Verdir le numérique, c'est la mission que se sont donnés le ministère de la Transition écologique et le secrétariat d'État au Numérique, qui ont dévoilé aujourd'hui une feuille de route visant à la « convergence des transitions » (écologique et numérique, donc). Un inventaire à la Prévert de mesures, certaines très concrètes, d'autres plus floues.
La feuille de route contient plusieurs initiatives visant à quantifier plus précisément l'empreinte environnementale du numérique. Dans ce domaine, tout reste à faire à commencer par la mise au point d'une méthodologie. Ce projet a été confié aux bons soins de l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), qui rendra ses conclusions d'ici l'été 2022.
Les opérateurs, les constructeurs, les fournisseurs de contenus et d'applications, ainsi que les opérateurs de centres de données seront mis à contribution pour élaborer un baromètre environnemental des acteurs du numérique. L'Arcep, le régulateur de la téléphonie, ainsi que l'Ademe sont chargés de collecter des données auprès de tout ce petit monde, et de construire cet outil.
Voilà pour les outils de diagnostic. La feuille de route comprend un certain nombre de mesures visant à réduire l'impact du numérique sur l'environnement, dont les trois quarts provient de la phase de production des équipements. Il n'y a pas grand chose qui soit fabriqué en France, ni même en Europe, mais il est tout de même possible d'agir en intégrant des principes de durabilité, d'allongement de la durée de vie et de réparabilité.
Cela passe par exemple par l'indice de réparabilité, inauguré en début d'année mais qui ne sera obligatoire qu'à partir du 1er janvier 2022. Apple prend son temps avant d'apposer les étiquettes qui vont bien (lire : Encore quelques semaines avant de voir les indices de réparabilité des produits Apple). Elles seront remplacées en 2024 par un indice de durabilité qui listera de nouveaux critères de fiabilité et de robustesse.
Les pratiques commerciales de type « un smartphone à 1 € » vont être étudiées de près par l'Arcep. Un rapport du Conseil général de l’économie (CGE) et du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) sera remis sous peu pour identifier les moyens de lutter contre « l'obsolescence logicielle ». Un dispositif de « criticité » devra aussi être mis en place pour renseigner les consommateurs sur les mises à jour logicielles, les nouvelles fonctions, les patchs correctifs. En somme… des notes de version ?
En aval de la fabrication des produits, il y a toute une filière française du réemploi et du reconditionnement à renforcer. Le décret relatif à la définition de « produit reconditionné » entrera en vigueur au 1er avril 2021 : il s'agit d'un label censé donner un avantage compétitif aux entreprises françaises vertueuses et « affermir la confiance des acheteurs ».
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Pour renforcer les entreprises françaises spécialistes du reconditionné et du réemploi, 21 millions d'euros vont abonder le fonds "économie circulaire" de l'Ademe : des appels à projets régionaux vont être lancés durant ce premier trimestre. Les acheteurs publics — autrement dit l'État — devront acquérir des équipements reconditionnés ou de seconde main ; à terme, 20% des achats de téléphones fixes et portables, ainsi que 20% du matériel informatique devront être issus de ces filières. Pour alimenter les lignes de production des reconditionneurs, les opérateurs devront collecter les smartphones, ce qu'ils ont commencé à faire.
La feuille de route prépare également le terrain pour l'attribution des prochaines bandes de fréquence 26 GHz. Une première lettre de cadrage du gouvernement demandera à l'Arcep de plancher sur les « voies et moyens de prise en compte des enjeux environnementaux » pour la 5G millimétrique. Un moyen de s'éviter les débats et les moratoires qui ralentissent le déploiement de la 5G sur les bandes 3,5/3,8 GHz.
Le gouvernement entend aussi promouvoir la sobriété dans les usages du numérique. À partir du 1er janvier prochain, les opérateurs devront fournir à leurs abonnés des informations sur la quantité de données consommées, avec leur équivalent en émissions de gaz à effet de serre. L'Ademe va organiser une campagne nationale d'information et de sensibilisation sur les pratiques numériques moins polluantes.