Quatre années se sont écoulées depuis le dernier Entourage. En 2004, les Mac tournaient sur Panther (10.3), l'iPod s'était mis aux photos et Phil Schiller dévoilait l'iMac G5 à Apple Expo. Pendant que la Macintosh Business Unit de Microsoft développait Office 2008, Apple changeait deux fois d'OS, abandonnait le PowerPC et imposait de fait à ses partenaires un basculement vers son outil de développement Xcode. Une sacrée gymnastique qui n'a épargné personne, ni Microsoft, ni Adobe ou Quark, 4D et les autres. On pourrait presque alors pardonner le manque d'innovations qui se dégage de cet Entourage 2008. Les travaux de terrassement n'étaient pas légers, mais en informatique quatre ans ont presque valeur d'éternité alors on s'étonne que des pans entiers d'Entourage soient restés figés.
Des immobilismes
S'il n'y a pas lieu de changer pour changer quelques absences et incohérences sont surprenantes. Le Carnet d'adresses, le Centre de projets et la partie Notes n'ont pas bougé d'un iota. Le gestionnaire de tâches, lui, n'a gagné qu'un menu local, néanmoins très pratique, pour ajuster d'un clic les dates d'échéances. Ensuite, si l'on considère qu'Entourage est un véritable poste de communication intégré, allant de la gestion des courriers à la lecture des newsgroups en passant par la tenue d'un agenda on se demande bien où s'est caché le lecteur RSS. Mail 3 n'en proposant qu'un de très sommaire, Microsoft avait une carte à jouer, mais ses concepteurs ont passé leur tour.
En retard sur Time Machine
L'installation de la 2008 peut se faire sans écraser ni les applications ni la base de courriers de la 2004. Les données sont alors dupliquées dans leur nouveau dossier. Un bémol, à plusieurs reprises et sans explications, lors de son ouverture, Entourage a remis à niveau les données de sa base. Une opération, de plusieurs minutes, qui suit l'import de la base 2004 et qui ne devraient justement se manifester qu'une seule et unique fois.
Le logiciel s'appuie toujours sur un fichier base de données (de 1,6 Go dans notre cas). Il contient tous les messages et leurs pièces jointes avec néanmoins quelques dépendances : des fichiers de quelques dizaines de kilo-octets pour les règles de tri, les signatures et la liste des boites aux lettres. Le tout est logé dans un dossier placé dans Documents.
Une approche qui a le mérite de la simplicité lorsqu'on veut déplacer sa base sur un autre poste alors que Mail éparpille des éléments à plusieurs endroits. De même, la sauvegarde d'un tel bloc est rapide. Mais un fichier monobloc décuple aussi les risques de perdre toutes ses données d'un trait. Les expériences sur ce point sont variables. Il fut un temps où les bases du logiciel explosaient une fois atteints les 2 Go. Aujourd'hui c'est cette barrière qui a cédé et Entourage intègre des outils manuels et automatiques de vérification de sa base. Moyennant un peu de discipline, Entourage peut être solide comme un roc.
Cependant, à l'heure de Time Machine, cette structure monolithique devient un handicap. La plus infime action dans Entourage va actualiser la date de modification de son volumineux fichier base de données. Résultat, à chaque sauvegarde horaire de Time Machine ! Et on n'aura même pas le loisir de pouvoir fouiner à l'intérieur des bases sauvegardées, comme on le ferait avec Carnet d'adresses ou iPhoto. Même si l'on n'a perdu qu'une seule fiche contact c'est la base dans son ensemble qui devra être restaurée. A la décharge de Microsoft, Apple elle-même ne donne pas toujours l'exemple, la base de photos d'Aperture 1.6 n'est pas non plus conçue pour Time Machine.
Plus rapide sur Intel
Les grands immobilismes d'Entourage 2008 énumérés, qu'il y a t'il donc à se mettre sous la dent ? D'abord les bénéfices de l'adaptation aux puces Intel. Le logiciel se lance au moins deux fois plus vite que la 2004 (nous l'avons testé sur un MacBook Pro 15" Core 2 Duo à 2.2 GHz et 4 Go de RAM). Les redimensionnements des fenêtres sont plus fluides, ne laissant plus le curseur loin derrière et l'affichage des courriers est plus vif. C'est mieux, mais l'émulateur Rosetta était particulièrement efficace pour gommer l'absence de PowerPC. L'écart est nettement plus franc avec l'affichage des contenus HTML, comme on le verra plus loin. D'autres améliorations tiennent du détail, mais elles sont bienvenues, telle l'option de compression .zip pour les pièces jointes en lieu et place du vieux Stuffit.
