Apple a publié son huitième rapport sur sa chaîne de production et ses fournisseurs [PDF]. Une publication accompagnée d'un entretien accordé au Financial Time par Jeff Williams, le responsable des opérations chez Apple (l'ancien poste de Cook). Une partie de ce compte-rendu concerne les « matières premières de la honte ».
Le vice-président annonce que depuis un mois, et pour la première fois, Apple a été en mesure de s'assurer que la tantalite utilisée dans les résistances ou condensateurs de ses produits ne provenait pas de régions où l'exploitation de certains minerais est à l'origine de conflits meurtriers, notamment en République démocratique du Congo.
C'est une problématique récurrente qui concerne toute l'industrie électronique (lire aussi Apple, Intel, HP et Motorola mènent le mouvement conflict-free). Intel au début janvier a fait des annonces aussi en ce sens. En 2010, interrogé sur la question, Steve Jobs avait expliqué qu'Apple s'en tenait, à défaut de mieux, à des engagements signés par ses fournisseurs :
Oui. Nous demandons à tous nos fournisseurs de s'engager par écrit à ne pas utiliser de "conflict minerals" (sic). Mais honnêtement, ils n'ont aucun moyen d'être sûrs. À moins que quelqu'un n'invente un moyen de tracer chimiquement les matières premières depuis la mine dont elles sont issues, ce sera un problème vraiment difficile à résoudre.
Aujourd'hui encore, Apple demande aux fonderies par lesquelles transitent ces minerais d'assurer leur traçabilité depuis les mines d'origine. Des audits sont conduits sur la provenance de l'or, de l'étain et du tungstène. Williams oppose à ce sujet deux stratégies. La première serait qu'Apple ne travaille qu'avec une poignée de fonderies dont elle a pu vérifier le sérieux « ce serait le chemin le plus rapide ».
C'est l'autre voie qui a été privilégiée avec l'ambition de réellement peser sur le plus d'acteurs possible afin d'obtenir des évolutions de plus grande ampleur « Les fonderies sont un point de passage obligé. Si nous pouvons vérifier le plus de fonderies possible en exerçant cette pression, alors nous avons une chance réelle d'influer sur les diverses activités sur le terrain ».
Jeff Williams pointe toutefois les limites de cette approche. La moitié de la production mondiale de la tantalite est utilisée par l'industrie électronique, ce qui permet d'avoir quelques exigences et espérer qu'elles soient suivies d'effet. En revanche, ce secteur pèse nettement moins lorsqu'il s'agit d'étain, de tungstène ou d'or. La capacité à faire bouger les choses n'est donc pas la même.
Apple produit désormais une liste, établie avec des ONG [PDF] des fonderies qui répondent ou non aux exigences posées. Des installations présentes partout dans le monde, de l'Europe à l'Asie en passant par l'Afrique ou le Moyen-Orient. Dans l'ensemble de la chaîne de production des appareils d'Apple, 59 fonderies répondent aux exigences du programme "Conflict-Free Smelter Program", 23 s'y sont engagées et la situation n'est pas connue pour 104 autres, installées pour certaines en Europe, mais principalement en Chine et Indonésie.