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Test d'Adobe CS6 et du Creative Cloud

Anthony Nelzin-Santos

lundi 23 avril 2012 à 19:30 • 12

Logiciel

Par bien des aspects, la Creative Suite 6 marque un nouveau départ pour Adobe. L'unification plus ou moins aboutie des interfaces des logiciels de la suite, l'évolution de Flash et de InDesign vers des logiciels de production de contenu multisupport ou encore l'intégration d'une plateforme dans le nuage sont autant de nouveautés profondes. De quoi justifier une mise à jour ? La réponse dans notre aperçu de la Creative Suite 6.



Nous n'aborderons dans cet aperçu que les nouveautés des applications de la Creative Suite 6 Design Premium, à l'exception d'Illustrator CS6 dont les principaux changements étaient déjà connus. Nous n'avons pu tester que des versions en anglais : il est possible que certaines appellations francisées ne correspondent pas tout à fait aux choix d'Adobe. Vous pouvez cliquer sur toutes les captures de cet aperçu pour les agrandir.

Photoshop CS6 et le Creative Cloud
Au premier coup d'œil, on pourrait presque croire qu'Adobe a revêtu Photoshop d'une nouvelle interface, mais il n'en est rien : par défaut, elle est simplement plus sombre, à la manière de certaines autres applications de la suite. On peut désormais choisir, dans les préférences du logiciel, entre quatre ambiances, d'un noir très Lightroom à ce gris sombre rappelant Premiere et After Effect en passant par deux tons plus clairs, ceux de la CS5 mais aussi de la plupart des applications de la CS6.



Ce choix de couleurs n'est pas anodin : il révèle dès le premier lancement de Photoshop une volonté d'Adobe de mieux intégrer les applications de la CS6. Le travail reste largement en cours, notamment en ce qui concerne les logiciels issus de l'acquisition de Macromedia, mais est désormais plus visible. De Photoshop, qui en héritant d'un bout de 3D et d'un bout de vidéo a acté de la diversification des tâches du graphiste et est devenu une application « pédagogique », on pourra donc plus facilement passer à Premiere ou After Effects par exemple.



Reste que Photoshop est d'abord et avant tout un logiciel de manipulation et de création d'images, domaines renforcés par les nouveautés de la CS6. Il faut d'abord et avant tout relever la rapidité et la fluidité accrues de Photoshop, qui semble désormais moins pachydermique. Il est par exemple possible d'activer, dans les préférences, une fonction de sauvegarde automatique et en arrière-plan (qui rappelle celle d'OS X Lion mais est indépendante) qui fonctionne correctement même sur de gros fichiers. Le moteur graphique, Adobe Mercury, a aussi considérablement amélioré les performances des filtres les plus évolués.

Des filtres accélérés par le Mercury Engine, Photoshop en a d'ailleurs gagné quelques-uns, dont trois dédiés à l'ajout de flou « photographique » sur des images (qui correspondent à un effet tilt-shift, un flou global, et un effet de profondeur de champ). Leur interface est particulièrement bien conçue : une bague permet de définir la « quantité » de flou à appliquer, et un ensemble de repères permet de définir la zone affectée.



Les options de sélection étaient une des principales nouveautés de la CS5 : la CS6 en ajoute de nouvelles, qui sont de véritables démonstrations techniques de l'« intelligence » du moteur de Photoshop. Après le remplissage d'après le contenu, Adobe a ainsi créé une fonction de déplacement selon le contenu qui permet de déplacer un objet dans une image, ou de l'étendre ; et un outil patch selon le contenu qui permet d'obtenir de meilleurs résultats lors du clonage d'une zone pour supprimer un élément d'une image.

L'image originale.


L'image modifiée avec le déplacement intelligent. Le mur a été remonté : on aperçoit les limites du mécanisme avec la répétition d'un motif, mais on entrevoit aussi les possibilités pour des retouches plus mineures.


