Aux États-Unis et en Europe, la puissance des plateformes en ligne, qu'il s'agisse des réseaux sociaux, des e-commerçants ou des boutiques d'applications, commence à intéresser et inquiéter les régulateurs. Des enquêtes sont en cours des deux côtés de l'Atlantique concernant leurs pratiques commerciales, leurs entourloupes fiscales, les relations avec les vendeurs et les développeurs. Et de leur côté, les principaux acteurs fourbissent leurs argumentaires.
En France, la commission des affaires économiques du Sénat phosphore sur un projet de loi dont l'objectif est de « garantir le libre choix du consommateur dans le cyberespace », rapporte Le Figaro. Le texte en cours de gestation vise tout d'abord à offrir aux utilisateurs le libre choix des services désirés. Une manière de forcer l'ouverture des appareils mobiles, et tout particulièrement l'iPhone, à des boutiques alternatives.
Sophie Primas, présidente Les Républicains de la commission, donne l'exemple des tickets de transport dématérialisés en Ile-de-France, qui sont disponibles sur une poignée de smartphones Samsung. Pour des raisons techniques (et manifestement commerciales aussi), Apple et la région ne sont pas encore parvenus à s'entendre pour permettre aux possesseurs d'iPhone de se servir de ces tickets.
La loi permettrait à l'Arcep, le gendarme des communications électroniques, de sanctionner les entreprises qui empêcheraient leurs utilisateurs de profiter de ces services. En cas d'infraction constatée, l'amende pourrait se monter à 4% du chiffre d'affaires mondial du constructeur…
Le texte élaboré au Sénat veut également mettre sur pied une plateforme commune à tous les réseaux sociaux, sorte de « réceptacle commun » pour en assurer l'interopérabilité. L'idée est de pouvoir quitter un réseau social, tout en conservant les contacts engrangés au fil des ans. Malheureusement, c'est pour le moment un vœu pieux : une telle plateforme n'existe pas à l'heure actuelle, les Facebook, Instagram, Pinterest et autre Twitter de ce monde n'ayant aucune envie de partager leurs précieuses données avec leurs camarades.
Là aussi, c'est l'Arcep qui serait chargé de tordre le bras aux réseaux sociaux récalcitrants. Une autorité qui, si elle est chargée de ces deux missions, devra certainement muscler son attirail législatif et obtenir les moyens indispensables pour tenir tête aux géants du web. Le dernier point permettrait à l'Autorité de la concurrence d'être mise au courant du moindre projet d'acquisition d'entreprises, y compris lorsque le chiffre d'affaires est inférieur à 50 millions d'euros. Actuellement, c'est la limite à partir de laquelle l'Autorité doit donner son aval.
À moins que le texte soit repris par le gouvernement ou l'Assemblée nationale, il semble difficile que le texte puisse en l'état devenir une loi. Sophie Primas espère néanmoins qu'il pourra servir de base à une réflexion plus large, en particulier au niveau européen où il aurait beaucoup plus de poids et de mordant qu'à l'échelon national.