Apple a renoncé à chiffrer l'intégralité des sauvegardes iCloud il y a deux ans, selon Reuters. C'était pourtant la suite logique du chiffrement de ces mêmes données via iTunes (ou le Finder depuis macOS Catalina), et la continuation des mécanismes de sécurité qui empêchent un tiers de pénétrer par effraction dans un appareil iOS. Du moins pas sans l'aide d'un outil comme celui de Cellebrite.
En mars 2016, alors que le débat autour de l'iPhone du tueur de San Bernardino faisait rage, des rumeurs annonçaient la volonté d'Apple de chiffrer aussi de bout en bout les sauvegardes iCloud. Actuellement, Apple possède une clé de déchiffrement de ces données : avec un chiffrement complet, la Pomme serait dans l'impossibilité de fournir au FBI et autres agences de sécurité à acronymes des informations pouvant s'avérer décisives pour des enquêtes en cours. Plusieurs types de données sont déjà chiffrés de bout en bout dans iCloud, comme les informations de paiement, de Santé, Maison, ou encore les mots de passe du trousseau iCloud et les Messages sur iCloud (lire : iPhone : ce qui n’est pas chiffré, ce qui l’est, et ce que cela signifie pour vos données).
Apple aurait abandonné les projets Plesio et KeyDrop, noms de code internes du développement du chiffrement iCloud, il y a deux ans. Une dizaine d'experts étaient attachés au dossier. Reuters avance deux raisons : Apple a pris conscience que ce dispositif allait « verrouiller » dans le nuage les données de nombreux utilisateurs, les rendant impossible à restaurer.
Autre raison, et rien ne dit que les deux n'aient pas pesé de tout leur poids pour contraindre Apple à abandonner l'idée, le FBI a fait part de ses craintes. Peu de temps après en avoir été informés, des représentants du Bureau ont expliqué au constructeur que ce chiffrement des données iCloud allait leur retirer un moyen très efficace de collecter des preuves.
Une des sources de l'agence de presse, un ancien employé d'Apple visiblement au fait de l'affaire, indique que l'argument a porté. La Pomme n'a pas voulu porter le blâme en public : pas question d'être l'entreprise qui « protège les criminels », d'être poursuivi en justice pour stocker des informations en dehors de portée des forces de l'ordre, ou encore de servir de raison à la mise en œuvre d'une législation contre le chiffrement.
Apple aurait donc décidé de faire un compromis. À côté du discours public très ferme de Tim Cook et d'Apple pour la confidentialité des données, le groupe continue d'épauler le FBI et les forces de l'ordre dans leurs enquêtes. Il leur fournit toutes les données en sa possession, des informations qui proviennent du nuage d'iCloud (lire : Rapport sur la transparence : le nombre de requêtes en France stable d'un semestre à l'autre).
Et malgré les exigences des organisations de libertés publiques comme l'EFF, qui a demandé l'an dernier à Apple de « jeter la clé » des sauvegardes chiffrées d'iCloud, l'entreprise a fait le choix du pragmatisme. Cela paiera peut-être, alors que le constructeur est embarqué dans une nouvelle polémique contre l'administration Trump (lire : Pensacola : le gouvernement américain joue-t-il franc jeu avec Apple ?).
Image d'accroche : Steve Buissinne, Pixabay