La suppression des applications VPN de l'App Store chinois a provoqué un débat sur la liberté d'accès à l'information dont sont privés bon nombre d'utilisateurs chinois d'iPhone. Les autorités ont resserré l'étau de la censure avant le prochain congrès du Parti communiste qui se tiendra au mois d'octobre ; le gouvernement a donc décidé d'interdire les VPN, qui permettaient à moindres frais de contourner la « grande muraille numérique de Chine ». Les opérateurs de ces applications doivent désormais obtenir un sésame officiel, ce qui est évidemment très compliqué.
Devant la controverse provoquée par le retrait de ces applications, Tim Cook s'est défendu d'un point de vue légal d'une part (« nous respectons la loi »), et en avançant une explication plus politique d'autre part (« nous discutons avec les gouvernements »). Lire : Chine : Tim Cook préférerait « ne pas retirer d’apps » de l’App Store.
Ces déclarations ne satisfont pas Reporters sans frontières, qui dans une lettre ouverte à Isabel Ge Mahe, nouvelle directrice générale Chine d'Apple, se fait l'avocat des internautes et des journalistes pour lesquels ces applications permettaient de se protéger de la surveillance et d'accéder à des sites « interdits ». RSF comprend que la décision d'Apple a été prise pour s'attirer les « bonnes grâces du pouvoir ».
L'association manie la dérision et le cynisme en proposant à Apple d'aller un peu plus loin dans l'adaptation de son modèle d'affaires aux spécificités du « rêve chinois », au travers de cinq « conseils » mordants. RSF propose ainsi à Apple d'intégrer un fond d'écran à la gloire du « grand timonier Xi Jinping », tout en « évitant les images dans lesquelles le président ressemblerait de trop près à Winnie l’ourson ». Il parait qu'il déteste ça.
RSF conseille aussi de retirer du clavier virtuel d'iOS les caractères permettant de contourner la censure (les émojis cercueil et larmes représentaient Liu Xiaobo, le prix Nobel de la Paix mort en détention). L'App Store chinois pourrait ne proposer que des applications contrôlées par le pouvoir. La fonction de partage familial d'iTunes gagnerait à s'élargir à la « grande famille » du Parti qui aurait ainsi un accès au contenu des appareils. Enfin, « chaque militant, journaliste ou blogueur emprisonné » se verrait offrir une Apple Watch afin de suivre la détérioration de sa santé en prison.
Reporters sans frontières reproche à Apple son approche pragmatique en Chine : « si vous la généralisez, [elle] garantira à Apple la clientèle des autocrates du monde entier et permettra à ses actionnaires de s’enrichir encore un peu plus. À Cupertino, les droits de l’homme semblent peser bien peu en regard des cours de la bourse ».