Coup de frais sur l'interface
L'interface d'Entourage 2008 n'a changé que sur la forme et avec retenue. C'est tant pis pour l'effet de surprise, mais du coup le pied rentre facilement dans la chaussure. On retrouve immédiatement ses marques. Comme la fenêtre principale de Courrier, toujours flexible dans ses modes de présentation, dont l'affichage en trois colonnes qu'Apple refuse toujours à Mail alors qu'elle ne vend à ses clients que des écrans panoramiques…
Esthétiquement les reliquats de Mac OS 9 ont, presque, intégralement disparu au profit de dégradés de gris dans l'esprit de Leopard et du mauve, la signature historique du logiciel depuis Outlook Express. C'est sobre sans être triste et rehaussé par de nouvelles icônes plus colorées. La barre d'outils peut être enfin réordonnée à loisir avec la fonction de personnalisation habituelle de Mac OS X. Un détail, les six icônes qui emmènent vers chacune des sections (Courrier, Notes, Calendrier, etc.) ne peuvent plus s'afficher en gros pavé de boutons. Elles restent sagement alignées, comme à l'appel, ponctuées d'effets visuels lorsqu'on les frôle du curseur.
L'appréciation d'une interface se confond largement avec l'expression de goûts personnels. Disons alors qu'on trouve celle d'Entourage un peu riche sur les bords… A vouloir être plus royaliste que le roi, la MacBU a multiplié ombrés, détails et reliefs, conduisant à une certaine surcharge. Ça se sent dans la colonne des dossiers lorsqu'on la compare à celle de Mail et ça agresse l'oeil dans la nouvelle palette "My Day". Celle-ci s'affichant sur le bureau avec la discrétion d'une décoration militaire. On peut faire élégant sans faire voyant : c'est loupé.
Une barre de favoris
Un tape à l'oeil étranger à la nouvelle Barre des favoris importée, dans son principe, des navigateurs Web. Discrètement logée sous la barre des icônes elle est commune à toutes les vues d'Entourage. On y fait glisser les dossiers ou les filtres Affichage du courrier que l'on sollicite souvent. C'est une excellente idée et on supplie Apple de la mettre fissa au menu du prochain Mail. Par contre, on aurait aimé pouvoir réordonner les différentes boites à lettres entre elles dans la liste des dossiers, pour placer par exemple en tête une boite plus utilisée que les autres.
Une suite d'incohérences
Le crépi a donc été refait, mais le mur n'a pas beaucoup, voire pas du tout bougé à certains endroits. Pire, des travaux réalisés chez Word et consorts n'ont pas été engagés à l'identique dans Entourage. Ainsi, la fenêtre des préférences est en tous points identique à celle de 2004. Sauf que Word, Excel et PowerPoint 2008 ont eux décalqué l'interface de Préférences Système de Mac OS X.
Plus anecdotique, on ne peut toujours pas lancer une relève de courrier, la rédaction d'un mail ou celle d'une note via les menus de l'icône Entourage dans le Dock. C'eut été commode lorsque le logiciel est masqué. Pourtant, les icônes de Dock des trois autres logiciels ont (très) timidement commencé à s'adjoindre une ou deux commandes supplémentaires. A croire que, suivant en cela Apple, chaque équipe de la MacBU travaille dans l'ignorance de ce que font les autres.
Le moteur HTML redémarre
Autre exemple d'incohérence : les trois compagnons d'Entourage embarquent des thèmes de documents prêts à l'emploi. Chez Apple, Mail s'y est mis depuis Leopard. Et Entourage ? Nada ! La notion de création de courriers HTML lui reste largement étrangère, au-delà de quelques options d'enrichissement du texte datant d'avant l'explosion de la bulle Internet. Et si l'on s'aventure à réaliser un document HTML un peu soigné à partir des jolis modèles de Word 2008 et à le transférer avec la commande idoine vers Entourage, celui-ci le récupère avec la délicatesse d'une grue de chantier.
