Le développement d'Asahi Linux, qui sert de base à quelques distributions GNU/Linux pour une partie des Mac Apple Silicon, n'est pas un long fleuve tranquille. Si Apple ne met pas directement des bâtons dans les roues des développeurs et ne bloque pas l'installation d'un système d'exploitation concurrent, la société ne fournit pas non plus de documentation pour son matériel.

Dans le rapport de suivi d'Asahi Linux, un cas met bien ce problème en avant : la prise en charge du microphone des Mac. Apple, au lieu d'utiliser une solution classique qui passe par exemple par un contrôleur HD Audio ou USB Audio (en interne), a développé son propre mécanisme. Les microphones (il y en a plusieurs) sont dans certains cas dépendants de l'enclave sécurisée, qui contrôle l'accès. Il a donc fallu d'abord écrire un pilote qui communique avec l'enclave pour activer manuellement les microphones sous GNU/Linux.
Ensuite, Apple utilise plusieurs microphones (trois) avec une transmission de type PDM (Pulse Density Modulation) alors que beaucoup de modules numériques communiquent en I²S (un autre protocole). L'I²S est plus courant et plus simple à mettre en place, mais le fonctionnement en PDM offre de meilleurs résultats. Sans traitements, le résultat fourni par les trois micros est inutilisable : ils sont proches, très directionnels et très sensibles. Il a donc fallu développer une solution logicielle pour proposer l'équivalent de ce qu'Apple emploie sous macOS pour obtenir un résultat exploitable. La page l'explique, c'est beaucoup de mathématiques compliquées et de temps passés. Le résultat s'appelle Triforce et permet d'obtenir un bon résultat sur les Mac portables pris en charge (tous les modèles Air et Pro équipés d'une puce M1 ou M2).

La méthode employée par Apple est ce qu'on appelle du beamforming, une solution aussi employée en Wi-Fi : elle consiste à analyser les signaux directionnels des trois microphones pour éliminer les bruits parasites, en partant du principe que l'utilisateur est en face du clavier. C'est une solution efficace, et le programme développé pour Asahi Linux offre visiblement un résultat convaincant. Les développeurs expliquent que le meilleur moyen de vérifier l'efficacité du filtrage est de jouer de la musique sur un smartphone et de déplacer ce dernier autour d'un Mac : le filtrage est très audible dans ce cas.
Notons enfin que les dernières versions intègrent un outil qui permet de synchroniser les périphériques Bluetooth si vous utilisez plusieurs systèmes d'exploitation sur un Mac. Un accessoire synchronisé une première fois sous macOS peut donc être utilisé directement sous GNU/Linux, car les données sont enregistrées dans la mémoire NVRAM. L'outil asahi-btsync
fonctionne avec les périphériques Bluetooth 2.x et 4.x, mais pas 5.x, car la solution de chiffrement et de synchronisation a évolué. Dans les faits, un clavier ou une souris synchronisés sous macOS devrait donc fonctionner sous GNU/Linux sans relancer l'appairage.