Photoshop facilite aussi la création de masques lors de la retouche de portraits : la nouvelle sélection intelligente est capable de détecter les tons chair et ainsi d'appliquer des modifications uniquement sur la peau, ou au contraire de préserver ces tons qui souffrent toujours des traitements trop poussés.



D'autres nouveautés de Photoshop CS6 s'adressent particulièrement aux photographes, comme l'outil de rognage refondu (avec une option de redressement de la perspective), l'outil de correction des déformations optiques dues à l'utilisation d'objectifs grand-angle et fisheye, ou encore Camera Raw 7.

Le « nouveau » Camera Raw.


Photoshop CS6 n'est néanmoins toujours pas capable de gérer nativement les fichiers créés par Photoshop Touch — il faut toujours en passer par un plug-in. L'application iPad ne permet malheureusement d'envoyer les fichiers .psdx par courriel ou de les transférer via iTunes : pour les récupérer, il faut passer par le Creative Cloud. Il existe heureusement une version gratuite de la plateforme dans le nuage d'Adobe, offrant un espace de stockage de 2 Go contre l'enregistrement d'un Adobe ID.

Le projet original dans Photoshop Touch sur iPad.


On récupère les fichiers créés sur iPad par le biais d'une interface web : elle ne permet pas les modifications, mais permet de visualiser les différents calques d'un projet, de récupérer une palette Kuler associée, ou de laisser des commentaires dans le cadre d'un travail collaboratif. On peut évidemment télécharger le fichier au format .psdx, pour ensuite l'ouvrir dans Photoshop CS6. Cette procédure n'est ni rapide ni pratique : on aurait préféré une intégration directe dans la Creative Suite, par exemple par le biais de Bridge (et donc directement dans Photoshop via le mini-Bridge). On procédera de la même manière avec le couple Adobe Ideas / Illustrator CS6 (fichiers .idea).

Le même projet dans le nuage.


Le Creative Cloud n'est pas seulement un espace de stockage collaboratif : c'est aussi un service permettant d'avoir accès à l'intégralité des 17 applications de la Creative Suite et quelques bonus par abonnement. La première formule, annuelle, revient à 59,03 € par mois ou 29,98 € en tarif enseignants et étudiants ; le paiement est mensuel, mais en cas de résiliation avant le terme, il faudra s'acquitter de la moitié du solde). La deuxième formule est mensuelle : on pourra payer 88,55 € pour avoir un accès ponctuel d'un mois au Creative Cloud, sans engagement. Un supplément de quelques euros est à prévoir si vous voulez accéder à d'autres langues que l'anglais.



Ce paiement permet d'accéder à l'intégralité des applications de la Creative Suite Master Collection : Photoshop Extended, Illustrator, InDesign, Acrobat X Pro, Flash Pro, Flash Builder, Dreamweaver, Fireworks, Premiere Pro, After Effects, Audition, SpeedGrade, Prelude, Encore, Bridge et Media Encoder. On télécharge les applications que l'on souhaite installer directement depuis une page web, à la carte, et elles sont intégralement installées en local. Il n'y a ensuite plus besoin d'une connexion internet pour les utiliser, sauf une fois par mois pour mener la vérification de l'abonnement — si l'abonnement est expiré, les applications cessent de fonctionner, mais ne sont pas désinstallées. On paye la même chose que l'on télécharge une application ou dix-sept : l'installation est à la carte, pas l'abonnement.

Le Creative Cloud va plus loin que la Creative Suite : il comprend aussi Edge, l'outil de création d'animations HTML5/CSS3/JavaScript, et Muse, l'outil de conception de sites web « sans programmation ». 20 Go d'espace sont d'ailleurs disponibles pour les fichiers, mais aussi pour l'hébergement de cinq sites créés avec Muse. Cet abonnement offre enfin le droit à l'utilisation de l'intégralité du catalogue de Typekit pour l'inclusion de polices dans vos projets web. On remarquera en outre que les applications disponibles via le Creative Cloud pourront être progressivement mises à jour par Adobe et hériter de nouvelles fonctions, contrairement à leur homologues vendues en boîte, conformément à la loi américaine (la loi SOX empêche d'ajouter des fonctions à un produit qui a été acheté intégralement, mais les applications du Creative Cloud sont de facto proposées en leasing).

