Fidèle à ses habitudes, Apple multiplie les annonces à l’approche du Jour de la Terre, célébré le 22 avril depuis 1970. Après avoir lancé hier un fonds de 200 millions de dollars pour soutenir la reforestation, la firme de Cupertino publie aujourd’hui son rapport environnemental annuel. Un rapport qui soulève autant de questions qu’il apporte de réponses.
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Alors qu’elle s’est prononcée en faveur d’une obligation de publication des émissions de gaz à effet de serre, Apple publie son propre bilan de scope 3, au champ très étendu. Il ne s’agit pas seulement de comptabiliser les émissions directes (scope 1) et les émissions indirectes liées à la consommation énergétique (scope 2), mais toutes les émissions indirectes sur la chaine de valeur, de l’achat des matières premières à l’utilisation et la fin de vie des produits.
En 2020, Apple a été responsable de l’émission de 22,6 millions de tonnes de CO2e. Ses émissions directes sont extrêmement faibles, et celles liées au fonctionnement de l’entreprise représentent moins de 2 % du total. L’utilisation des produits frappés d’une pomme compte pour 19 % dans le bilan, mais leur fabrication (71 %) et leur transport (8 %) restent les principaux postes d’émission. Une centaine de fournisseurs d’Apple se sont engagés à passer à des sources d’énergie renouvelable.
Apple confirme son ambition de parvenir à la neutralité carbone d’ici à 2030. Mais la neutralité carbone ne signifie pas l’absence d’émission. En affirmant vouloir réduire ses émissions de 75 % par rapport au niveau — exceptionnellement élevé — de 2015, elle prévoit de continuer d’émettre une petite dizaine de millions de tonnes de CO2e. La neutralité passe par des mesures de compensation et de captation encore fort vagues.
Avec son projet de reforestation lancé en partenariat avec l’organisation à but non lucratif Conservation International et la banque d’investissement Goldman Sachs, Apple espère capter plus d’un million de tonnes de CO2e par an. La firme de Cupertino multiplie les projets similaires, notamment en Chine et au Kenya, ou même dans la mangrove colombienne.
Ces projets ont l’avantage de remplir d’autres objectifs en parallèle, comme la restauration des habitats naturels, mais l’inconvénient d’être extrêmement précaires. Ces arbres devront rester debout pendant des décennies, pendant lesquelles ils subiront les assauts du changement climatique et des activités humaines, pour remplir toutes leurs promesses.
La séquestration du carbone est un levier indispensable, et il faut saluer l’ambition d’Apple, mais incertain, et il faut dire qu’Apple repousse le sujet de la réduction des émissions liées à la production. Cela passe par des investissements massifs chez ses fournisseurs, notamment financés par des obligations vertes. Mais cela passe aussi, et surtout, par la baisse de la production et l’allongement de la durée de vie des produits.
Alors que son activité de services monte en puissance, une activité qui dépend moins de l’achat de nouveaux appareils que de l’utilisation des appareils existants, Apple ne pourra pas économiser ce débat (lire : Une pomme plus verte : Apple recycle et réutilise, mais peut-elle réduire ?). Est-elle prête à remettre en cause son modèle économique pour tenir ses ambitions écologiques ? Réponse, peut-être, dans les prochains rapports annuels.