Être le plus gros moteur de recherche au monde quand la tendance est aux auditions antitrust, cela peut rendre paranoïaque prudent. La preuve, cela ferait des années qu’Alphabet (la société mère de Google) tente de bannir certains mots du vocabulaire de ses employés, y compris dans des contextes informels. Selon des documents internes récemment obtenus par The Markup, les mots tabous incluraient ainsi « marché », « part de marché », « barrière à l’entrée », ou encore « effet de réseau »1. La novlangue d’Alphabet préconiserait à la place des termes plus édulcorés comme « industrie » (ou « espace »), « part de revenu », « défis » ou « de grande valeur pour nos utilisateurs », respectivement.
Ces documents à l’attention des employés, des stagiaires et des vendeurs obéiraient à un objectif simple : éviter de donner du grain à moudre aux plaignants lors des nombreux procès et investigations qui visent régulièrement la firme de Mountain View. Ou, pour citer des documents internes : « [l]es mots ont de l’importance. Surtout en ce qui concerne la législation antitrust […] [mieux vaut] partir du principe que tous les documents internes deviendront publics ». Alphabet chercherait également à décourager ses employés d’imprimer ou de distribuer leurs documents, juste au cas où. Avec 90 % de part de marché aux États-Unis (pardon, de « part de revenu »), on n’est jamais trop prudent.
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Un terme qui désigne le phénomène selon lequel l’utilité d’un produit dépend du nombre de ses utilisateurs, et qui concerne particulièrement les technologies de communication et les réseaux sociaux. ↩︎