Tim Cook est un habitué des conférences « Technologie et internet » organisées par Goldman Sachs. Il y a participé à de nombreuses reprises ces derniers années, exception faite de l’an dernier. Ce rendez-vous n’est ni le lieu, ni le moment pour le CEO d’Apple de faire des annonces importantes, mais il y lève souvent le voile sur la culture et la gouvernance de l’entreprise.
Tim Cook a servi à l’assistance un couplet bien connu sur la culture d’innovation d’Apple. L’entreprise, qui a connu le meilleur trimestre de toute son histoire, se concentre non pas sur les chiffres, mais sur ce qui amène ces chiffres : les produits, les services d’Apple. Il explique que quand on achète un Mac, on n’acquiert pas uniquement un ordinateur, mais tout l’écosystème de logiciels et de services qui vont avec. « Acheter un Mac, c’est acheter l’expérience de l’intégration entre le matériel et les services logiciels ».
Le Mac a eu droit à une chaleureuse accolade de la part de Cook. Les ordinateurs d’Apple ont un bel avenir, croit-il deviner, malgré une industrie qui « rétrécit ». Depuis 10 ans il ne cesse de grappiller des parts de marché : il en détient aujourd’hui 7%. Le constructeur, qui a engrangé pour 25 milliards de dollars l’an dernier en vente de Mac, va continuer à investir dans ses ordinateurs. « Nous sommes cinq fois au dessus des revenus d’une industrie que beaucoup de gens regardent comme une chose du passé, ou morte ».
Les iPhone 6 sont la preuve de la recherche de l’excellence du constructeur (y compris au niveau de la production et de l’approvisionnement) — certains pourront toujours lui reprocher ceci ou cela, mais toujours est-il qu’Apple dispute désormais le titre de constructeur numéro un au monde.
Le carton plein de l’iPhone 6 valide la stratégie d’Apple de s’adresser d’abord et avant tout au haut de gamme. Le constructeur n’a nullement besoin de développer un iPhone moins cher pour la Chine. Et il ne faut évidemment pas compter sur Apple pour concevoir des produits cheap.
Une des annonces de cette séance décontractée de questions/réponses a été l’annonce d’un investissement de 850 millions de dollars dans une ferme de panneaux solaires à Monterey, en Californie. Cet équipement, grand de 526 hectares, peut alimenter 60 000 foyers, mais en lieu et place il servira plutôt à alimenter les installations du Campus 2, le centre de données de Newark, ainsi que 52 Apple Store à travers la Californie. D’après les mots même de Tim Cook, il s’agit du projet « le plus important, le plus grand et le plus ambitieux » jamais conçu par Apple.
L’Apple Watch a évidemment été au centre des discussions. La montre connectée a été comparée à l’iPod et à l’iPad, des produits qui eux aussi ont été lancés alors qu’il existait une certaine concurrence (l’iPad est arrivé sur un marché de niche). Pour chacun de ces appareils, Apple a su offrir une expérience bien meilleure que les autres constructeurs. Le constructeur nourrit l’ambition, avec sa montre, de changer la vie des gens — en plus des fonctions de l’appareil, Tim Cook a mis l’accent sur les nombreuses personnalisations offertes, sur le design de l’appareil et les différentes manières innovantes de communiquer entre utilisateurs.
Le CEO d’Apple a donné un exemple de fonction amusante : lorsque l’utilisateur reste assis trop longtemps, l’Apple Watch prévient qu’il faut bouger. Durant les réunions, au bout d’une heure, il voit les participants commencer à se lever sur les conseils de leurs montres… Rester assis, c’est un « nouveau cancer », explique Cook sur la foi de rapports de médecins. C’est pourquoi l’Apple Watch « oblige » son porteur à se tenir debout au moins 10 minutes chaque heure.
Apple Pay, le service de paiement sans contact d’Apple, est désormais utilisé par 2 000 banques et institutions financières aux États-Unis (750 ont signé le mois dernier). Le modèle économique de ce service lancé en octobre dernier n’est pas de récolter les données des utilisateurs, a rassuré Tim Cook. Apple prélève sur chaque transaction une petite dîme (au pourcentage non précisé). Le déploiement d’Apple Pay est plus rapide qu’anticipé; chez Panera Bread par exemple, 80% des paiements mobiles sont réalisés avec Apple Pay.
Le marché chinois est toujours (et encore plus) d’un intérêt stratégique pour Apple. 40 Apple Store y ouvriront leurs portes d’ici l’année prochaine (4 ont ouvert ces dernières semaines dans des villes de 9 millions d’habitants en moyenne). Le constructeur a noué au pays des partenariats avec des moteurs de recherche, des fournisseurs de services et des opérateurs et tisse sa toile dans cet immense Empire du Milieu.
Le partenariat avec IBM, qui commence à porter ses fruits au travers d’une première sélection d’apps métier, est une relation entre deux sociétés aux atouts complémentaires : IBM a une profonde connaissance d’un grand nombre de marchés verticaux, et des ressources sur le terrain; du côté d’Apple, Tim Cook cite les produits, les applications, l’expertise logicielle… d’ailleurs, les commerciaux d’IBM sont équipés de Mac et d’outils Apple (lire : IBM doit présenter ses apps iOS avec des Mac et Keynote).
Pour finir, Tim Cook a déclaré qu’Apple était la seule entreprise à disposer à la fois d’un système d’exploitation mobile et de bureau grand public. Windows Phone ne compte pas vraiment chez Microsoft, et Android reste cantonné à la mobilité chez Google (Chrome OS restant encore assez confidentiel). Cette combinaison unique permet à Apple de mettre sur pied des services uniques comme Continuité.
On le voit, Tim Cook n’a pas fait de révélation fracassante durant cette conférence, mais la démonstration de la vitalité d’Apple et de son ambition tranquille.