Stage Manager est un pari. Apple a bien conscience que le nouveau gestionnaire de fenêtres d’iPadOS 16 et de macOS Ventura ne sera pas adopté par tous les utilisateurs de ces plateformes. Car malgré le rapprochement orchestré par le constructeur, ces plateformes demeurent bien différentes.
Craig Federighi reconnaît auprès de TechCrunch que les utilisateurs de Mac depuis 40 ans ne s’y retrouveront pas. Il y en aura d’autres qui s’attendent à ce que la fonction agisse d’une certaine manière mais le résultat sera totalement différent. Par nature, Stage Manager ne sera pas le gestionnaire de fenêtres de prédilection des vétérans du Mac.
« Si 20 % des utilisateurs de Mac finissent par se dire que c’est un super outil pour eux, ce sera fantastique »
« Sur Mac, il y a tellement de façons de travailler », explique Craig Federighi. « Certaines personnes utilisent Spaces, d’autres Mission Control, d’autres encore Command Tab. Certaines aiment créer le chaos, d’autres nettoient leur bazar et d’autres encore se servent de la minimisation. Il n’y a pas de mauvaise réponse ici ».
Et sur iPad ? « L’iPad est une proposition unique, un ensemble unique d’attentes autour des interactions et nous voulions construire quelque chose à partir de ça, et pas uniquement un système qui repose sur [des principes vieux] de plusieurs décennies ou un autre système bâti à partir de principes fondateurs différents ».
Cette idée de permettre à une fenêtre de prendre toute la place à l’écran a des racines profondes chez Apple. Dès de la conception de Mac OS X en fait : Steve Jobs a même fait la démonstration du Single Window Mode avant qu’Apple abandonne l’idée.
Le vice-président à l’ingénierie logicielle raconte qu’au sein d’Apple, deux équipes différentes travaillaient depuis un moment sur ce nouveau concept, une du côté iPad, l’autre versant Mac. Sans se concerter, elles sont arrivés à un résultat similaire : les deux perspectives sont représentées dans cette approche, assure Federighi.
L’éléphant dans le magasin de porcelaines, c’est le minimum technique pour en profiter. Sur iPad, il faut une puce M1, ce qui représente une toute petite partie du parc de tablettes installées, et un sacré budget pour ceux qui veulent s'équiper. Craig Federighi enfile son casque de pompier pour éteindre l’incendie polémique qui a enflammé les utilisateurs d’iPad équipés de puces Ax, y compris des modèles très récents et très capables, comme les iPad Pro 2020 par exemple.
« Je pense que c’est difficile parfois pour les gens d’apprécier les contraintes techniques nécessaires pour [le développement de ces fonctions] », décrit Federighi alors qu’il explique à quel point il est important que les apps soient extrêmement réactives dès qu’on touche l’écran.
Stage Manager tire profit du GPU plus puissant de la M1, des entrées/sorties plus rapides pour le Virtual Memory Swap qui convertit le stockage en mémoire vive, du stockage plus véloce des derniers iPad, et de la RAM supplémentaire sur ces tablettes (à partir de 8 Go sur un iPad M1, contre 6 Go sur l’iPad Pro 2020).
Apple s’est fixée un niveau d’exigence très élevé pour la réactivité de l’interface. Ça nécessite que les applications résident dans la RAM — ce qui n’est pas un problème sur Mac où Stage Manager est disponible sur tous les modèles y compris les moins bien dotés. macOS fait en effet appel à cette technologie de swap depuis des années.
« Seuls les iPad M1 combinent les capacités de RAM avec ce stockage haute performance, qui permettent au Memory Swap d’être très rapide », déclare le vice-président, reprenant au passage une déclaration d’Apple de ce week-end.
Apple explique (encore) pourquoi Stage Manager est réservé aux iPad M1
Par ailleurs, Stage Manager a aussi été pensé pour permettre à l’iPad d’offrir une meilleure utilisation des écrans externes. Il est vrai qu’il y avait tout à faire ou presque dans ce domaine… « Les entrées/sorties de la M1 prennent en charge une connectivité impossible pour les iPad précédents. [Les tablettes] peuvent supporter des écrans 4K, 5K, 6K, à des résolutions différentes. On ne peut pas faire ça sur d’autres iPad ».
Craig Federighi « adorerait » proposer Stage Manager à tous les utilisateurs d’iPad. Mais « nous ne voulions pas contraindre notre design pour quelque chose [de moins bien], nous plaçons la barre pour l’avenir ».
En ce qui concerne l’expérience actuelle de Stage Manager telle qu’on peut la vivre avec ces premières bêtas, le moins qu’on puisse dire c’est qu’elle pose plus de questions qu’elle n’apporte de réponses – aussi bien en termes techniques qu'au niveau du concept même. Federighi rassure, en disant qu’Apple va continuer de travailler sur cette fonction tout l’été et que des améliorations vont être apportées.
Aperçu de Stage Manager sur macOS Ventura : une nouvelle façon d'organiser ses fenêtres
Avec Stage Manager, Apple essaie toujours de ne pas recopier macOS sur l’iPad
Toutefois, les réactions et les retours sur Stage Manager jusqu’à présent n’ont pas étonné Apple, « nous n’avons rien vu qui nous a fait dire ‘whoa, ça c’est inattendu’ (…) Donc on va continuer ».