Si les success-stories de développeurs devenus millionnaires en très peu de temps grâce à l’App Store sont légion, ce n’est pas le cas du Mac App Store au regard des revenus générés par certaines applications qui occupent le haut de l’affiche (lire : L'illusion du top des ventes sur le Mac App Store).
Il convient tout d’abord de préciser un point : si l’App Store a fait quelques millionnaires, l’immense majorité des développeurs d’apps pour iPhone et iPad n’ont gagné que des clopinettes. Mais il est vrai que si vous parvenez à atteindre les hautes sphères de l’App Store, alors les choses peuvent devenir rapidement très intéressantes sur le plan financier. On prendra l’exemple de Mister Jump, qui à partir du moment où il s'était installé en tête des classements, générait au minimum plus de 10 000 € par jour (lire : Mr Jump : le nouveau Flappy Bird sera-t-il français ?).
Les bannis du Mac App Store
Mais de quel mal souffre le Mac App Store ? Prompts à râler, les développeurs ne l’ont pas abandonné pour autant. De leur point de vue, la plate-forme de distribution d’Apple a de nombreux défauts : elle est rigide à cause des règles de sécurité imposées par Apple, comme le sandboxing, elle ponctionne 30 % des revenus générés et elle ne permet pas de faire de mises à jour payantes.
Pourtant si l’on se place du côté d’Apple, la plate-forme de téléchargement est un franc succès. Certes, il y a quelques éditeurs qui ont pris plus ou moins leur distance avec le Mac App Store comme Panic ou Realmac Software. Mais c’est une minorité et on peut noter que ceux qui se plaignent en la matière sont souvent des éditeurs de longue date qui ont distribué leurs logiciels avant l’apparition de la boutique.
Presque tous les grands noms du développement sur Mac sont sur le Mac App Store. Même Microsoft s’y est mis : on trouve déjà OneNote dessus et tout laisse à penser que la prochaine version d’Office sera disponible sur la boutique d’Apple. Les ingénieurs de Microsoft ont pris le soin de placer Word, Excel et PowerPoint dans une sandbox, condition sine qua non à leur ajout au store.
Parmi les absents du Mac App Store, il manque principalement cinq types de logiciels :
- les applications professionnelles comme les outils Adobe, mais on notera que l’éditeur de San José fait acte de présence a minima sur le Mac App Store ;
- les applications de virtualisation qui font partie des logiciels les plus vendus sur Mac ;
- les outils que l’on qualifiera de geek et qui ne peuvent pas être sandboxés : on pense pêle-mêle à Little Snitch, iStat Menus, LaunchBar… ;
- les applications liées à Internet comme les navigateurs web (Firefox et Chrome sont absents du Mac App Store) ou encore certaines apps associées à des services en ligne ;
- certaines applications open-source (la licence GPL est incompatible avec les App Store).
Les applications absentes ne sont, soit pas compatibles (par nature) avec les règles édictées par Apple, soit n’ont pas vocation à se retrouver sur le Mac App Store (on pense notamment aux applications professionnelles ultra-pointues). Mais pour Apple, la véritable question est de savoir si sa boutique a permis l’émergence de nouveaux éditeurs et de nouveaux logiciels.
Une grande partie des mécontents sont des éditeurs de longue date sur Mac. Lors des mois qui ont suivi le lancement du Mac App Store, les classements étaient même squattés par des applications éditées par Apple. Comme le montre cette capture, c’est beaucoup moins le cas aujourd'hui : à cet égard, la boutique de logiciels a bien offert à d’autres éditeurs une meilleure visibilité.
Une nouvelle génération de logiciels
Le premier succès du Mac App Store, c’est sans doute Pixelmator. L’éditeur d’images existait avant le lancement de la plate-forme de téléchargement d’Apple, mais ses auteurs étaient convaincus que la boutique était l'avenir de la distribution en ligne de logiciels. Par conséquent, ils ont misé exclusivement sur celui-ci et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils ont bien fait. Pixelmator a ramené à ses auteurs la coquette somme d’un million de dollars dans les vingt jours qui ont suivi le lancement du MAS, une success-story sur laquelle Apple a beaucoup communiqué pour illustrer le potentiel de sa plate-forme.
C’est peut-être dans la création que le Mac App Store a le plus permis l’émergence de nouveaux outils. On pense entre autres à l’éditeur Markdown Ulysses, au logiciel de création HTML5 Hype 3, à Napkin qui permet de mettre facilement ses idées sur « papier », à Flare 2 qui permet d’ajouter facilement des effets à vos images, à l’application de journal DayOne, etc.
Toutes ces applications ne sont pas forcément disponibles seulement sur le Mac App Store, mais ce dernier a contribué à leur renommée. Car il ne faut pas l’oublier, le Mac App Store est autant un canal de vente qu’un canal de promotion. Ça l’est d’autant plus que les applications sont plus facilement mises en avant que sur l’App Store iOS, où la concurrence est autrement plus importante.
Les mêmes défauts que l’App Store
Néanmoins, le Mac App Store souffre également des mêmes défauts de conception que l’App Store. À commencer par un problème de plus en plus gênant : la quantité a pris le pas sur la qualité. On trouve de nombreux clones, souvent chinois, de logiciels déjà existants ou qui sont parfois de simple clones d’applications open-source. Un exemple : en vente à 6,99 € depuis un an environ, RSS Reader Pro ne semble pas être autre chose qu’un clone (légèrement amélioré dans le meilleur des cas) de Vienna, le fameux client RSS.
Il y a également des effets de mode qui sont de plus en plus récurrents. Les gestionnaires de tâches sont à la mode ? Le Mac App Store et l’App Store ont été assaillis par les éditeurs qui ont tous voulu proposer leur version. Malheureusement, sans apporter grand-chose pour la plupart d’entre eux. Même chose plus récemment pour les éditeurs Markdown. Il y en a peut-être cinq qui flirtent avec l’excellence et cinquante autres qui ne sont que des clones médiocres.
Mais ce dont souffre le plus le Mac App Store, c’est peut-être d’être une plate-forme de distribution de seconde zone par rapport à l’App Store pour appareils iOS. Une part croissante de logiciels sont de simples portages de versions mobiles. Cela a toujours été vrai pour les jeux, mais ça l’est de plus en plus pour les apps qui sont des descendantes d’apps iOS. Parfois, la transition est très bien faite, mais souvent, ce n’est pas le cas du tout.
Cette situation montre aussi que le centre de gravité d’Apple et de ses utilisateurs a évolué : le Mac vit dans l’ombre de l’iPhone et de l’iPad. Les priorités ont évolué, les budgets des éditeurs de logiciels ont suivi en conséquence. On est sans doute plus prompt à télécharger des application pour iPhone ou iPad que pour Mac. Et avec l’arrivée prochaine d’un SDK pour l’Apple Watch, les choses ne vont probablement pas aller en s’améliorant…