C'est d'autant plus dommage que son moteur de rendu HTML est sorti du coma. Nous avons réceptionné des courriers contenant les pages d'accueil des sites de MacGeneration, de Libé et de Wired, toutes trois assez riches. Dans Entourage 2004 l'affichage complet de telles pages peut prendre jusqu'à une vingtaine de secondes, avec un respect très personnel de leurs compositions et une lenteur de défilement à rendre fou l'utilisateur (quand l'application ne plante pas…). Virage à 180° degré avec Entourage 2008 : affichage quasi instantané de la page, respect de sa forme et vitesse de défilement dans la norme.
Spotlight à la manoeuvre
Une mise à jour dans Entourage 2004 avait amené un début de compatibilité avec Spotlight. Depuis le menu du Finder on pouvait interroger le contenu de la base du logiciel. Mais le moteur interne restait signé Microsoft. Spotlight est cette fois seul maître à bord. La vitesse de traitement s'en ressent diablement. Avec la 2004 les longs tête à tête avec une jauge de progression étaient monnaie courante, avec la 2008 les résultats tombent comme à Gravelotte.
En outre la fonction de recherche est mieux intégrée au logiciel, plus pratique d'emploi et elle offre toujours la possibilité de cumuler des critères de recherche puis de les enregistrer. Un principe de dossiers intelligents qu'Entourage avait utilisé bien avant Apple. Un vrai bonus aurait été de mettre en surbrillance les mots clef trouvés dans les résultats, comme le fait très bien Safari 3.
iPhoto en direct
Pour la rédaction de courriers, on peut compter sur de nouveaux services. L'ancienne palette flottante Album devenue Outils accède (lentement) aux albums et évènements d'iPhoto pour y piocher des images à glisser en pièces jointes. Mais pas moyen de modifier leur corpulence, elles seront reprises dans leur taille originale : gare aux pièces jointes de plusieurs méga-octets ! La palette recèle également l'onglet "Object Palette" (on trouve parfois dans les coins de petits oublis de traduction) avec une collection de pictogrammes de bonne qualité. Présent aussi un onglet Outils de référence avec des dictionnaires de définitions, de synonymes, de traduction (ce dernier n'a jamais réussi à se connecter sur Internet) et une zone de recherche pour le moteur Internet de Microsoft. Enfin, on dispose toujours de l'espace album pour y déposer des extraits de textes ou d'images prêts à être réutilisés. L'apport de ces outils est bienvenu, mais leur mise en oeuvre par un empilement d'onglets à déplier n'est pas toujours pratique sur des écrans de plus en plus horizontaux. Tout ouverts ils débordent même d'un écran d'iMac 24"…
Un coup d'oeil sur la journée
La palette "My Day" est l'une des vraies nouveautés du logiciel. Une fenêtre à l'interface joufflue et couleur raisin (très mûr) qui peut s'utiliser sans Entourage. Elle présente une vue rapide sur ses rendez-vous et ses tâches de la journée. Les tâches ont d'ailleurs vu leur définition élargie. Les courriers ou les contacts marqués d'un drapeau rouge s'ajoutent désormais aux tâches proprement dites et créées ex nihilo. C'est une très bonne idée puisqu'à un mail marqué correspond souvent un travail à effectuer, de même que l'on peut ainsi se souvenir de rappeler une personne. La palette My Day permet de créer directement une tâche, mais il faudra néanmoins ouvrir Entourage pour en préciser tous les détails.
Pas très commode non plus le déplacement dans l'agenda de My Day. Vous voulez avancer de deux mois ? Il faudra cliquer sur les flèches de déplacements pour progresser laborieusement de jour en jour… ou saisir une date manuellement selon le format j/m/a. Une navigation à revoir ! Cette palette peut se réduire en hauteur, mais dans ce cas elle ne délivre aucune information sinon la date du jour, tout en restant visible comme un bouton sur le nez et passablement encombrante. Mieux vaut la fermer pour la rappeler au besoin depuis son icône dans la barre des menus, dans le Dock ou par un raccourci clavier programmable.
Du léger mieux sur le calendrier
Le calendrier d'Entourage 2008 a lui aussi reçu son lifting avec ombrages et dégradés. Il a toujours sa liste des tâches affichée en regard de l'emploi du temps. Globalement l'apparence est plus flatteuse à l'oeil. Nouveauté appréciable on peut enfin créer des évènements à la souris, en cliquant glissant dans le calendrier comme dans iCal et sans devoir en passer par une fenêtre d'options.
