Jony Ive n’a plus grand chose à prouver. Le designer en chef d’Apple et son équipe ont permis à l’entreprise de devenir ce qu’elle est aujourd’hui, mais après avoir tout prouvé, reste-t-il encore des défis à relever ? La sortie du livre Designed by Apple in California marque une sorte de bilan — les premières images présentent en effet l’iMac de 1998, au moment où Ive prend les rênes du studio du design d’Apple sous l’impulsion de Steve Jobs (lire : Nous avons reçu et feuilleté "Designed by Apple in California”).
Depuis, il a couché sur le papier et créé dans son atelier bien des merveilles, mais depuis quelques temps on le voit moins, même si sa présence se fait toujours entendre dans les vidéos de présentation d’Apple. John Gruber, dans son podcast The Talk Show, s’est laissé dire que le chevalier commandeur de l’ordre de l’Empire britannique se concentrait surtout sur l’architecture du nouveau campus d’Apple toujours en construction. En début d’année, lui et Tim Cook avaient été interviewés par le magazine Vogue à l’occasion d’une visite sur le chantier du spaceship.
Il est aussi très impliqué dans le design des boutiques Apple et il travaille beaucoup avec Angela Ahrendts. Toute cette activité ne lui laisse pas beaucoup de temps pour le reste. Il se murmure également qu’il aurait pris du champ après la réduction de voilure de Titan : plutôt qu’une voiture au complet, ce projet au long cours ressemble maintenant plus à une sorte de CarPlay 2.0 avec des fonctions de conduite autonome. Pas vraiment un défi pour un designer de la trempe de Jony Ive.
Ce retrait relatif (et à confirmer) des opérations quotidiennes ne signifierait pas pour autant un effacement du designer. Au contraire, Jony Ive est la « personne la plus influente dans l’entreprise », il tiendrait désormais un rôle « à la Jobs », un « leadership spirituel » complète Gruber, où il a le pouvoir d’obtenir d’Apple ce qu’il souhaite.
L’histoire n’a jamais été documentée, mais ce serait bien Ive qui aurait poussé le constructeur à lancer une déclinaison en or 18 carats de l’Apple Watch. Il voulait travailler avec ce matériau, et la montre était sans aucun doute le seul produit qui lui permettait de se frotter à l’or. Il en irait de même pour la voiture, que Ive aurait poussé avant de faire connaître son mécontentement dans l’avancée du projet.
Si tout cela est vrai, faut-il s’inquiéter pour le design des futurs produits d’Apple ? Perdront-ils l’élégance et la simplicité (et l’obsession de la minceur) du designer anglais ? Sans doute pas, du moins pas tout de suite : la petite équipe que Ive a formée autour de lui est là pour durer et son héritage est plus que jamais d’actualité.
Et puis ce retrait n’est pas complètement une surprise : lors de son changement de poste en mai 2015, quand il était promu Chief Designer Officer, il laissait le soin à Richard Howarth (design) et Alan Dye (interface) de s’occuper des opérations au jour le jour (lire : Jony Ive est désormais Chief Designer Officer et il prend du recul)