Les oreilles d'Apple ne cessent de siffler depuis les lancements d'iOS 8 et d'OS X Yosemite autour de la qualité des logiciels système du constructeur : les nombreux bugs et bizarreries recensés donnent l'impression que la Pomme n'arrive pas à maîtriser le rythme annuel qu'elle s'est elle-même imposée (lire : Ces bugs d'iOS et OS X qui gâchent le plaisir). L'accumulation de bugs, dont certains ressemblent à des fautes de débutants comme l'étonnant « effet Pinocchio » donne à réfléchir : Marco Arment a début janvier initié une large discussion publique sur le problème (lire : OS X à marche forcée, Apple doit-elle ralentir la cadence ?). Jean-Louis Gassée ajoute son petit grain de sel dans sa note hebdomadaire.
Pour illustrer son propos, l'ancien DG d'Apple liste quelques bugs d'OS X qui lui sont particulièrement pénibles, comme l'intégration mal fichue d'hyperliens dans Pages, la multiplication des doublons dans iTunes, les fonctions de base toujours manquantes dans iWork sur iCloud… Au delà de la liste à la Prévert que chaque utilisateur pourra compléter, Gassée met en parallèle ces bugs de plus en plus visibles et nombreux avec la hausse continue des dépenses en recherche et développement d'Apple : +39% en 2012, +32% en 2013, +35% en 2014.
Une grande partie de ces investissements colossaux est consacrée à l'embauche de nouveaux ingénieurs logiciels et développeurs : « empiler les gens les uns sur les autres », selon l'image de Jean-Louis Gassée, et la multiplication de couches de plus en plus opaques, résulte en des problèmes toujours plus aigus de gestion du personnel ainsi qu'une capacité diluée à diagnostiquer les problèmes des uns et des autres.
Autre considération à prendre en compte : où placer les meilleurs éléments ? Sur iOS ou OS X ? Dans Pages ou Mail ? Le créateur de BeOS donne justement l'exemple de Mail, qui a souffert plus qu'à son tour des atermoiements d'Apple en termes de suivi qualité de ses logiciels. Durant plusieurs années, l'application de gestion d'e-mails d'Apple a souffert de gros soucis de fiabilité; il a fallu la mise en place d'un nouveau directeur pour que des décisions soient finalement prises et faire en sorte que l'application soit (un peu plus) aboutie. Et Jean-Louis Gassée de souhaiter que les équipes en charge du développement d'iTunes et d'iWork aient rapidement droit à la même médecine…
Il espère surtout qu'Apple ne se contentera pas de glisser sur la pente d'une « médiocrité satisfaite » : « Si Apple passait une année à se concentrer sur des correctifs solides plutôt que sur le lancement de logiciels juste bons à accompagner les nouveautés matérielles, cela montrerait une volonté de tirer la qualité vers le haut plutôt que de la laisser glisser ». Vœu pieux ? On aura une petite idée du chemin que prendra Apple en juin, durant la WWDC.