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Android et Chrome OS : Google doit-elle choisir ?

Anthony Nelzin-Santos

lundi 16 mai 2011 à 16:10 • 43

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« Un jour Larry et Sergey ont acheté Android, et je ne l'ai même pas remarqué » : Android n'a jamais été le passe-temps favori d'Eric Schmidt. L'ancien PDG de Google, qui représente une autre génération que le duo ayant co-fondé la société, s'intéresse plutôt à Chrome OS. L'édition 2011 de la Google I/O a été l'occasion d'une démonstration de cette dichotomie troublante.

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La première journée de la conférence développeurs de Google a été l'occasion d'un florilège d'annonces autour d'Android, d'Honeycomb 3.1 à Ice Cream Sandwich, des films sur l'Android Market à Google Music Beta, de l'Open Accessory Project à Android at Home. La deuxième journée, elle, a été consacrée à Chrome, navigateur transformé en OS avec Chrome OS et le Chrome Web Store. À chaque fois, le but est d'attirer les développeurs, alors que les applications sont devenues le nerf de la guerre et que la taille des boutiques est un argument commercial.

Android et Chrome OS représentent pourtant deux approches diamétralement opposées : Google résume à elle seule le débat actuel voyant s'affronter les applications natives et les applications Web. Les optimistes n'hésitent pas à dire qu'en préservant les deux approches, Google s'offre un billet pour l'avenir, quel qu'il soit : « ne pas choisir, c'est encore choisir » disait Sartre, et Google choisit ici d'être présent, coûte que coûte.

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Le débat serait simple : les smartphones et tablettes, appareils utilisant des plateformes ARM économes mais peu puissantes, utilisent Android et ses applications taillées sur mesure. Les ordinateurs plus conventionnels utilisant l'architecture x86 plus polyvalente, mais moins optimisée, peuvent sans conteste exécuter des applications Web, qui ont l'avantage de pouvoir être utilisées aussi dans Windows, Mac OS X, Linux, et même d'autres OS mobiles.

Bref, le développeur n'aurait qu'à choisir sa cible, la technologie s'adaptant parfaitement à ses besoins. Dans un cas comme dans l'autre, Google a prévu une boutique où mettre en avant les applications : Android Market côté mobiles, Chrome Web Store côté netbooks. Deux approches complémentaires ? Pas sûr : sur scène, les équipes de développement de Chrome OS se félicitaient de ce que leur boutique ne prenait que 5 % de commission sur les ventes, alors même que « l'Android Market comme l'App Store [d'Apple] ponctionne 30 % ».

La situation est donc loin d'être claire, tant pour le grand public que pour Google elle-même. Android et son Market sont là et bien là, installés sur une centaine de millions d'appareils, que le développeur peut cibler avec plus ou moins de difficultés et plus ou moins de bonheur. Chrome OS n'est pas encore là, et mettra quelque temps à décoller : de l'aveu même de Google, la vision de l'informatique qu'il propose n'est pas aisée à comprendre et va nécessiter une certaine pédagogie.

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Chrome OS n'est pas une nouvelle idée, c'est même une très ancienne idée, développée par les sociétés ayant employé… Eric Schmidt. En connectant un netbook qui n'est qu'une coquille vide au nuage, on recréé le couple client léger / mainframe des débuts de l'informatique. L'idée nouvelle de Chrome OS est le déplacement de ce qui est personnel : on ne possède plus une machine, l'ordinateur, on possède des données, accessibles depuis n'importe quelle machine.



Le grand public sera-t-il capable de comprendre cette différence fondamentale ? Pas certain : on change aujourd'hui de smartphone comme de chemise, et on retrouve ses données, des courriels aux vidéos YouTube en passant par son compte Facebook, tel qu'on les a laissées. L'informatique s'est déjà déplacée sur des serveurs distants : Chrome OS est donc soit en retard (un Mac avec Chrome, c'est déjà un Chromebook, mais un Chromebook qui peut faire autre chose que de surfer quand il le faut), soit très en avance (les webapps ne peuvent pas encore remplacer toutes les applications natives, et la connexion Internet permanente et pervasive est pour le moment un doux rêve).

Android a donc l'avantage de représenter le présent, un présent tangible permettant de construire un futur proche sur des bases assez solides. Sans être aussi radical que Chrome OS qui balaye le système d'exploitation en le remplaçant par un navigateur, Android, comme iOS, représente un sacré coup de jeune pour les OS des années 1980, débarrassés de toutes leurs scories, allégés et modernisés.

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Android a de quoi devenir le nouveau standard sur les smartphones, les tablettes, peut-être même les télévisions (Google TV utilise désormais Android 3.1), les appareils de la vie courante (Open Accessory et Android at Home qui permettent d'utiliser son smartphone comme télécommande pour des objets). Chrome OS, lui, n'a presque pas évolué en un an, et fait plus que jamais figure d'un nouveau produit Google en bêta lancé à la cantonade sans plan précis.

En face, la réponse est bien plus claire : en 1997, Steve Jobs parlait d'une stratégie « à un seul OS », et cet OS semble être iOS, qui équipe iPhone, iPod et iPad, et vers lequel le Mac tend avec Mac OS X Lion. Une réponse simple vers laquelle utilisateurs et développeurs pourraient bien finir par se tourner (ou revenir), malgré ses imperfections.

Avec Chrome OS, Google tente peut-être ici le coup de poker, en jouant profil bas. Android comme iOS représente le présent, et représenter le présent, c'est peut-être déjà être dans le passé. Si avec sa vision futuriste et avec le force de Google, Chrome OS parvient à séduire, Microsoft et Apple, qui ont bien du mal avec le Web, auront peut-être du souci à se faire. Mais pour cela, Google devra faire un choix impossible, tourner le dos à Android.

Images © Google
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