Cette montée de la Creative Suite dans le nuage place Adobe en plein dans la mouvance du « logiciel-comme-service » — elle espère au passage séduire quelques-uns des utilisateurs ayant allégrement piraté leurs logiciels (lire : SaaS : vers un nouveau modèle de logiciel ?). Dans le cadre d'une première acquisition, le Creative Cloud peut se révéler très intéressant : au bout de deux ans d'utilisation, soit un cycle moyen de mise à jour chez Adobe, on atteint « seulement » 1 416,72 € de coût d'utilisation, contre 3 586 € pour une Master Collection complète. Cet abonnement ne peut néanmoins concurrencer le tarif de la mise à jour (687 €), avec le bénéfice de posséder les logiciels. Le Creative Cloud manque en fait de flexibilité : pour combattre efficacement le piratage et revenir vers une politique tarifaire moins critiquable, Adobe pourrait permettre de ne « s'abonner » qu'à Photoshop par exemple — mais ce n'est qu'une première version.

Flash CS6, InDesign CS6, les mobiles et les tablettes
Si Photoshop et Illustrator ont pris le virage cloud, Flash et InDesign se sont quant à eux adaptés à l'explosion des appareils mobiles, smartphones et tablettes en tête. Ainsi, Adobe a clairement entamé la transition de Flash : s'il reste un outil de création d'animations à destination du web, il est aujourd'hui plus que jamais orienté vers la création d'applications mobiles.

Air permettait déjà de créer des applications pour Android, mais il fallait jusqu'ici que l'utilisateur installe d'abord le runtime sur son smartphone ou sa tablette, puis l'application. Au prix de quelques mégaoctets de plus, il est désormais possible d'inclure Air 3.2 dans l'application. Le fonctionnement est différent pour iPhone et iPad, en raison des règles édictées par Apple : Flash CS6, comme son prédécesseur, se chargera de convertir le bytecode ActionScript en code natif Objective-C.



À ce sujet, de nouvelles APIs sont désormais accessibles au développeur Flash : les extensions natives permettent d'accéder à des fonctions spécifiques à des plateformes et des appareils, comme le niveau de la batterie ou le déclenchement du vibreur. Adobe ne les a pas inclus à Flash CS6, mais les propose sur son site en libre téléchargement : la collection est appelée à s'augmenter au fur et à mesure de la présentation de nouvelles fonctions matérielles et logicielles par les acteurs du monde du mobile.

Un projet Flash CS6 peut désormais tirer parti de l'accélération graphique et décharger le processeur central : Adobe utilise pour ce faire le framework open-source Starling, qui permet d'accélérer les graphismes 2D (il a par exemple été utilisé pour la version Facebook d'Angry Birds, en Flash). La démonstration fournie par Adobe, un petit jeu relativement intensif graphiquement, passe de 24 i/s à 60 i/s avec l'appel à ce framework.



Puisque l'on parle de jeu et de graphismes, il faut noter qu'Adobe a ajouté à Flash une fonction que les professionnels de la feuille de style connaissent bien, le support des sprites. Toutes les ressources graphiques et tous les états de ces ressources peuvent désormais être rassemblés en une seule image bitmap générée automatiquement, un fichier séparé contenant les coordonnées de chaque élément. Les éventuels états redondants d'un élément sont compactés pour gagner encore un peu plus de place.



