Les pions sur l’échiquier commencent à se mettre en place : d’un côté, Apple, la Silicon Valley et une bonne partie des utilisateurs soucieux de la confidentialité de leurs données ; de l’autre le FBI, une partie des politiques et les agences gouvernementales qui voudraient pouvoir accéder au contenu des smartphones.
Apple fourbit ses armes pour aller le plus loin possible dans la partie, jusqu’à la plus haute juridiction des États-Unis s’il le faut (lire : Apple choisit des avocats habitués à plaider devant la Cour suprême). Dans l’autre camp, on compte ce soir un renfort de poids : le Department of Justice (DoJ), l’équivalent du ministère de la Justice au niveau fédéral.
Le DoJ a déposé une requête auprès de la cour fédérale pour forcer la main d’Apple afin qu’elle obtempère à l’injonction de déverrouiller l’iPhone 5c du tueur de San Bernardino. La procureure s’en prend vertement aux arguments de Tim Cook selon lequel, en substance, le FBI demande au constructeur de créer une « porte dérobée » dans iOS.
La requête n’est pas, comme les déclarations publiques d’Apple l’expliquent, de créer une "porte dérobée" dans tous les iPhone. Elle n’est pas de fournir aux "pirates et aux criminels" un accès aux iPhone, elle n’exige pas d’Apple de "pirater ses propres utilisateurs" ou "déchiffrer ses propres téléphones". Elle ne donne pas au gouvernement "le pouvoir de pénétrer dans l’appareil de quiconque" sans un mandat ou l’aval de la justice. Et elle ne compromet pas la sécurité des informations personnelles.
Plus rude encore, la procureure estime que ce refus d’Apple n’est autre qu’une « stratégie marketing », le constructeur se préoccupant surtout de son modèle économique. Elle note aussi que par le passé, Apple s’est pliée aux demandes de la justice (ce que Tim Cook ne nie pas, le constructeur devant obéir aux lois comme tout un chacun) sur « des appareils fonctionnant avec d’anciennes versions d’iOS ». Or, depuis iOS 8, les données sont chiffrées et Apple n’en possède pas la clé — même s’il existe des moyens détournés d’arriver à ses fins (lire : John McAfee peut déplomber "l'iPhone de San Bernardino" en 3 semaines).
La Maison Blanche a tenté de son côté de rapprocher les positions, en affirmant qu’il ne s’agissait que d’un cas isolé. Mais un cas isolé qui créerait un précédent et qui pourrait se multiplier, au-delà même des frontières américaines.