Mais contrairement au logiciel d'Apple on reste sur le principe d'un seul calendrier dans lequel les évènements sont distingués par des couleurs thématiques. On pourra toutefois masquer des catégories d'évènements (famille, travail, etc.) via un menu local. Impossible aussi de s'abonner à un calendrier Web que ce soit ceux publiés depuis iCal via .mac ou d'un Google Calendar. Autre changement, la colonne listant les mois de l'année devient visible depuis la fenêtre Courrier.
On l'active par une (trop) discrète icône dans le coin en bas à gauche de la fenêtre. C'est pratique pour se rendre rapidement sur une journée ou sur une période dans Calendrier (on sélectionne alors plusieurs jours). Mais d'aucune manière dans ce mini calendrier on ne peut voir si une journée contient des évènements. Les mois affichés sont toujours vierges d'informations si ce n'est la date du jour courant cerclée de rouge. On est bien avancé…
Nouveau aussi le critère de "Disponibilité" que l'on peut associer à un évènement (Occupé, Libre, Provisoire ou Absent) et qui ajoute ici un degré supplémentaire d'information. Un bug enfin à signaler, lorsqu'on envoie un évènement à des contacts pour les inviter à y participer le menu local pour choisir le compte d'expédition reste grisé sur le compte par défaut.
Synchronisation par procuration
La synchronisation d'Entourage avec l'iPhone n'est pas au programme. A la décharge de Microsoft, sur ce point, Apple a gardé les clefs. On peut toutefois faire cohabiter les deux. Entourage 2008 conserve sa fonction de synchronisation de données avec Carnet d'adresses, iCal et maintenant avec les Notes. On pourra ainsi remplir Carnet d'adresses et voir son contenu synchronisé automatiquement dans Entourage, et inversement. Idem pour l'agenda à la réserve près qu'Entourage fusionne dans un seul calendrier tous ceux d'iCal. Les applications d'Apple serviront ainsi de passerelle entre Entourage et l'iPhone. Pour les utilisateurs d'autres appareils comme les Palm et Blackberry, des mises à jour sont en cours avec les utilitaires de synchronisations ad hoc puisque Microsoft a laissé tomber les conduits de communication avec ces appareils (précédente dépêche).
Anti-phishing plus anti-spam
Enfin, Microsoft a actualisé son filtre antispam. Aux noms de domaines auxquels on peut épargner un blocage s'est ajouté un nouvel onglet sous lequel on entrera le e-mail d'expéditeurs à bloquer justement. La démarche d'Entourage vis-à-vis du spam reste particulière. C'est de Microsoft que viendra l'affinage du filtre au fil de mises à jour de la suite, Entourage n'apprenant pas au fur et à mesure à mieux repérer les spams. On choisira juste un niveau de protection plus ou moins élevé, lequel a tendance à lancer ses filets un peu trop loin. Nouveau en revanche un filtre anti-phishing pour repérer des adresses de sites falsifiés contenus dans les courriers. Mais nous n'avons pas eu l'occasion d'en mesurer l'efficacité.
En conclusion
Au final, l'impression laissée par cette version 2008 est mitigée. Entourage reste un vrai bon logiciel, inégalé par son côté intégré et plus vaste dans ses compétences que le trio d'Apple. Le support plus étendu des serveurs Exchange (que nous n'avons pu tester) dans la version Standard d'Office (529€) en fait une solution évidente pour les Mac dans les entreprises équipées d'Office. Mais depuis les versions v.X et 2004, Entourage semble toujours rester un pas en arrière sur la marche des choses. L'absence de support RSS ou des calendriers Web en sont des exemples, l'inadéquation avec Time Machine, un autre. Même au sein de la suite, Entourage affiche une singularité qui avait fait son charme à son arrivée en 2000 (enfin du neuf dans Office !) mais qui trahit aujourd'hui comme une forme de désaffection de la part de ses concepteurs. Résultat, on a plus le sentiment d'être face à une version de transition (vers Intel, vers une interface plus OS X) que devant le résultat de quatre années de développement.
