En 2010, Steve Jobs avait eu sa curiosité piquée par une petite voiture au look de Twingo, la V-Vehicle, en train d’être mise au point par Bryan Thompson et son équipe. Proche des investisseurs de cette startup, le patron avait demandé à voir l’engin en personne, se souvient Thompson qui a raconté l’anecdote au Guardian.
Accompagné de quelques collègues, Thompson s’était exécuté sans effort et il avait amené depuis la Louisiane son véhicule à bouille de batracien au domicile de son hôte :
Une mince silhouette sortit du porche, grand sourire et jean usé. Pendant qu’ils se serraient la main, Reed, le fils de Jobs, arriva pour expliquer qu’un prototype d’iPhone qu’il utilisait ne marchait pas. « Retourne à la maison » lui intima son père avant de tourner toute son attention sur le véhicule. Jobs finit par prendre place devant le volant, Thomson à coté de lui. Deux autres personnes entrèrent pour s’installer à l’arrière mais Jobs leur demanda de sortir : “Je ne veux personne ici”.
Pendant les 15 minutes qui suivirent, Thomson dit en avoir appris plus sur les plastiques que pendant ses années d’étudiant en design et celles passées dans l’industrie automobile.
Sa voiture était à essence mais conçue de telle manière qu’elle pourrait coûter 70 % moins cher en fabrication et peser 40 % de moins qu’une auto équivalente. La V-Vehicule utilisait une structure en polypropylène et fibre de verre, et d’autres matériaux à l’intérieur comme la fibre de bois (un composite réalisé avec de la résine et de la pulpe de bois).
Auscultant l’intérieur de la voiture, Jobs suggéra de ne pas chercher à dissimuler les plastiques mais au contraire à les mettre en valeur « Laissez les matériaux s’exprimer en toute honnêteté », dit-il. Ensuite, le bloc de commande central de la planche de bord méritait d’être redessiné en un seul élément « qui distillerait un sentiment de haute précision ».
Jobs conseilla ensuite de donner plus de muscles aux lignes intérieures de la voiture, à l’image de sa carrosserie extérieure. « Une surface en tensions transmet une grande énergie, comme un animal prêt à bondir. Ca vient du subconscient et cela confère au produit qualité et confiance », explique Thompson. C’est Tom Motano qui avait dessiné les lignes de cette voiture, un ancien de Mazda où il avait travaillé sur les sportives MX–5 Miata et RX–7.
Le patron d’Apple s’en tint à offrir des suggestions, charge à Thompson de voir comment les mettre en pratique. Il se souvient également que Jobs s’était étonné de voir qu’une aussi petite entreprise, dans un univers de grands groupes, était capable de mettre au point une voiture de bonne qualité avec un bon design.
L’affaire a cependant capoté. V-Vehicule a été renommé Next Autoworks, vendu à un fond d’investissements et elle pourrait voir le jour en Italie. Les investisseurs des débuts sont toujours là, le projet est piloté par Tony Bonidy, un ancien employé de Jobs chez NeXT.