Entre Apple et Michael Bromwich, l’auditeur imposé par la justice américaine suite au procès perdu sur l’iBooks Store, ça n’a jamais été le grand amour et pour cause : Bromwich a tous les pouvoirs pour surveiller les faits et gestes de la Pomme… du moins dans le périmètre délimité par la décision de la justice, c’est à dire la conformité de l’entreprise avec la législation antitrust dans le cadre de son activité de distribution de livres numériques.
Il semble pourtant que Bromwich aille bien au-delà de son rayon d’action. Le Wall Street Journal a épluché les émoluments de l’auditeur, qui se montent jusqu’à présent à 2,65 millions de dollars (il facture l’heure de travail 1 100$), et trouvé que l’approche de l’auditeur constituait un « abus majeur selon les standards [des pratiques] antitrust modernes ». D’après le journal, Apple serait dans son bon droit de porter plainte contre Michael Bromwich, si jamais le constructeur devait remporter un prochain appel contre cette décision de la justice US le mois prochain. Même si les deux parties ont tenté de se rabibocher en avril dernier, Apple pourrait bien saisir cette perche.
Car le problème, c’est que l’auditeur conduit des enquêtes qui dépassent ses prérogatives. En avril 2014, Bromwich avait expliqué qu’il n’avait pas une compréhension complète de la structure d’entreprise d’Apple et de ses différentes activités, ce qui a nécessité du temps et de nombreuses auditions (80 entrevues avec des dirigeants et des cadres du groupe). En octobre dernier, il a fini par obtenir l’accès aux dirigeants de premier plan, exception faite des divisions design et marketing. Il a aussi eu le feu vert d’Apple pour aller fouiner du côté des équipes de Siri, de Plans ou encore de l’ingénierie matérielle, ce qui n’a rien à voir avec ses attributions.
La Pomme n’a jamais admis sa culpabilité tout au long du processus judiciaire de ce dossier au long cours. On comprend dès lors pourquoi l’entreprise fait preuve d’une mauvaise volonté manifeste pour se conformer aux desideratas d’un auditeur dont les liens avec les adversaires d’Apple dans cette affaire — dont le Department of Justice et les avocats des parties à l’origine de l’action de groupe qui réclament 800 millions de dollars d’amende — ne sont pas de nature à faciliter la confiance.
La position d’Apple pourrait se voir renforcée par la décision de la cour d’appel : les trois juges en charge de l’appel semblent en effet aller dans le sens de l’entreprise. Un d’entre eux a ainsi pu se féliciter de voir un nouvel entrant dans un secteur de la distribution de livres numériques dominé à 90% par Amazon.