Quiconque a besoin d'Entourage, pour des raisons pratiques ou d'habitude, enfilera sans excitation, mais sans difficultés cette version 2008. D'autant que le ticket d'entrée pour le premier Office est raisonnable (139 € en Edition Famille et Etudiant). Mais Entourage ne domine plus aussi franchement son monde. Il aura fallu attendre plusieurs révisions de Mac OS X avant que Mail, iCal et Carnet d'adresses ne prennent du muscle. La proposition d'Apple n'a pas pris un ascendant sur le logiciel de Microsoft mais l'écart s'est bien réduit et aujourd'hui on peut raisonnablement hésiter entre les deux. Mail, lui, ne se fera aucune violence pour importer les bases d'Entourage et proposer de switcher…
Des immobilismes
S'il n'y a pas lieu de changer pour changer quelques absences et incohérences sont surprenantes. Le Carnet d'adresses, le Centre de projets et la partie Notes n'ont pas bougé d'un iota. Le gestionnaire de tâches, lui, n'a gagné qu'un menu local, néanmoins très pratique, pour ajuster d'un clic les dates d'échéances. Ensuite, si l'on considère qu'Entourage est un véritable poste de communication intégré, allant de la gestion des courriers à la lecture des newsgroups en passant par la tenue d'un agenda on se demande bien où s'est caché le lecteur RSS. Mail 3 n'en proposant qu'un de très sommaire, Microsoft avait une carte à jouer, mais ses concepteurs ont passé leur tour.
En retard sur Time Machine
L'installation de la 2008 peut se faire sans écraser ni les applications ni la base de courriers de la 2004. Les données sont alors dupliquées dans leur nouveau dossier. Un bémol, à plusieurs reprises et sans explications, lors de son ouverture, Entourage a remis à niveau les données de sa base. Une opération, de plusieurs minutes, qui suit l'import de la base 2004 et qui ne devraient justement se manifester qu'une seule et unique fois.
Le logiciel s'appuie toujours sur un fichier base de données (de 1,6 Go dans notre cas). Il contient tous les messages et leurs pièces jointes avec néanmoins quelques dépendances : des fichiers de quelques dizaines de kilo-octets pour les règles de tri, les signatures et la liste des boites aux lettres. Le tout est logé dans un dossier placé dans Documents.
Une approche qui a le mérite de la simplicité lorsqu'on veut déplacer sa base sur un autre poste alors que Mail éparpille des éléments à plusieurs endroits. De même, la sauvegarde d'un tel bloc est rapide. Mais un fichier monobloc décuple aussi les risques de perdre toutes ses données d'un trait. Les expériences sur ce point sont variables. Il fut un temps où les bases du logiciel explosaient une fois atteints les 2 Go. Aujourd'hui c'est cette barrière qui a cédé et Entourage intègre des outils manuels et automatiques de vérification de sa base. Moyennant un peu de discipline, Entourage peut être solide comme un roc.
Cependant, à l'heure de Time Machine, cette structure monolithique devient un handicap. La plus infime action dans Entourage va actualiser la date de modification de son volumineux fichier base de données. Résultat, à chaque sauvegarde horaire de Time Machine ! Et on n'aura même pas le loisir de pouvoir fouiner à l'intérieur des bases sauvegardées, comme on le ferait avec Carnet d'adresses ou iPhoto. Même si l'on n'a perdu qu'une seule fiche contact c'est la base dans son ensemble qui devra être restaurée. A la décharge de Microsoft, Apple elle-même ne donne pas toujours l'exemple, la base de photos d'Aperture 1.6 n'est pas non plus conçue pour Time Machine.
Plus rapide sur Intel
Les grands immobilismes d'Entourage 2008 énumérés, qu'il y a t'il donc à se mettre sous la dent ? D'abord les bénéfices de l'adaptation aux puces Intel. Le logiciel se lance au moins deux fois plus vite que la 2004 (nous l'avons testé sur un MacBook Pro 15" Core 2 Duo à 2.2 GHz et 4 Go de RAM). Les redimensionnements des fenêtres sont plus fluides, ne laissant plus le curseur loin derrière et l'affichage des courriers est plus vif. C'est mieux, mais l'émulateur Rosetta était particulièrement efficace pour gommer l'absence de PowerPC. L'écart est nettement plus franc avec l'affichage des contenus HTML, comme on le verra plus loin. D'autres améliorations tiennent du détail, mais elles sont bienvenues, telle l'option de compression .zip pour les pièces jointes en lieu et place du vieux Stuffit.
