Proton, qui a fait de la protection de la vie privée son principal argument de vente, pourrait quitter la Suisse si le pays durcit ses règles de surveillance des télécommunications. « Jamais Proton ne se pliera à une ordonnance qui rendrait la législation helvétique plus intrusive que celle de l’Union européenne », déclare le CEO Andy Yen à la Tribune de Genève.

Si elle est adoptée telle quelle, la refonte de l’ordonnance sur la surveillance des télécommunications obligera Proton et les autres acteurs du web à enregistrer en temps réel les métadonnées (adresses IP, destinataires des messages, localisation…) des conversations de leurs utilisateurs et à partager celles-ci en continu avec le service de Surveillance de la correspondance par poste et télécommunication. Aujourd’hui, ces données sont seulement fournies en cas de requête des autorités judiciaires ou du Service de renseignement de la Confédération.
« Comment rester crédibles et proposer des services censés protéger les données personnelles si vous devez vous engager dans un espionnage d’État allant même au-delà de celui requis par les lois américaines ? », observe Andy Yen. Proton a présenté jusque-là les lois suisses comme un atout en faveur de la confidentialité des données, même si cela ne l’exempte pas d’une obligation de coopération avec les autorités.
« Si [la nouvelle ordonnance est adoptée sans modification], Proton quittera Genève, tout simplement parce que cela n’aurait plus de sens de rester en Suisse », résume le CEO. Et de préciser que la majorité des serveurs de Proton ont été délocalisés dès 2021 en Allemagne et en Norvège face à un risque de durcissement des règles helvétiques.
Son quartier général à Genève compte environ 150 personnes et son antenne à Zurich une soixantaine d’employés. Si un déménagement devait avoir lieu, Andy Yen envisage tout d’abord l’Allemagne. La refonte de l’ordonnance sur la surveillance des télécommunications, que Proton espère donc voir amender en menaçant de quitter la Suisse, est mise en consultation publique jusqu’au 6 mai.