La France pousse l'Union européenne à serrer un peu plus fort le kiki des grandes entreprises du numérique et d'internet. Cédric O, le secrétaire d'État au Numérique, a pris son bâton de pèlerin pour préparer la présidence tournante de l'Union européenne qui va échoir à l'Hexagone l'année prochaine, durant le premier semestre. D'après les informations du Financial Times, Le gouvernement fait pression pour obtenir des changements dans le Digital Services Act (DSA), un texte présenté en fin d'année dernière par la Commission, qui vise à responsabiliser les plateformes au niveau du partage des contenus.
Paris souhaite que chaque État membre puisse infliger des amendes à ces plateformes, et que chacun d'entre eux ait aussi la possibilité d'exiger le retrait de contenus illégaux. Ce sont actuellement les prérogatives des États où les entreprises ont leurs quartiers généraux, c'est à dire l'Irlande et le Luxembourg où Apple, Google, Facebook et Amazon sont localisés. Ces pays ont donc d'énormes responsabilités en matière de régulation pour l'ensemble de l'Europe.
Le risque ici c'est que les plateformes seront soumises aux contraintes de 27 régulateurs, et non plus d'un seul. Le marché unique européen en prendrait un coup derrière la tête en se présentant d'une manière aussi fragmentée. Cédric O voudrait aussi étendre la portée du DSA en y intégrant le « contenu préjudiciable et la désinformation ». « S'il n'y a pas de cadre juridique, rien n'empêche Twitter ou Facebook de censurer les discours qu'ils n'aiment pas », ajoute le secrétaire d'État qui a rencontré mercredi dernier Thierry Breton le « super commissaire » européen1 pour lui exposer les propositions françaises.
Une des difficultés du débat autour du DSA va justement être de déterminer ce qu'est un contenu illégal et « ce qui doit être préservé pour respecter la liberté d’expression », avait récemment expliqué Margrethe Vestager, la vice-présidente exécutive de la Commission en charge de la concurrence.
Bruno Le Maire, le ministre de tutelle de Cédric O, n'est pas en reste dans l'activisme, cette fois sur le plan industriel. Il réclame ainsi un plan européen pour réduire la dépendance du vieux continent aux composants électroniques venus d'Asie. « Nous pensons qu'il est essentiel de renforcer la stratégie industrielle européenne dans le but de conserver les capacités industrielles de l'Europe, de les développer dans un proche avenir et d'assurer l'indépendance stratégique de l'Europe », rapporte Reuters.
Une gageure, notamment pour la France qui a subi une désindustrialisation continue depuis des décennies pour réaliser des gains de productivité, qui s'inscrit en outre dans un contexte de pénurie de composants.
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Le commissaire européen est chargé du marché intérieur, du numérique, de la défense et de l'espace, de la politique industrielle (et donc de la production des vaccins). ↩︎