Coup de frais sur l'interface
L'interface d'Entourage 2008 n'a changé que sur la forme et avec retenue. C'est tant pis pour l'effet de surprise, mais du coup le pied rentre facilement dans la chaussure. On retrouve immédiatement ses marques. Comme la fenêtre principale de Courrier, toujours flexible dans ses modes de présentation, dont l'affichage en trois colonnes qu'Apple refuse toujours à Mail alors qu'elle ne vend à ses clients que des écrans panoramiques…
Esthétiquement les reliquats de Mac OS 9 ont, presque, intégralement disparu au profit de dégradés de gris dans l'esprit de Leopard et du mauve, la signature historique du logiciel depuis Outlook Express. C'est sobre sans être triste et rehaussé par de nouvelles icônes plus colorées. La barre d'outils peut être enfin réordonnée à loisir avec la fonction de personnalisation habituelle de Mac OS X. Un détail, les six icônes qui emmènent vers chacune des sections (Courrier, Notes, Calendrier, etc.) ne peuvent plus s'afficher en gros pavé de boutons. Elles restent sagement alignées, comme à l'appel, ponctuées d'effets visuels lorsqu'on les frôle du curseur.
L'appréciation d'une interface se confond largement avec l'expression de goûts personnels. Disons alors qu'on trouve celle d'Entourage un peu riche sur les bords… A vouloir être plus royaliste que le roi, la MacBU a multiplié ombrés, détails et reliefs, conduisant à une certaine surcharge. Ça se sent dans la colonne des dossiers lorsqu'on la compare à celle de Mail et ça agresse l'oeil dans la nouvelle palette "My Day". Celle-ci s'affichant sur le bureau avec la discrétion d'une décoration militaire. On peut faire élégant sans faire voyant : c'est loupé.
Une barre de favoris
Un tape à l'oeil étranger à la nouvelle Barre des favoris importée, dans son principe, des navigateurs Web. Discrètement logée sous la barre des icônes elle est commune à toutes les vues d'Entourage. On y fait glisser les dossiers ou les filtres Affichage du courrier que l'on sollicite souvent. C'est une excellente idée et on supplie Apple de la mettre fissa au menu du prochain Mail. Par contre, on aurait aimé pouvoir réordonner les différentes boites à lettres entre elles dans la liste des dossiers, pour placer par exemple en tête une boite plus utilisée que les autres.
Une suite d'incohérences
Le crépi a donc été refait, mais le mur n'a pas beaucoup, voire pas du tout bougé à certains endroits. Pire, des travaux réalisés chez Word et consorts n'ont pas été engagés à l'identique dans Entourage. Ainsi, la fenêtre des préférences est en tous points identique à celle de 2004. Sauf que Word, Excel et PowerPoint 2008 ont eux décalqué l'interface de Préférences Système de Mac OS X.
Plus anecdotique, on ne peut toujours pas lancer une relève de courrier, la rédaction d'un mail ou celle d'une note via les menus de l'icône Entourage dans le Dock. C'eut été commode lorsque le logiciel est masqué. Pourtant, les icônes de Dock des trois autres logiciels ont (très) timidement commencé à s'adjoindre une ou deux commandes supplémentaires. A croire que, suivant en cela Apple, chaque équipe de la MacBU travaille dans l'ignorance de ce que font les autres.
Le moteur HTML redémarre
Autre exemple d'incohérence : les trois compagnons d'Entourage embarquent des thèmes de documents prêts à l'emploi. Chez Apple, Mail s'y est mis depuis Leopard. Et Entourage ? Nada ! La notion de création de courriers HTML lui reste largement étrangère, au-delà de quelques options d'enrichissement du texte datant d'avant l'explosion de la bulle Internet. Et si l'on s'aventure à réaliser un document HTML un peu soigné à partir des jolis modèles de Word 2008 et à le transférer avec la commande idoine vers Entourage, celui-ci le récupère avec la délicatesse d'une grue de chantier.
C'est d'autant plus dommage que son moteur de rendu HTML est sorti du coma. Nous avons réceptionné des courriers contenant les pages d'accueil des sites de MacGeneration, de Libé et de Wired, toutes trois assez riches. Dans Entourage 2004 l'affichage complet de telles pages peut prendre jusqu'à une vingtaine de secondes, avec un respect très personnel de leurs compositions et une lenteur de défilement à rendre fou l'utilisateur (quand l'application ne plante pas…). Virage à 180° degré avec Entourage 2008 : affichage quasi instantané de la page, respect de sa forme et vitesse de défilement dans la norme.
