est-à-dire en mode fenêtré, la différence est sensible. Le Mac Pro ne change rien au fait que les jeux ont toujours mieux tourné sur Windows que sur OS X, notamment grâce à des optimisations spécifiques pour certains pilotes et pour DirectX. Et dans le cas présent, les cartes du Mac Pro ne sont franchement pas les cartes les plus adaptées au jeu.
En dehors des jeux, les différences sont minimes entre OS X et Windows. Peut-être grâce à de récentes optimisations, DaVinci Resolve tient même mieux la charge sur OS X que sur Windows. Dans les deux cas, les performances sont de toute manière de haute volée : le Mac Pro est né pour ce genre de tâches très complexes demandant toute la puissance des cartes graphiques.
Reste que les cartes graphiques ne font pas tout. Même dans Final Cut Pro X, pourtant optimisé pour le GPGPU, le processeur reste important pour la lecture et l’exportation. Les cartes graphiques ne sont importantes que si vous ajoutez beaucoup d’effets : plus le projet est complexe, plus elles s’activent et plus la différence de fluidité et de rapidité entre un Mac Pro et un iMac « gonflé » est sensible.
Ces deux cartes ne transfigurent pas le Mac Pro, d’autant que peu d’applications sont capables de les utiliser. Mais elles lui ajoutent juste ce qu’il faut de puissance pour que des tâches autrefois pénibles deviennent soudainement fluides, et contribuent à le détacher plus nettement de l’iMac qui pouvait parfois rivaliser avec lui. En somme, elles ne lui ouvrent pas de nouvelles portes — elles lui permettent de les passer plus facilement.