Un « zombie des années 90 » : voilà comment la faille FREAK (pour Factoring attack on RSA-EXPORT Keys) est qualifiée par Nadia Heninger, cryptographe de l’université de Pennsylvanie qui, avec l’aide de l’INRIA en France et de quelques autres labos a mis au jour cette étrange vulnérabilité tout droit issue des temps anciens. Le gouvernement américain a un temps interdit l’exportation de produits comportant de trop fortes capacités de chiffrement des données; ces restrictions ont été levées à la fin des années 90, mais il se trouve que ces systèmes de chiffrement faible (à 512 bits, un standard considéré à l’époque comme assez fort) ont perduré et se retrouvent toujours dans la plupart des logiciels utilisés actuellement.
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Les utilisateurs de produits Apple et Google sont notamment concernés par cette faille particulièrement problématique, qui permet à des pirates de jouer la partition de « l’homme du milieu » entre les internautes et les serveurs de sites web normalement sécurisés, comme Whitehouse.gov ou NSA.gov. Les chercheurs en sécurité ont pu « forcer » les navigateurs à exploiter cet antédiluvien système de chiffrement, puis à le craquer en moins de 7 heures, en utilisant des ordinateurs utilisant les services d’Amazon Web : le résultat est que des hackers malintentionnés auraient, par cette méthode, un accès complet à des données sensibles : identifiants, mots de passe…
« Nous pensions bien sûr que les gens avaient cessé d’utiliser [ce système] », explique Karthikeyan Bhargavan de l’INRIA, un des premiers labos ayant débusqué la faille. Le problème est de taille et potentiellement dévastateur : plus d’un tiers des sites chiffrés (dont ceux qui arborent une icône de cadenas synonyme de protection SSL) seraient vulnérables aux attaques — distributeurs, services financiers, sites de presse… 5 millions de sites web, sur les 14 millions et quelques qui sont chiffrés sont susceptibles d’être frappés.
La riposte ne s’est heureusement pas fait attendre : Akamai a déclaré qu’il avait tenté d’« atténuer » le problème; plusieurs sites ont rehaussé leur sécurité, à l’instar de FBI.gov et Whitehouse.gov (ironiquement, NSA.gov reste vulnérable…). Si le moteur de recherche de Google et la version de bureau de Chrome ne sont pas sujets à la faille FREAK, ce n’est pas le cas de la déclinaison mobile du butineur. Enfin, Apple a fait savoir, par la voix de sa porte-parole Trudy Miller, qu’un correctif était en préparation et qu’il sera disponible la semaine prochaine pour les Mac et ses terminaux mobiles.