Spotlight à la manoeuvre
Une mise à jour dans Entourage 2004 avait amené un début de compatibilité avec Spotlight. Depuis le menu du Finder on pouvait interroger le contenu de la base du logiciel. Mais le moteur interne restait signé Microsoft. Spotlight est cette fois seul maître à bord. La vitesse de traitement s'en ressent diablement. Avec la 2004 les longs tête à tête avec une jauge de progression étaient monnaie courante, avec la 2008 les résultats tombent comme à Gravelotte.
En outre la fonction de recherche est mieux intégrée au logiciel, plus pratique d'emploi et elle offre toujours la possibilité de cumuler des critères de recherche puis de les enregistrer. Un principe de dossiers intelligents qu'Entourage avait utilisé bien avant Apple. Un vrai bonus aurait été de mettre en surbrillance les mots clef trouvés dans les résultats, comme le fait très bien Safari 3.
iPhoto en direct
Pour la rédaction de courriers, on peut compter sur de nouveaux services. L'ancienne palette flottante Album devenue Outils accède (lentement) aux albums et évènements d'iPhoto pour y piocher des images à glisser en pièces jointes. Mais pas moyen de modifier leur corpulence, elles seront reprises dans leur taille originale : gare aux pièces jointes de plusieurs méga-octets ! La palette recèle également l'onglet "Object Palette" (on trouve parfois dans les coins de petits oublis de traduction) avec une collection de pictogrammes de bonne qualité. Présent aussi un onglet Outils de référence avec des dictionnaires de définitions, de synonymes, de traduction (ce dernier n'a jamais réussi à se connecter sur Internet) et une zone de recherche pour le moteur Internet de Microsoft. Enfin, on dispose toujours de l'espace album pour y déposer des extraits de textes ou d'images prêts à être réutilisés. L'apport de ces outils est bienvenu, mais leur mise en oeuvre par un empilement d'onglets à déplier n'est pas toujours pratique sur des écrans de plus en plus horizontaux. Tout ouverts ils débordent même d'un écran d'iMac 24"…
Un coup d'oeil sur la journée
La palette "My Day" est l'une des vraies nouveautés du logiciel. Une fenêtre à l'interface joufflue et couleur raisin (très mûr) qui peut s'utiliser sans Entourage. Elle présente une vue rapide sur ses rendez-vous et ses tâches de la journée. Les tâches ont d'ailleurs vu leur définition élargie. Les courriers ou les contacts marqués d'un drapeau rouge s'ajoutent désormais aux tâches proprement dites et créées ex nihilo. C'est une très bonne idée puisqu'à un mail marqué correspond souvent un travail à effectuer, de même que l'on peut ainsi se souvenir de rappeler une personne. La palette My Day permet de créer directement une tâche, mais il faudra néanmoins ouvrir Entourage pour en préciser tous les détails.
Pas très commode non plus le déplacement dans l'agenda de My Day. Vous voulez avancer de deux mois ? Il faudra cliquer sur les flèches de déplacements pour progresser laborieusement de jour en jour… ou saisir une date manuellement selon le format j/m/a. Une navigation à revoir ! Cette palette peut se réduire en hauteur, mais dans ce cas elle ne délivre aucune information sinon la date du jour, tout en restant visible comme un bouton sur le nez et passablement encombrante. Mieux vaut la fermer pour la rappeler au besoin depuis son icône dans la barre des menus, dans le Dock ou par un raccourci clavier programmable.
Du léger mieux sur le calendrier
Le calendrier d'Entourage 2008 a lui aussi reçu son lifting avec ombrages et dégradés. Il a toujours sa liste des tâches affichée en regard de l'emploi du temps. Globalement l'apparence est plus flatteuse à l'oeil. Nouveauté appréciable on peut enfin créer des évènements à la souris, en cliquant glissant dans le calendrier comme dans iCal et sans devoir en passer par une fenêtre d'options.
Mais contrairement au logiciel d'Apple on reste sur le principe d'un seul calendrier dans lequel les évènements sont distingués par des couleurs thématiques. On pourra toutefois masquer des catégories d'évènements (famille, travail, etc.) via un menu local. Impossible aussi de s'abonner à un calendrier Web que ce soit ceux publiés depuis iCal via .mac ou d'un Google Calendar. Autre changement, la colonne listant les mois de l'année devient visible depuis la fenêtre Courrier.
