Apple préparerait le big bang de son écosystème pour respecter les règles du Digital Markets Act européen (DMA). Un chambardement massif, qui implique en particulier la possibilité pour les utilisateurs d'iPhone et d'iPad de pouvoir installer des applications en dehors de l'App Store — et donc, potentiellement, des boutiques alternatives.
Il faudra évidemment lire les petites lignes de la proposition d'Apple. Comme on l'a vu aux Pays-Bas avec les apps de rencontre, qui peuvent utiliser un autre système de paiement que celui de l'App Store, Apple peut se permettre d'épuiser toutes les ficelles possibles pour limiter les dégâts à son fructueux modèle économique.
Toutefois, la « menace » du sideloading demeure relativement limitée du point de vue financier. Si tous les utilisateurs européens d'iPhone et d'iPad se mettaient soudainement à bouder l'App Store officiel, cela aurait un impact de 4 % pour le chiffre d'affaires de l'activité « services », et 1 % sur le chiffre d'affaires global d'Apple durant l'année fiscale 2024, selon une enquête de Morgan Stanley.
En valeur brute, cela représente évidemment des centaines de millions de dollars. Mais à l'échelle d'Apple, qui a engrangé des ventes à hauteur de 394 milliards de dollars durant la dernière année fiscale, c'est presque de l'argent de poche.
En revanche, l'histoire serait évidemment différente si d'aventure les États-Unis embrayaient avec l'Open Act Markets App, leur « DMA maison » qui est en discussion. Si Apple devait autoriser le sideloading partout dans le monde, le manque à gagner est estimé à 9 % des revenus des services, et de 2 % des revenus totaux sur la même année fiscale. Et il s'agit du scénario du pire. Sur Android, seul 1 % des utilisateurs font leurs emplettes dans des boutiques alternatives…
Et puis l'attrait de l'App Store ne va pas se déprécier de si tôt. Les utilisateurs — la majorité d'entre eux, certainement — préféreront la sécurité et l'aspect pratique de la boutique d'Apple aux alternatives.
Apple n'est pas démunie face aux futurs concurrents de l'App Store. Le constructeur pourrait imposer un système de vérification payant aux développeurs qui voudraient distribuer leurs applications depuis internet (ce qui permettrait au passage de s'assurer d'un niveau minimal de sécurité).
On imagine en revanche mal Apple « punir » les consommateurs européens en vendant plus cher ses produits sur le vieux continent… Mais comme on l'a vu depuis la rentrée, l'entreprise privilégie volontiers les marchés américains et chinois, où les prix de l'iPhone 14 sont similaires à ceux des iPhone 13, alors qu'ils se sont envolés en Europe.
Selon Bloomberg, en interne ça rechigne pour mettre en musique les changements imposés par le DMA. L'investissement d'Apple pour accorder ses violons avec les futures règles européennes serait « significatif ». Des ingénieurs verraient ces dispositions comme une « distraction » qui les empêchent de développer les futures fonctions d'iOS.