InDesign prend lui aussi mieux en compte les réalités du marché en intégrant les besoins spécifiques aux mobiles et tablettes au workflow traditionnel. La principale fonction permettant cette intégration presque invisible est la mise en page « fluide » : elle permet de générer assez facilement les deux orientations nécessaires à une publication sur tablette, sans imposer un lourd travail déconnecté d'une éventuelle version papier. Dans notre exemple, le contenu a d'abord été pensé pour une mise en page horizontale : le choix d'un workflow numérique active automatiquement la mise en page fluide.



L'objectif de la mise en page fluide est d'automatiser, ou du moins de très largement accélérer, la génération des deux orientations, à l'aide de plusieurs guides et de quatre modes de redistribution du contenu. Le premier met à l'échelle les différents contenus : c'est le mode le moins intelligent, comme on peut le constater.



Recentrer permet tout simplement de recentrer la mise en page, sans la mettre à l'échelle : ce mode peut être un premier pas pour adapter la mise en page, notamment lorsqu'on a commencé par un petit format (tablette 7" par exemple) et que l'on veut passer à la taille supérieure (tablette 10").



C'est avec le mode se basant sur les guides que l'on commence à apercevoir la puissance potentielle de cette fonction. Cette fois, les éléments de la mise en page vont être mis à l'échelle en fonction des guides que vous aurez placés (en mode sélection, il suffit de cliquer sur un guide pour qu'il soit converti en guide de mise en page fluide, signalé par des tirets plutôt qu'un trait). Mieux encore : vous pouvez spécifier que certaines zones de texte doivent obligatoirement être découpées en colonne lorsqu'elles atteignent une certaine largeur, pour encore accélérer la procédure.

La page redimensionnée, les éléments ont été déplacés en fonction. L'image a gardé ses proportions, mais a été rognée pour s'adapter au nouveau format. Le texte est passé sur trois colonnes pour une meilleure lisibilité.


Dernier mode, celui qui se base sur les définitions des objets pour caler la mise en page. Il permet de définir des positions absolues des objets par rapport à de grands repères (bord des pages, etc.), et de les autoriser (ou pas) à évoluer dans telle ou telle direction. On part ici d'une couverture verticale.



Que l'on veut adapter à une orientation horizontale : en mise en page fixe, les éléments restent à leur place et ne s'adaptent pas.



On peut désormais épingler les éléments, par exemple au bord des pages, ou définir précisément les comportements lors du redimensionnement, et ainsi garantir que la mise en page sera préservée qu'elle que soit l'orientation. Une fois le modèle conçu précisément, on pourra produire les éditions successives sans peine, selon un workflow classique.

Le logo est épinglé en bas à gauche de la page.


On demande à l'image de fond de remplir la page qu'elle que soit l'orientation, et évidemment de coller à toutes les dimensions.


Le changement d'orientation est lors parfaitement géré.


Cette fonction de mise en page liquide peut être utilisée de concert avec la fonction de mise en page alternative, qui permet de gérer de front différentes mises en page pour différents supports — y compris le papier, qui n'est pas oublié avec cette nouvelle version.

À travers ces quelques exemples d'un nombre limité de quelques applications de la Creative Suite, on comprend la philosophie qui a présidé à la conception de cette CS6 : il a s'agit de l'adapter aux besoins nés depuis 2007 et la sortie de l'iPhone, qui n'avaient pas été particulièrement pris en compte en 2010 avec la CS5. On peut reprocher bien des choses à Adobe, de sa politique tarifaire fantaisiste (notamment en ce qui concerne les versions localisées) à son inconstance en matière d'interfaces, mais il faut reconnaître son grand pragmatisme. Beaucoup plus rapide que la CS5 et adaptée à la création de contenus pour les mobiles, les tablettes et le web, la CS6 est incontestablement un bon cru, que l'on pourra évaluer dans quelques jours à la faveur de la sortie des versions d'essai. Ne reste qu'une inconnue, celle du Creative Cloud : ce nouveau mode de consommation des applications sera-t-il un succès ? Rendez-vous à la CS7 pour le savoir.
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