On l'active par une (trop) discrète icône dans le coin en bas à gauche de la fenêtre. C'est pratique pour se rendre rapidement sur une journée ou sur une période dans Calendrier (on sélectionne alors plusieurs jours). Mais d'aucune manière dans ce mini calendrier on ne peut voir si une journée contient des évènements. Les mois affichés sont toujours vierges d'informations si ce n'est la date du jour courant cerclée de rouge. On est bien avancé…
Nouveau aussi le critère de "Disponibilité" que l'on peut associer à un évènement (Occupé, Libre, Provisoire ou Absent) et qui ajoute ici un degré supplémentaire d'information. Un bug enfin à signaler, lorsqu'on envoie un évènement à des contacts pour les inviter à y participer le menu local pour choisir le compte d'expédition reste grisé sur le compte par défaut.
Synchronisation par procuration
La synchronisation d'Entourage avec l'iPhone n'est pas au programme. A la décharge de Microsoft, sur ce point, Apple a gardé les clefs. On peut toutefois faire cohabiter les deux. Entourage 2008 conserve sa fonction de synchronisation de données avec Carnet d'adresses, iCal et maintenant avec les Notes. On pourra ainsi remplir Carnet d'adresses et voir son contenu synchronisé automatiquement dans Entourage, et inversement. Idem pour l'agenda à la réserve près qu'Entourage fusionne dans un seul calendrier tous ceux d'iCal. Les applications d'Apple serviront ainsi de passerelle entre Entourage et l'iPhone. Pour les utilisateurs d'autres appareils comme les Palm et Blackberry, des mises à jour sont en cours avec les utilitaires de synchronisations ad hoc puisque Microsoft a laissé tomber les conduits de communication avec ces appareils (précédente dépêche).
Anti-phishing plus anti-spam
Enfin, Microsoft a actualisé son filtre antispam. Aux noms de domaines auxquels on peut épargner un blocage s'est ajouté un nouvel onglet sous lequel on entrera le e-mail d'expéditeurs à bloquer justement. La démarche d'Entourage vis-à-vis du spam reste particulière. C'est de Microsoft que viendra l'affinage du filtre au fil de mises à jour de la suite, Entourage n'apprenant pas au fur et à mesure à mieux repérer les spams. On choisira juste un niveau de protection plus ou moins élevé, lequel a tendance à lancer ses filets un peu trop loin. Nouveau en revanche un filtre anti-phishing pour repérer des adresses de sites falsifiés contenus dans les courriers. Mais nous n'avons pas eu l'occasion d'en mesurer l'efficacité.
En conclusion
Au final, l'impression laissée par cette version 2008 est mitigée. Entourage reste un vrai bon logiciel, inégalé par son côté intégré et plus vaste dans ses compétences que le trio d'Apple. Le support plus étendu des serveurs Exchange (que nous n'avons pu tester) dans la version Standard d'Office (529€) en fait une solution évidente pour les Mac dans les entreprises équipées d'Office. Mais depuis les versions v.X et 2004, Entourage semble toujours rester un pas en arrière sur la marche des choses. L'absence de support RSS ou des calendriers Web en sont des exemples, l'inadéquation avec Time Machine, un autre. Même au sein de la suite, Entourage affiche une singularité qui avait fait son charme à son arrivée en 2000 (enfin du neuf dans Office !) mais qui trahit aujourd'hui comme une forme de désaffection de la part de ses concepteurs. Résultat, on a plus le sentiment d'être face à une version de transition (vers Intel, vers une interface plus OS X) que devant le résultat de quatre années de développement.
Quiconque a besoin d'Entourage, pour des raisons pratiques ou d'habitude, enfilera sans excitation, mais sans difficultés cette version 2008. D'autant que le ticket d'entrée pour le premier Office est raisonnable (139 € en Edition Famille et Etudiant). Mais Entourage ne domine plus aussi franchement son monde. Il aura fallu attendre plusieurs révisions de Mac OS X avant que Mail, iCal et Carnet d'adresses ne prennent du muscle. La proposition d'Apple n'a pas pris un ascendant sur le logiciel de Microsoft mais l'écart s'est bien réduit et aujourd'hui on peut raisonnablement hésiter entre les deux. Mail, lui, ne se fera aucune violence pour importer les bases d'Entourage et proposer de switcher…