Sortie au début des années 90, la Super Nintendo (Super NES aux États-Unis, Super Famicom au Japon) est une console qui a eu un énorme succès. Et la 16 bits de Nintendo a une particularité intéressante : elle semble légèrement accélérer avec le temps qui passe.

Dans une console (et dans nos appareils modernes), les fréquences dépendent d'un oscillateur à base de quartz, qui fournit une fréquence de référence qui va ensuite être divisée ou multipliée pour obtenir celles des composants. La Super Nintendo en contient deux : un premier à 21,3 MHz qui sert pour le processeur et le PPU (la puce graphique) et un second pour la partie audio, qui fonctionne à 25,6 MHz. En théorie, selon la documentation officielle, il sert pour la fréquence de l'APU (la puce audio) et sa fréquence d'échantillonnage de 32 kHz. Dans la pratique, et les développeurs d'émulateurs l'avaient remarqué il y a une vingtaine d'années, la fréquence réelle est de 32 040 Hz. En calant un émulateur sur la fréquence officielle, certains jeux ne fonctionnent pas, par exemple.
Le problème, c'est que les composants ne sont pas parfaits et que la fréquence peut varier un peu, que ce soit pour des raisons liées à la température ou tout simplement à l'âge. Avec un programme de test, des développeurs ont pu vérifier les valeurs sur environ 150 consoles, et le résultat montre que la fréquence réelle en 2025 est de l'ordre de 32 076 Hz. Pour un joueur lambda, ce n'est pas un problème : la différence (0,2 %) est bien trop faible pour entendre une différence. Même celle mesurée avec la plus grande variation (234 Hz) n'atteint pas un seuil où le changement est audible. Vous trouverez plus de détails sur ce site.

Mais ce souci touche un type bien particulier de joueurs : ceux qui aiment le speedrun. C'est une pratique qui consiste à tenter de terminer un jeu le plus vite possible et elle peut être assistée par des outils d'automatisation (on parle alors de TAS, Tool-assisted speedrun). Les outils de TAS permettent de contrôler le jeu à l'image près, pour effectuer des mouvements à un moment très précis, ce qui permet dans certains de manipuler le fonctionnement du jeu1. Mais comme la fréquence de la console peut varier, la synchronisation entre les différents composants (CPU, PPU, APU) peut être légèrement altérée avec un décalage d'une image, par exemple. Et ce simple décalage, invisible, peut empêcher un outil de speedrun de fonctionner correctement.
Notons enfin que les problèmes de fréquence peuvent toucher tous les appareils, mais qu'une différence aussi faible n'a généralement pas d'incidence visible. Dans le monde informatique, la modification de l'oscillateur à quartz a essentiellement été employée pour deux cas précis. Le premier va peut-être raviver les souvenirs de certains : il était possible d'overclocker les Macintosh à base de processeurs 68000 en remplaçant le composant pour un plus rapide (et passer de 25 à 33 MHz par exemple). Dans un autre domaine, certains fabricants de cartes mères avaient tendance à choisir des fréquences légèrement plus élevées que celles attendues, pour obtenir un overclocking de 1 ou 2 %. C'était un bon moyen d'obtenir une place de choix dans un comparatif, parfois en manipulant le BIOS pour qu'il indique la fréquence attendue au lieu de celle réellement appliquée…
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Sans entrer dans les détails, certains jeux basent l'apparition d'événement sur la manière dont les touches ont été pressées. Une fois l'algorithme connu, il est donc possible de manipuler la chance pour obtenir le meilleur événement. ↩︎